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À Albi, Christian dépoussière l’art sacré !

La boutique Jésus, Marie &Cie vend toutes sortes d'objets sacrés originaux, comme des Vierges couleur fluo.

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Domitille Farret d'Astiès - publié le 16/06/24
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Patron d’une boutique d’art sacré à Albi (Tarn) depuis décembre 2023, Christian Rivière cherche à dépoussiérer l’image des objets de dévotion et, au-delà, à faire passer un message essentiel à ses visiteurs.

Vierge de Lourdes bleu fluo, saint Michel archange façon Minecraft, mug Immaculée conception rose guimauve… On en voit de toutes les couleurs dans la boutique de Christian Rivière ! En décembre 2023, cet Albigeois de 52 ans a ouvert la boutique Jésus, Marie & Cie au cœur du quartier historique d’Albi (Tarn). Son objectif ? Proposer des objets de dévotion au design décomplexé pour rendre la foi accessible à tous. 

L’histoire et le métier de Christian Rivière sont intimement liés à sa ville natale. Baptisé en la collégiale Saint-Salvy, que jouxte à présent sa boutique, c’est un pur produit albigeois. Issu d’une famille de commerçants, il s’amuse en riant d’être "né entre deux steaks frites" car quand sa mère a senti ses premières contractions, elle était en train de servir… un steak frites. Aujourd’hui, à son tour d’être derrière le comptoir, non point pour des croque-monsieur ou des pintes de blonde, mais pour des bondieuseries, comme le vante en toutes lettres son enseigne.

Christian Rivière a ouvert sa boutique en décembre 2023, après 30 ans passés dans le tourisme.

Le fruit d'un long chemin

L’ouverture de son magasin est le fruit d’un long chemin, lui qui a roulé sa bosse avec passion pendant trente ans dans le développement du tourisme pour sa région. "Je travaillais à trois cents pour cent, je voyageais dans le monde entier, mais je n’avais pas le temps de vivre pour moi. Mon corps m’a stoppé de façon très brutale", raconte-t-il. Deux tumeurs cancéreuses opérées d’urgence, un burn out et une série d’infarctus ont raison de cette vie à mille à l’heure. "Il y avait de nombreux enjeux économiques à la clef, on me mettait beaucoup de pression et j’ai attendu trop longtemps pour dire stop". Le choc est violent : il arrête de travailler, suit un traitement pour son cancer, multiplie les opérations du cœur et se remet peu à peu sur pied.

La boutique se trouve en plein coeur du quartier historique d'Albi

Vient alors le temps de reprendre du service. "Après deux années d’arrêt, il fallait que je me remette à travailler. J’avais 50 ans et je me suis demandé : “Qu’est-ce que je sais faire ?". Sept ans auparavant, il s’était mis à la disposition des franciscains du prieuré d’Ambialet, dans la vallée du Tarn, en tant que sacristain de l’église. Créé il y a plus de mille ans, ce lieu appartient aux franciscains du Tiers-ordre régulier. Durant sa convalescence, Christian Rivière se rend encore plus disponible, nettoyant l’église, s’occupant des fleurs, préparant les offices et les linges liturgiques…L’entourage des religieux lui apporte alors un grand réconfort.

Les pères franciscains m’ont beaucoup soutenu et écouté, avec une patience et une gentillesse qui m’ont fait du bien, moi qui étais un peu perdu. Quand s’est posée la question d’un nouveau travail, je me suis dit que Dieu était très important dans ma vie et que je voulais continuer à le servir tout en gagnant ma vie. J’aime beaucoup la foi des premiers chrétiens : tous les acteurs de l’Église travaillaient quotidiennement, ils avaient un métier et étaient insérés dans la vie de tous les jours. Cette connexion et cette proximité me semblent importantes.

Toucher les coeurs

Lui vient alors l’idée de monter un commerce autour de l’artisanat religieux. L’as du tourisme décide donc de se spécialiser dans le sujet, mais à sa manière. "J’ai voulu lui donner une couleur très actuelle, très contemporaine. C’est un moyen de toucher ceux qui ne vont plus à l’église ou qui n’y sont jamais entrés". Son objectif n’est pas simplement de tester l’endurance rétinienne de ses clients mais bien de toucher leurs cœurs.

"Je fais attention à ce que les objets proposés soient beaux. Je suis très attentif aux matériaux utilisés et à la provenance des matières premières et je travaille au maximum avec des artisans français et monastiques. 98% des objets de ma boutique sont issus de l’artisanat. Ici, ce n’est pas du travail robotisé : on sent l’humain".

De nombreux objets sont des productions monastiques.

Ses vierges de Lourdes proviennent de Sapristi store et sont fabriquées à Lourdes par une entreprise locale. D’autres produits sont confectionnés au monastère Sainte Scholastique à Dourgne (Tarn), à l’abbaye de la Coudre (Mayenne) ou encore à Sept-Fons (Allier). Pour ses créations contemporaines et bigarrées, il fait appel à des artistes et artisans locaux qu’il amène à la création religieuse. Il est ainsi en lien avec Tépè, un illustrateur albigeois auquel il a commandé des statues d’archanges, de Jésus, Marie ou encore saint Salvi dans le style de Minecraft. Le commerçant, qui assure lui aussi certaines créations, joue avec les codes et les couleurs, farfouille du côté de l’intelligence artificielle, agrémente, colorise, transforme… Il a ainsi repris les gravures d’un missel datant de 1898 pour les intégrer à un mug. Ou encore intégré des détails des fresques de la cathédrale Sainte-Cécile d’Albi sur un coussin. « Cela plaît beaucoup, aussi bien aux chrétiens affirmés qu’aux autres car cela permet d’avoir un objet de dévotion à la vue de tous qui soit en même temps décoratif. Certains parmi eux ne seraient pas entrés dans une boutique traditionnelle".

Pour Christian Rivière, qui est en chemin pour devenir tertiaire dans l’ordre des franciscains séculiers, ce travail rime avec mission. "Je me considère comme étant le serviteur. D’ailleurs, certaines personnes m’appellent frère Christian", s’amuse-t-il. "Au prieuré d’Ambialet, le dialogue s’installe facilement avec les touristes qui viennent déposer leurs soucis et leurs angoisses". Sa boutique lui permet de poursuivre cette mission à travers l’accueil et les interactions qui surgissent naturellement. "Je touche beaucoup de jeunes entre 15 et 25 ans. Ils entrent et posent des questions : comment prier ? Comment faire pour devenir chrétien ? Ils ne fréquentent pas du tout l’Église, certains ne sont pas baptisés, et c’est ce côté décomplexé et décomplexant qui leur plaît. Ici, je me sens épanoui et utile". Il n’hésite pas à l’occasion à appeler au secours des amis prêtres qui viennent donner une bénédiction ou répondre à une question. "Quel que soit l’âge des personnes, elles ont besoin d’être rassurées et de s’entendre dire : "Dieu t’aime". Ce message, cent pour cent des gens ont besoin de l’entendre".

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