Le sommet sur la paix en Ukraine, organisé en Suisse le 15 juin dernier, n’avait abouti à aucune avancée tangible, notamment parce que la Russie n’était pas conviée et que la Chine avait décliné sa participation. Difficile de faire avancer un dossier quand les deux principaux protagonistes sont absents des discussions. Volodymyr Zelensky s’était toujours opposé à des discussions avec Moscou, demandant au préalable que la Russie retire ses troupes d’Ukraine et que les combats cessent. Une position sur laquelle il est revenu face à l’échec de la contre-offensive ukrainienne et à la stabilisation du front.
Tout a changé cette semaine. Le président ukrainien a opéré un revirement complet en se disant désormais favorable à la tenue d’un sommet sur la paix avec la présence de la Russie. Il a même défini un calendrier, espérant qu’un plan de rencontre puisse être organisé d’ici novembre. Il s’agit d’un programme à long terme tant il peut se passer encore beaucoup de choses dans les quatre mois qui viennent, mais c’est un changement de cap notable par rapport aux trois dernières années.
Moscou s’est montré assez réservé sur les propos du président Zelensky. Pour la Russie, il ne peut y avoir de paix tant que les territoires du Donbass et de la Crimée occupés par ses troupes ne sont pas officiellement reconnus comme russes par l’Ukraine.
Le président ukrainien a proposé un plan en trois points : la sécurité énergétique de l'Ukraine, qui pose le sujet de la reconstruction des infrastructures détruites par la guerre, la libre navigation en mer Noire, notamment pour l’exportation des blés ukrainiens et les échanges de prisonniers. Trois points techniques, mais Volodymyr Zelensky n’a évoqué ni l’arrêt des combats ni le retrait des troupes russes. C’est une inflexion majeure au regard du discours tenu depuis mars 2022, inflexion qui tient compte du fait que, sur le terrain militaire, si l’armée ukrainienne résiste, elle n’est pas en mesure aujourd'hui de repousser les Russes. Or pour le président ukrainien, il y a urgence à trouver des solutions à une situation bloquée. D’une part parce que la population européenne se lasse de la guerre et que l’actualité se tourne désormais vers Washington et les élections américaines, d’autre part parce que les forces ukrainiennes manquent de soldats, ce qui à terme risque de provoquer une rupture du front.
Moscou s’est montré assez réservé sur les propos du président Zelensky. Pour la Russie, il ne peut y avoir de paix tant que les territoires du Donbass et de la Crimée occupés par ses troupes ne sont pas officiellement reconnus comme russes par l’Ukraine. Ce qui en fait de paix serait surtout une reddition et une acceptation par l’Ukraine de la perte de ses territoires. D’ailleurs, l’appel au cessez-le feu du Premier ministre hongrois Viktor Orban, qui dirige la présidence tournante de l’Europe et s’est rendu à Moscou et à Kiev début juillet, a été rejeté par l’Ukraine. Pour elle, demander un cessez-le-feu serait se reconnaître vaincue.
Une diplomatie vaticane toujours active
Quant à la diplomatie du Saint-Siège, elle est toujours active pour proposer des solutions de sortie de guerre et de paix durable. Dans un entretien paru dans la revue America, Paul-Richard Gallagher, secrétaire pour les relations avec les États, a renouvelé la position du Saint-Siège. Pour lui, c’est la Russie qui "ne pose pas les conditions nécessaires" pour mettre un terme à la guerre : "Arrêter les attaques, arrêter les missiles. Voilà ce que la Russie doit faire !" Une paix juste signifie que la Russie doit se retirer de tous les territoires occupés : "Nous continuons à défendre l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Nous n’approuvons pas que les frontières des pays soient modifiées par la force."
Une position tenue par la diplomatie vaticane dès le début de l’invasion russe et qui n’a pas varié depuis lors, même si le pape a envoyé le cardinal Zuppi rencontrer les principaux acteurs pour élaborer quelques propositions. Reste à voir si le Vatican pourrait jouer un rôle direct dans cette future conférence pour la paix, ce qui n’avait pas été le cas pour celle de juin. Au niveau diplomatique, les lignes bougent mais sur le front la guerre se poursuit.