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L’énigmatique Brieuc, l’évangélisateur de la Bretagne

xavier de langlais

Saint Brieuc par Xavier de Langlais, cloître de l'évêché de Saint-Brieuc (Côtes d'Armor).

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Anne Bernet - publié le 30/04/24
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Beaucoup de mystères entourent la naissance de Brieuc, l’évangélisateur du Pays de Galles et de l’Armorique, mais la sainteté missionnaire de ce disciple infatigable de Germain d’Auxerre ne fait aucun doute. L’Église le fête localement le 1er mai.

Parmi les Sept Saints Fondateurs des évêchés de Bretagne, Brieuc, qui a laissé son nom à la ville sur laquelle il a exercé son autorité épiscopale, est celui dont la vie, telle qu’elle nous est parvenue, dans sa sobriété, est la plus facile à recevoir, et dont la biographie présente le plus d’écueils, en raison des doutes subsistant sur sa date de naissance. En effet, tout change selon qu’il est né vers 410, hypothèse la plus plausible et qui s’accorde le mieux avec les événements relatés, ou un siècle plus tard… Au vrai, nul historien n’a tranché cette question épineuse.

Un Gallois fort vertueux

Le lieu de sa naissance est mieux assuré : un village de la province de Valentia, en Grande-Bretagne romaine, dans l’actuel Pays de Galles, près de la ville de Cardigan. Bien que la région ait été évangélisée au moins cent ans plus tôt et possède quelques martyrs, sa conversion au christianisme est loin d’être achevée et la majorité des habitants demeure païenne. Rien d’étonnant, donc, si les parents du petit Brigomaglos, que le breton transformera en Brieg, et le français en Brieuc, adorent encore les anciens dieux. La pratique, d’ailleurs, est de plus en plus mal vue et, même si Rome peine à se maintenir sur l’île dont elle retirera bientôt ses légions pour renforcer la sécurité en Italie, les gens intelligents ont compris que, pour faire carrière, mieux vaut devenir chrétien. 

Eldruda, la mère de Brieuc, en est si convaincue qu’elle persuade son époux de laisser baptiser leur fils, puis de le confier à l’évêque Germain d’Auxerre, venu en 429, visiter la Grande Bretagne afin d’organiser militairement la lutte contre les incursions anglo-saxonnes et irlandaises, en même temps que condamner la doctrine déviante du moine Pélage, natif de l’île. Germain, ancien haut fonctionnaire impérial qui garde ses entrées à la cour de Ravenne, tout évêque qu’il soit devenu, demeure une personnalité politique de premier plan et cela, Eldruda, qui a de l’ambition pour son fils, le sait. Si Germain n’a sans doute guère d’illusions sur les arrière-pensées de la bonne dame, il est vite rassuré en constatant que l’enfant, lui, pieux et fort vertueux, mérite qu’il s’en occupe. Il le fera donc élever dans son presbyterium et le préparera au sacerdoce qu’il lui confère dans les années 430. 

Une tempête épouvantable

Preuve que Brieuc n’a rien d’un ambitieux, à peine revêtu des ordres sacrés, il demande à rentrer en Bretagne, où la situation est de plus en plus difficile et chaotique, pour convertir son peuple et ses parents. Le retour du fils prodigue s’accompagne de tant de miracles et guérisons que même les plus récalcitrants doivent se rendre à l’évidence : le Dieu qui permet à Brieuc de guérir un artisan maladroit qui s’est tranché le pouce ou un enragé qui manifeste déjà les premiers symptômes de ce mal incurable est puissant. Pendant une quinzaine d’années, Brieuc parfait son œuvre galloise, fonde des monastères, prêche et baptise. Il enracine assez le catholicisme dans la région pour que celle-ci devienne, dans quelques décennies, l’un des derniers bastions chrétiens de l’île envahie par les Angles et Saxons. 

Une nuit, Brieuc fait un rêve lui enjoignant de repasser la mer et revenir en Gaule afin d’y porter la parole du Christ en Armorique, province qui, ayant secoué le joug romain, est demeurée fermée aux missionnaires de langue latine assimilés à des collaborateurs de l’occupant. L’évangile passera mieux enseigné par un autre Celte. Brieuc, accompagné de quelques moines, s’embarque donc vers la future petite Bretagne, et n’y parvient pas sans peine car le diable, furieux, fait lever une tempête épouvantable qui manque engloutir son navire mais qu’il apaise d’un signe de croix. Enfin, il touche terre dans les parages de l’Aber Wrac’h où le comte Riwall lui fait bon accueil et lui permet de fonder un monastère. L’évangélisation allant bon train, Brieuc, après un bref retour au Pays de Galles où il a été rappelé pour mettre miraculeusement un terme à une épidémie, revient en Armorique mais s’installe, cette fois, plus au nord-est, sur les domaines du comte Conan qui, à son tour, l’aide à fonder un monastère, là où s’élèvera un jour Saint-Brieuc.

Grand dévot de Notre Dame

Investi des pouvoirs épiscopaux, Brieuc reprend sa tâche d’évangélisateur, marquée de quelques prodiges. Un soir, rentrant de prêcher, il est surpris par une horde de loups affamés qui cherchent à dévorer les bœufs de son attelage et, tandis que ses compagnons, affolés, s’enfuient, lui calme les loups qui l’écoutent toute la nuit leur parler du Christ sans plus penser à mal. Grand dévot de Notre Dame, il lui consacre plusieurs sanctuaires, dont celui de Notre-Dame de la Fontaine. Sa tâche achevée, Brieuc s’éteint dans sa cité, le 1er mai 502, plus que nonagénaire.

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