Pour beaucoup, les tatouages expriment un style, pour certains, ils sont même une forme d'art, là où d'autres y voient de la vulgarité. Avant qu'il ne devienne populaire, arboré comme accessoire de mode permanent, le tatouage était lié à l'identité de celui qui le portait et avait une nature symbolique.
Il est donc loin d'être nouveau, puisque le premier homme tatoué retrouvé aurait vécu il y a... 5.200 ans. Mais c'est une découverte d'une autre nature qu'ont fait des chercheurs polono-soudanais, en octobre 2023. Leurs recherches archéologiques sur le site monastique de Ghazali, situé dans la région de Wadi Abu Dom au nord du Soudan, ont permis d'identifier un tatouage en forme de christogramme ou chrisme sur le pied droit d'un homme enterré dans le cimetière du monastère.
On distingue en effet les deux lettres superposées chi et rhô, "XP", venant du mot grec "ΧΡΙΣΤΟΣ" (Christ, ndlr), accompagnées des lettres alpha et oméga en référence au commencement et à la fin de toute chose. "Ce fut une surprise de voir tout d’un coup ce qui ressemblait à un tatouage. Au début, je n’en étais pas sûr, mais lorsque les images ont été traitées et que le tatouage s’est révélé, toutes les incertitudes initiales ont été levées", explique ainsi la doctorante Kari Guilbault. La datation au radiocarbone indique que la personne a vécu entre 667 et 774, a indiqué la doctorante au magazine Live Science, soit il y a au moins 1.300 ans. L'individu était probablement âgé de 35 à 50 ans au moment de son décès.
Le christianisme au Soudan
Le Soudan a été christianisé dès le VIe siècle avec la conversion massive des Nubiens, sous le règne de l'empereur Justinien. Pendant cinq siècles, ils édifièrent de nombreuses églises, dont on a retrouvé pour certaines d'incroyables fresques. Des archéologues ont notamment permis de dévoiler l'existence de sites chrétiens sur les bords du Nil, à Ghazali, notamment une cathédrale médiévale, mais aussi des églises et monastères. Soumise à l'islamisation de l'Égypte mamelouke dès le XIIe siècle, la Nubie chrétienne connaît sa fin au début du XIVe. Ce n'est qu'au XIXe siècle que le christianisme opèrera son véritable retour grâce aux missionnaires catholiques et prédicateurs protestants.