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La prière d’abandon de Charles de Foucauld, prière de “tous les instants”

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Aliénor Strentz - publié le 14/05/24
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Ce 15 mai marque le deuxième anniversaire de la canonisation de Charles de Foucauld, ce « petit frère universel » qui s’est sanctifié par une démarche d’abandon au Père. Il invite à adopter à tout instant la prière d’abandon, la toute dernière prière que nous ait donnée Jésus sur la Croix.

1896. Une année avant le départ au Ciel de Thérèse de Lisieux, un autre religieux français découvre lui aussi avec émerveillement la voie de la confiance… et de l’abandon. Frère Marie Albéric (alias Charles de Foucauld) doit prononcer prochainement ses vœux perpétuels chez les Trappistes, mais il doute de sa vocation dans cet Ordre. Il se penche alors sur la prière d'abandon de Jésus sur la Croix. Celle-ci nous est rapportée par l’évangéliste Luc (Lc, 23-46) : « Jésus s'écria d'une voix forte : Père, je remets mon esprit entre tes mains. Et, en disant ces paroles, il expira ».

Charles de Foucauld est bouleversé par cette découverte. Il note dans son manuscrit cette réflexion : « C'est la dernière prière de notre Maître ; de notre Bien-Aimé... Puisse-t-elle être la nôtre... Et qu'elle soit non seulement celle de notre dernier instant, mais celle de tous les instants ».

Quelques mois plus tard, il quitte les Trappistes, commence l’étude de la théologie jusqu’à son ordination sacerdotale en 1901. La même année, il part pour l’Algérie où il devient ermite, « petit frère universel » selon ses termes auprès de ses frères musulmans, et au final martyr. Entre temps, il s’est laissé façonner par Dieu grâce à une démarche quotidienne d’abandon entre les mains de Celui qui veut notre bonheur et « de qui vient tout réconfort » (2 Co 1 : 3). Comment cet homme au passé tumultueux et ayant fait l’expérience tragique d’être orphelin à l’âge de six ans s’est-il laissé sanctifier par cette démarche d’abandon au Père ? Pourquoi ce maître spirituel invite à adopter à tout instant la prière d’abandon ?

Une prière à Dieu le Père 

Nous avons souvent de la difficulté à appeler Dieu notre Père. Cela peut être lié à nos relations avec notre père charnel, chargées de blessures psychologiques. Toutefois, Jésus demande de prier le "Notre Père". En la disant, c'est sa prière qui jaillit de notre bouche, c'est Lui qui prie en nous. Il nous apprend que nous ne pouvons pas nous abandonner avec confiance à Dieu si nous n'avons pas découvert ce que signifie la "paternité" de Dieu. Cette découverte se demande avec foi à l'Esprit Saint.

Saint Paul nous apprend en effet que : « Vous n’avez pas reçu un esprit qui fait de vous des esclaves et vous ramène à la peur ; mais vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; et c’est en lui que nous crions “Abba !”, c’est-à-dire : Père ! C’est donc l’Esprit Saint lui-même qui atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. (Rm 8, 15). »

La prière d’abandon à Dieu, telle que Jésus nous l’a donnée sur la Croix, ramène à l’essentiel : s’adresser à Dieu comme à un Père, et tout remettre « entre ses mains ». Il ne s’agit pas seulement de Lui remettre notre esprit à l’heure de la mort, mais de lui offrir tout notre quotidien. Ainsi, nous pourrions dire : « Père, entre tes mains, je remets mes joies et mes peines, mon travail de ce jour et mes inquiétudes, mon impuissance devant le mal et la souffrance, mais aussi mon espérance que tu peux changer le mal en bien. Fais de moi ce qu’il te plaira ».

Une prière courageuse dans l’épreuve

Jésus nous a donné cette prière ultime d’abandon au Père, alors même qu’il est crucifié et que les ténèbres ont envahi le pays (Mc 15 : 33). Il vient de traverser la nuit de l’abandon et de la foi au nom de toute l’humanité, en s’écriant : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27 : 46). Mais en notre nom également, il est passé de cet abandon subi à l’abandon offert : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit ». Il semble dédier plus particulièrement cette prière à ceux qui traverseront de lourdes épreuves, et notamment comme lui, la violence, le sentiment d’abandon, de désarroi et de solitude absolue.

