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Épidémie de Mpox: “Agir rapidement permet de briser la chaîne de transmission”

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Enfant soigné du Mpox dans un centre Medair en RDC.

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Agnès Pinard Legry - publié le 03/09/24
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L’Unicef a lancé fin août "un appel d'offres d'urgence" afin d'obtenir des vaccins contre le Mpox pour aider les pays les plus durement touchés. En RDC, pays particulièrement affecté par l'épidémie, l’ONG Medair poursuit son action sans relâche. "Nous hospitalisons en moyenne 20 patients par jour, avec dix nouvelles admissions quotidiennes", confie sur place à Aleteia le docteur Pierre-Olivier Ngadjole.

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé, vendredi 30 août, l'arrivée dans les "prochains jours" des premiers vaccins contre le Mpox en République démocratique du Congo (RDC), l'un des pays africains les plus touchés par l'épidémie. "Nous espérons que la première livraison aura lieu dans les prochains jours" et d'autres devraient suivre, a déclaré le directeur général de l'agence onusienne, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, lors d'une conférence de presse à Genève, de retour de RDC. Également appelé variole du singe, le Mpox, qui peut être mortel, se manifeste par une période d’incubation d’environ douze jours avec souvent un syndrome fébrile (courbatures, fatigue, céphalées etc) puis une phase éruptive durant deux à quatre semaines. Lors de cette phase peuvent survenir des éruptions cutanées sous forme de petites tâches qui atteignent l’ensemble du corps dont la paume des mains et la plante des pieds, avec un gonflement des ganglions lymphatiques.

Sur place, ONG et organismes internationaux ne ménagent pas leur peine pour lutter contre cette épidémie. Parmi elles Medair, une organisation humanitaire internationale qui intervient depuis le mois de juin en RDC. "Pour contenir l’épidémie et freiner sa progression, il est crucial de bien gérer les cas suspects", souligne auprès d’Aleteia le docteur Pierre-Olivier Ngadjole, médecin travaillant pour Medair en RDC. "En agissant rapidement, nous pourrons briser la chaîne de transmission autour des cas suspects et offrir des soins gratuits pour toutes les populations pour qu’il n’y ait pas une barrière financière."

Aleteia : Quelle est la situation en RDC ?
Docteur Pierre-Olivier Ngadjole : La RDC est actuellement le pays avec le plus grand nombre de cas depuis 2024 : 18.000 cas ont été officiellement confirmés et on dénombre 800 décès, soit un taux de mortalité de 4 à 5%. Le foyer actif se trouve dans la région ouest, le long du fleuve Congo, dans les forêts humides où le contact entre les humains et les animaux de la forêt est fréquent. Kamituga, située dans les zones minières, est également un point chaud. Cette région est déjà fortement touchée par le VIH, ainsi que par le Mpox, avec 75% de la population affectée par cette maladie. À Goma, le foyer de l'épidémie concerne principalement les enfants en raison des mauvaises conditions d'hygiène. Dans cette zone, 75% des cas concernent des enfants. La situation y est particulièrement préoccupante. Songez que 600.000 personnes ont fui le conflit qui fait rage dans le pays et se trouvent aujourd'hui dans des camps pour personnes déplacées autour de Goma. Les conditions d'hygiène y sont précaires. Dans ces camps, il peut y avoir jusqu'à 15 personnes vivant sous une même tente, ce qui favorise une transmission continue, principalement parmi les enfants.

La période d'incubation du virus est de 14 à 21 jours. Chaque jour, deux cas sévères sont recensés et nécessitent une hospitalisation.

Comment, concrètement, agissez-vous sur place ?
Medair est une organisation humanitaire internationale qui intervient depuis le mois de juin, lorsque les premiers cas de Mpox ont été détectés. À leur arrivée, ces cas étaient légers et ont pu être gérés en ambulatoire. Nous avons néanmoins décidé de lancer une action pour répondre aux besoins croissants et avons identifié un site pour accueillir les cas plus compliqués. Il était essentiel de se concentrer sur les cas modérés et sévères, c'est pourquoi nous avons réactivé le site initialement destiné aux cas de Covid. Le site a été désinfecté, et en l'espace de dix jours, il était opérationnel.

