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Ce rapport parlementaire qui inquiète l’enseignement catholique

LEs députés Paul Vannier (LFI) et Christopher Weissberg (Renaissance) conduisent la Mission d'information sur le financement public de l'enseignement privé sous contrat, dont le rapport devrait être publié dans quelques jours.

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Anne-Sophie Retailleau - publié le 01/04/24
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Critiqué de toutes parts depuis plusieurs mois, l’enseignement privé sous contrat fait l’objet d’un rapport parlementaire qui doit être publié ce mardi 2 avril. Les acteurs de l’école privée catholique craignent les conclusions d’un travail mené à charge.

"Ce n’est pas qu’un sujet de catholiques". À l’heure où l’enseignement privé sous contrat est sous le feu des critiques, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France (CEF), a consacré au sujet une partie de son discours de clôture de l’assemblée plénière de la CEF le 22 mars, à Lourdes. L’archevêque de Reims a rappelé l’importance de l’enseignement catholique sous contrat, prévu par la loi Debré de 1959. "La République manifestait ainsi qu’elle promouvait la liberté des citoyens et encourageait leurs initiatives, notamment pour mettre en œuvre la liberté d’enseignement et la liberté de choix des familles", rappelle-t-il. Mais depuis ces derniers mois, l'enseignement catholique sous contrat s'est trouvé ébranlé par une succession de polémiques.

D’un rapport de la Cour des comptes en 2022 sur le contrôle des fonds publics des écoles privées, à la publication des classements des lycées et collèges par l’Éducation nationale le 20 mars dernier, en passant par la récente polémique du lycée Stanislas… Les occasions de donner du crédit aux accusations d’opacité, de mauvaise gestion, d’élitisme, ou encore de discrimination n'ont pas manqué. Au point que certains craignent que cette spirale aboutisse à une franche remise en cause du modèle scolaire issu de la loi Debré de 1959.

Depuis septembre 2023, une mission d’information sur le financement public de l’enseignement privé sous contrat est menée par deux députés à l’Assemblée nationale. L’un deux, Paul Vannier (LFI) s’est déjà félicité dans Mediapart de "la fin d’une omerta politique qui aura duré près de quarante ans." Un terme que ne partage pas Chrisopher Weissberg (Renaissance), qui a co-écrit ce rapport à paraître le 2 avril : "J'ai demandé à ce que cette formulation soit retirée de ma version du rapport, assure-t-il auprès d'Aleteia. Je ne crois pas qu'elle soit adaptée. Cela signifierait qu'il y aurait un système de détournement permanent cautionné par l’État et je pense que ce n’est pas le cas."

S'il réfute le terme d'omerta prononcé par son collègue, le député de la majorité assure que le travail de la mission d'information a dégagé un constat clair : les établissements privés sous contrat ne sont pas assez contrôlés. "Lorsque l'on a un tel niveau de financement public, soit près de 80% des ressources des établissements sous contrat si l'on ajoute les financement indirects, il n'y a, en rapport, pas assez de contrôle sur la manière dont les acteurs exercent ce service public, estime Christopher Weissberg. L'objectif de ce rapport est donc en partie, selon lui, de renforcer le contrôle des dispositifs de financement.

Du côté de l’Enseignement catholique, on s’est déjà dit prêt et disposé à faciliter les contrôles, en particulier sur le plan financier. "Il est légitime et souhaitable que la régularité de l’usage de cet argent soit vérifiée, comme pour toute autre réalité," avait assuré Mgr Éric de Moulins-Beaufort dans son discours du 22 mars. "Comme évêques, nous l’acceptons volontiers." Un mois plus tôt, c’est Philippe Delorme, le secrétaire général de l’Enseignement catholique, qui s’était exprimé dans Le Monde et Ouest-France pour défendre l’enseignement privé sous contrat. "Je rêve que les 7.500 établissements catholiques soient contrôlés budgétairement", avait-il affirmé. "Chiche ! répond Christopher Weissberg. Nos propositions visent justement à renforcer ces contrôles, non seulement budgétaires, mais aussi pédagogiques et administratifs."

Car les craintes se portent moins sur l'existence d'éventuels détournements de fonds, "assez rares", que sur une trop large interprétation par les établissements des libertés accordées. "Quand on est dans une mission de service public, on se doit aussi d’être sûr que l’État parvient à contrôler l’ensemble des acteurs qui ont pour mission de réaliser ses objectifs", relève Christopher Weissberg, qui cite les exemples des politiques publiques sur la vaccination, ou encore de lutte contre le harcèlement scolaire.

Défendre le "caractère propre" de l'enseignement privé

Depuis l'emballement des polémiques, Philippe Delorme, comme la CEF, redoutent des attaques d’ordre idéologique. "Régulièrement, depuis la loi Debré de 1959, l’enseignement catholique est attaqué, expliquait le secrétaire général de l’enseignement catholique dans Ouest-France. Certains n’acceptent pas notre existence, tout simplement". D'aucuns s'attendent donc à voir tomber la publication du rapport parlementaire comme une nouvelle sentence. "Dans la partie collective du rapport, il n’y a absolument pas de remise en cause de la loi Debré, assure pourtant Christopher Weissberg. Au contraire, nous voulons respecter et renforcer le cadre établi il y a 70 ans, qui n’est pas parfait mais qui a le mérite de faire fonctionner le système et de l’adapter aux enjeux actuels."

C'est sur la question du "caractère propre" des établissements privés sous-contrat que se situe l'enjeu pour l'Église et le Secrétariat général de l'enseignement catholique. "On ne remet pas en question le fait que ces établissements puissent avoir des signes religieux et promeuvent certaines valeurs, explique le député. Mais ils doivent respecter le programme de l’Éducation nationale et n’ont pas la possibilité de faire du prosélytisme pendant les heures de cours." Le parlementaire reconnaît à cet égard que "fondamentalement, à part certains cas, on a vu que les établissements respectent la loi Debré." De quoi tordre le cou aux a priori largement relayés dans les médias sur un enseignement catholique perçu comme forcément liberticide quand il n'est pas caricaturé comme trop conservateur.

Souvent "mal compris" pour Philippe Delorme, le caractère propre vaut néanmoins la peine d'être défendu, loin des caricatures. Car comme l'estime Mgr Éric de Moulins-Beaufort, il garantit non seulement "la possibilité d’une catéchèse et l’annonce du Seigneur Jésus", mais encore l’accueil de "tout élève sans discrimination", appelé "à adhérer à un projet éducatif exigeant, nourri de la tradition éducative chrétienne". Avant de conclure : "Rencontrer Dieu qui parle et se confronter à sa Parole est le plus beau cadeau qui puisse être fait à la liberté pour qu’elle entre dans l’aventure de la vie avec exigence et confiance".

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