On peut penser par exemple à des femmes comme sainte Gianna Beretta Molla, Chiara Corbella ou récemment à Azzurra Carnelos, qui, atteintes d’un cancer alors qu’elles étaient enceintes, ont donné la primauté à la vie de leur enfant à naître, en s'abandonnant totalement à Dieu. En dépit des critiques et incompréhensions autour d'elles, elles ont cru, au prix de leur vie, que Dieu est capable de transformer le mal en bien, en fécondité. Toutes trois ont effectivement donné naissance à des enfants en parfaite santé. Elles ont aussi, chacune à leur manière, témoigné de la joie qui a accompagné cette démarche ultime d’abandon à Dieu et à sa Providence.

La prière des « mains vides » 

La démarche d’abandon total à Dieu s’accomplit d’autant plus facilement que nous sommes dans une situation de pauvreté ou de désarroi. Dans l’Evangile de Jean (Jn 6 : 9-13), l’évangéliste nous rapporte l’extraordinaire multiplication des pains et des poissons par Jésus. Mais celle-ci n’aurait peut-être pas eu lieu sans l’offrande par un petit garçon de « cinq pains d’orge et deux poissons ». Celui-ci a offert sa pauvreté, à la différence des disciples qui calculaient et désespéraient, et cette pauvreté a été « fécondée » par Dieu.

Charles de Foucauld a lui aussi appris à connaître sa fragilité, sa pauvreté. En 1901, après son ordination sacerdotale, il rêve d'annoncer l'Evangile aux pauvres du Sahara. Or, voilà qu'au début de l'année 1908, il connaît l'expérience de la solitude, de l'abandon, de la maladie qui risque de le conduire à la mort. C'est en même temps un échec certain au niveau de la mission : il n'a converti personne. Il n'a aucun disciple. Comme le souligne Mgr Jean-Claude Boulanger, auteur de l’ouvrage La prière d’abandon : un chemin de confiance avec Charles de Foucauld (Artège, 2020) : « Lui qui était venu pour donner va enfin apprendre à recevoir. Il va enfin se réconcilier avec sa fragilité. Il voulait être frère des petits, le voilà devenu petit frère. Il voulait aider les pauvres, le voilà devenu pauvre. Il a touché du doigt sa faiblesse, sa petitesse. »

Récemment, l’acteur américain Jonathan Roumie a aussi témoigné de la force et de la fécondité de la prière des « mains vides ». Sur les réseaux sociaux, il raconte les prémices de l’aventure de « The Chosen » (Les élus). Dans une situation de misère, avec vingt euros en poche et des dettes non honorées, il a prié intensément en remettant toute sa vie dans les mains de Dieu. Après cette prière ardente d’abandon, l’acteur raconte qu’il a dépensé ses vingt euros dans un café en dégustant un bon petit déjeuner et un capuccino. Revenu chez lui, il trouve dans sa boîte à lettres la proposition de jouer le rôle de Jésus dans "The Chosen", dont on connaît désormais le succès planétaire... Dans une situation désespérée mais avec une confiance totale dans la bonté du Père, ses « mains vides » ont pu être remplies abondamment par Dieu lui-même.

Outre Charles de Foucauld, de nombreux mystiques et fondateurs d’ordres religieux ont expérimenté la fécondité de la prière d’abandon. Si nous voulons, nous aussi, célébrer les bienfaits de Dieu, nous pouvons, à la suite de saint Charles de Foucauld, reprendre sa prière d’abandon :

Mon Père,
Je m'abandonne à toi,
Fais de moi ce qu'il te plaira.
Quoi que tu fasses de moi,
Je te remercie.
Je suis prêt à tout, j'accepte tout.
Pourvu que ta volonté se fasse en moi,
En toutes tes créatures.
Je ne désire rien d'autre, mon Dieu.
Je remets mon âme entre tes mains.
Je te la donne, mon Dieu,
Avec tout l'amour de mon cœur,
Parce que je t'aime,
Et que ce m'est un besoin d'amour
De me donner, de me remettre
Entre tes mains sans mesure,
Avec une infinie confiance,
Car tu es mon Père.

Aliénor Strentz est fondatrice du blog « Chrétiens heureux » et Missionnaire de l’Immaculée Père Kolbe. Elle est aussi docteur en ethnomusicologie et formatrice pour adultes. 

Les dix plus belles citations de Charles de Foucauld :

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