D’autres organismes et ONG sont présents sur place. Comment fonctionnez-vous ?
Pour le foyer à Goma, Medair a été la première ONG à répondre à cette flambée de cas de Mpox. Depuis août nous travaillons également avec l’ONG Alima dans ce secteur pour faire de la prise en charge. Mais pour d’autres foyer à l’ouest du pays, à Kinshasa et dans d'autres provinces qui se situe le long du fleuve, c'est MSF qui est actif. Dans le foyer de Kamituga, on retrouve encore Alima. Ils ont déjà géré cette épidémie en 2022-2023 dans la province de Maniema. D'autres organisations sont encore en recherche de fonds pour répondre aux besoins des populations.

Combien de personnes sont accueillies et soignées par les équipes Medair ?
Nous hospitalisons en moyenne 20 patients par jour, avec dix nouvelles admissions quotidiennes. La période d'incubation du virus est de 14 à 21 jours. Chaque jour, deux cas sévères sont recensés et nécessitent une hospitalisation.

L’OMS a recommandé le 19 août de lancer des plans de vaccination dans les pays touchés. Concrètement comment Medair les déploie en RDC ?
La vaccination est l'une des stratégies clés dans notre plan de riposte. C'est un moyen efficace qui a permis de stopper la rougeole dans les années 1960. Mais les vaccins sont disponibles en quantité limitée, ce qui nécessite de réfléchir aux priorités, notamment pour les groupes vulnérables. Aucun pays ne pourra vacciner l'ensemble de sa population. Des discussions sont en cours avec le gouvernement du pays à travers son programme élargi de vaccination pour déployer les vaccins dans les différentes provinces. Nous sommes encore au stade de la planification et attendons des communications supplémentaires à l'échelle nationale.

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Action de prévention et de sensibilisation de Medair en RDC face à l'épidémie de Mpox.

Y a-t-il un risque de pandémie mondiale ?
Oui, ce risque existe ! L'OMS a déclaré une urgence de santé publique et de portée internationale. Des cas ont été signalés dans les pays d'Europe du Nord et lorsqu’il y a des déplacements en Afrique où la contamination est possible. Les risques sont bien réels mais un renforcement des mesures pourrait aider à gérer la crise. Dans ces pays, il y a aussi la transmission sexuelle donc même sans le déplacement en Afrique, c’est une voie de propagation importante. C’est aussi pour cela que le monde entier est sensibilisé, la transmission peut être directe ou cutanée. Nous vivons dans un monde où les contacts sont fréquents, dans les marchés, les supermarchés, et les agglomérations, ce qui rend le respect de l'hygiène absolument crucial.

Quelle est l’urgence aujourd’hui ?
Pour contenir l’épidémie et freiner sa progression, il est crucial de bien gérer les cas suspects. En agissant rapidement, nous pourrons briser la chaîne de transmission autour des cas suspects et offrir des soins gratuits pour toutes les populations pour qu’il n’y ait pas une barrière financière. L'hygiène et la prévention sont également primordiales. Grâce à la sensibilisation, il faut que les gens connaissent les symptômes de la maladie. Il est essentiel à long terme d'encourager la vaccination pour renforcer l’immunité collective.

Êtes-vous plutôt confiant pour l'avenir ?
Nous restons confiants pour l'avenir, forts des acquis obtenus lors des épidémies d'Ebola qui était plus meurtrière et de Covid-19. Aujourd'hui, face à Mpox, nous pouvons tirer parti de ces expériences. Les populations sont désormais plus sensibilisées et mieux informées pour comprendre les épidémies, grâce aux mesures de prévention mises en place. Avec ces mesures et la sensibilisation accrue, la population est mieux préparée et plus enclin à adhérer aux recommandations. Nous restons optimistes et continuerons à travailler avec un engagement communautaire fort pour soutenir cette riposte.

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