Après quatre jours d'examen sur le projet de loi sur la fin de vie, les députés poursuivent les débats sur les conditions d’accès à “l’aide à mourir”. Mercredi 6 juin, ils ont adopté en première lecture l’article 5 du projet de loi qui consacre le suicide assisté et l’euthanasie. La tension est montée sur les bancs quelques heures plus tard, quand les élus ont entamé les discussions sur l’article 6 qui traite des critères cumulatifs d’accès à un programme d'aide à mourir.
Tel qu'amendé par la commission spéciale, le projet de loi prévoit que le patient qui formule une demande d'euthanasie ou de suicide assisté doit remplir cinq conditions. Il doit être majeur; être de nationalité française ou résider de façon stable et régulière en France. Il devra également être "atteint d’une affection grave et incurable engageant son pronostic vital à court ou moyen terme", présenter "une souffrance physique ou psychologique liée à cette affection qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable lorsque la personne ne reçoit pas ou a choisi d’arrêter de recevoir des traitements". Enfin, il doit pouvoir être en capacité d'exprimer sa volonté de façon "libre et éclairée". Après avoir longuement débattu sur la question du pronostic vital, les députés ont finalement rejeté ce vendredi 7 juin les termes de "court et moyen terme" proposé par le gouvernement, jugés impossibles à évaluer en pratique.
L'aide à mourir prévue par des directives anticipées ?
La discussion sur l'article 6 s'est poursuivie dans l'après-midi sur la très délicate question de l'euthanasie et du suicide assisté pour les personnes inconscientes, non prévue dans le texte initial. Plusieurs amendements, dont celui du socialiste Stéphane Delautrette, prévoient ainsi la possibilité d'intégrer l'aide à mourir dans ses directives anticipées par le patient. Il pourrait donc prévoir, plusieurs années à l'avance, de demander à mourir dans les situations qu'il aura établies.
La perspective de permettre l'accès pour des personnes incapables d'exprimer leur volonté a suscité la réserve, sinon la vive opposition, de députés de tous bancs. "On se heurte à des limites", avertit Philippe Juvin (LR). "La demande de mort est fluctuante". "Il faut prendre en compte les capacités de résilience et d'adaptation, la volonté de vivre qui peut être plus forte que tout", ajoute Emmanuelle Ménard (Non inscrite). L'écologiste Sébastien Peytavie rappelle quant à lui que de nombreux malades, se décident au début de leur maladie à demander la mort à un certain stade de leur affection, avant de finir par changer d'avis ultérieurement. "Ensuite quand on écrit ses directives anticipées, on ne sait pas dans quelles conditions elles ont été écrites, il n'y a pas d’huissier", estime encore Philippe Juvin. D'autres députés espèrent pouvoir consacrer une "exception de directives anticipées" qui garantirait à certains patients de pouvoir recourir à l'euthanasie même s'ils sont inconscients. La plupart des amendements sur les directives anticipées ont néanmoins été rejetés. Mais plusieurs députés, ainsi que le rapporteur du projet de loi, Laurence Maillard-Méhaignerie, ont d'ores et déjà annoncé vouloir retravailler la question au cours de la navette parlementaire.
À ce stade, les députés poursuivent les débats sur l'article 6 du projet de loi sur la fin de vie. Il leur reste encore 15 articles sur 21 à examiner, avant le vote solennel qui se tiendra le 18 juin.