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Pourquoi “l’invention” de la sainte Croix était fêtée le 3 mai ?

Sainte Hélène de Constantinople.

Sainte Hélène de Constantinople, 1495, Giovanni Battista Cima da Conegliano (1459–1517).

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Anne Bernet - publié le 02/05/24
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Quelle est l’origine de la fête disparue du 3 mai, où l’Église fêtait l’invention de la Sainte Croix ?

En 1960, le pape Jean XXIII retire du calendrier la fête de l’invention de la sainte Croix, célébrée depuis la plus haute Antiquité pour commémorer la restitution de l’inestimable relique, disparue après la prise de Jérusalem par les Perses, à l’empereur byzantin Héraclius. Il s’agissait de fusionner cette fête avec celle de l’exaltation de la sainte Croix, le 14 septembre, liée à la dédicace de la basilique du Saint-Sépulcre. 

Il faut d’abord s’entendre sur ce mot, invention, qui peut prêter à confusion et signifie en réalité "découverte", point culminant de la campagne de fouilles archéologiques voulues par l’impératrice sainte Hélène lors de son séjour en Terre Sainte en 326 afin d’y retrouver la trace des lieux saints et de toutes les reliques liées au Christ. 

Une démarche pénitentielle urgente

Cette entreprise et ce pèlerinage constituent, dans l’esprit de l’Augusta (l’impératrice), une démarche pénitentielle urgente. En effet, le règne de son fils Constantin, depuis qu’il s’est emparé pour lui seul de la pourpre, après la défaite de Maxence au Pont Milvius près de Rome en octobre 312, a été marqué d’une série de crimes politiques certes nécessaires mais plus ou moins justifiables. Hélène a laissé faire, car, si depuis la vision de la Croix apparue au-dessus des légions de Constantin à la veille de l’affrontement décisif accompagnée de ces mots inscrits dans le Ciel : In hoc signo vinces ! "Par ce signe tu vaincras", son fils a saisi l’intérêt de faire alliance avec le Dieu de sa mère, il n’a pas pour autant demandé le baptême et ne le demandera que sur son lit de mort, en 337. 

Tout comme pour le Suaire et les autres linges, il a fallu aux disciples de Jésus une bien forte certitude de la sacralité de ces objets pour surmonter l’horreur qu’ils devaient éprouver à leur vue, les récupérer et les mettre à l’abri pendant près de trois siècles.

Tant que Constantin n’est pas chrétien, il reste libre de multiplier fautes et péchés que le sacrement, reçu tardivement, lavera d’un coup. Hélas, quelques mois plus tôt, Hélène, chrétienne, elle, donc sans excuses, a prêté la main à l’une de ces affaires et la plus sordide : elle a révélé à Constantin les mensonges de sa seconde épouse, Fausta, qui, afin de garder la pourpre pour ses enfants, a accusé à tort le fils du premier lit et héritier légitime de l’empire, Crispus, de lui avoir fait des propositions et préparé le meurtre de son père. Aveuglé par la fureur, sans même entendre son aîné, Constantin a fait exécuter Crispus. Hélène, qui a élevé l’enfant et l’adorait, s’est juré de le venger en perdant la calomniatrice. Ses révélations ont porté : Fausta a été victime d’un fâcheux "accident", en glissant dans sa salle de bains… C’est l’assassinat de sa bru qu’elle expie en se rendant en Palestine en quête de reliques si sacrées que leur possession la gardera de la damnation en même temps qu’elle assurera à Rome le triomphe sur ses ennemis.

Où est la Croix du Christ ?

La tâche n’est pas aisée car, au début du IIe siècle, l’empereur Hadrien a fait détruire tous les lieux de pèlerinage chrétiens ou les a fait profaner, installant un temple d’Adonis dans la grotte de Bethléem et un sanctuaire de Vénus sur le tombeau du Christ. Toutefois la Tradition a conservé le souvenir de leur emplacement dans l’attente du jour où la vraie foi pourra paraître au grand jour.

Macaire a l’idée d’éprouver leurs vertus en les déposant sur le cadavre d’une jeune femme que l’on va enterrer. Le troisième essai est concluant : la morte ressuscite.

Ces souvenirs s’avérant exacts, il ne faut pas très longtemps pour retrouver, en effet, les vestiges témoins de la Nativité et de la Résurrection. Mais Hélène veut la Croix donnée pour emblème à son fils par l’archange Michel la veille de sa victoire. Sait-on ce qu’elle est devenue ? En général, les soldats romains se débarrassaient des bois de justice en les jetant, avec les cadavres des suppliciés, dans un ravin proche du Golgotha. Stipes et patibula, pieds et la barres transversales, imprégnés de sang, étaient impurs pour les Juifs qui n’y auraient touché sous aucun prétexte. Tout comme pour le Suaire et les autres linges, il a fallu aux disciples de Jésus une bien forte certitude de la sacralité de ces objets pour surmonter l’horreur qu’ils devaient éprouver à leur vue, les récupérer et les mettre à l’abri pendant près de trois siècles. Or, toujours selon la Tradition, les disciples ont bel et bien mis en sûreté l’arbre du Salut. Il convient donc de le retrouver. 

Ce 3 mai 326

Assistée de l’évêque Macaire de Jérusalem, Hélène fait chercher, et chercher encore, jusqu’à ce 3 mai 326 où l’on tombe sur non pas une mais trois croix enfouies à l’abri non loin du Tombeau : celle de Jésus, et celles des deux larrons… Comment identifier la vraie ? Macaire a l’idée d’éprouver leurs vertus en les déposant sur le cadavre d’une jeune femme que l’on va enterrer. Le troisième essai est concluant : la morte ressuscite. Le bois sacré sera alors partagé entre Jérusalem, Constantinople et Rome où Hélène fera bâtir en son honneur la basilique Sainte-Croix de Jérusalem. Tous les fragments vénérés à travers la chrétienté proviennent de ces sanctuaires.

Telle est l’origine de cette fête disparue du 3 mai, jadis associée au culte de sainte Hélène dont le prénom était donné aux fillettes nées ce jour-là. Sans doute était-elle trop ostentatoire pour le monde moderne mais, comme l’affirme la devise des Chartreux : Dum volvitur orbis, stat Crux. "Tandis que le monde passe, la Croix demeure."

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