La vie de Rodrigue Tandu est loin d’être ordinaire. Originaire de la République Démocratique du Congo, Rodrigue Tandu arrive en France à l’âge de six ans. Après le décès prématuré de sa mère, il s’installe avec son père à Bondy, en plein cœur de la Seine-Saint-Denis. Pendant son enfance, Rodrigue vit paisiblement sa scolarité, mais au collège et au lycée, la situation se complique et il tombe dans la spirale de la violence.
De fréquentes et violentes bagarres avec des jeunes de la cité en face de l’école le dissuadent, lui et ses amis, de se rendre en cours. Déscolarisés, ils passent alors leurs journées dans les rues de Bondy. Très vite, ils tombent dans la délinquance, organisent des cambriolages, deviennent accro au cannabis et, recrutés par des trafiquants de drogue, commencent à dealer. Rodrigue vit ainsi jusqu’à ses 21 ans.
Une rencontre étonnante à Bondy
Un soir, vers 22 heures, Rodrigue se prépare à aller en boîte de nuit après avoir récupéré le butin de la journée. Soudain, ses amis et lui voient trois religieuses débarquer. "Quand on a vu trois blanches arriver, on pensait que c’étaient des flics", raconte Rodrigue Tandu à Aleteia. "On pensait qu’elles nous tendaient un piège, alors on les a fouillées !". Mais les jeunes ne trouvent sur elles ni armes, ni micros. "Quand on a su que c’étaient vraiment des bonnes sœurs, j’ai ressenti dans mon cœur le devoir de les protéger, parce que j’étais le seul catholique parmi mes amis. Je leur ai dit "priez pour moi, mais cassez-vous tout de suite". Alors elles sont parties et moi, j’ai continué mon chemin".
"Priez pour moi, mais cassez-vous tout de suite"
Ces religieuses appartenaient à la communauté de l’Emmanuel et s’étaient installées dans le quartier, à Bondy. Rodrigue faisait tout pour les esquiver, jusqu’au jour où il demande à une sœur de prier avec lui, après une fête de la musique. Il y avait eu une bagarre violente et Rodrigue avait eu peur qu’il n’y ait un mort et qu’il aille en prison. En croisant la sœur, il décide de rentrer dans l’église et de prier avec elle, et là, il ressent une grande paix et trouve un vrai réconfort. Alors quelque temps plus tard, en signe de remerciement, Rodrigue accepte l’invitation de la religieuse d’aller au sanctuaire de Paray-le-Monial : "Je voulais la remercier d’avoir prié avec moi ce jour-là et aussi parce que, grâce à ses prières, je n’étais pas allé en prison", dit-il en souriant.
Le pèlerinage à Paray-le-Monial
Il part alors avec un groupe de pèlerins, avec les religieuses et surtout avec quelques munitions : "J’étais addict au cannabis, donc il fallait ramener de quoi tenir les cinq jours", plaisante-t-il. "Dans le car, les sœurs étaient toutes joyeuses, mais moi, j’étais déjà défoncé. En arrivant à Paray le Monial, j’ai remarqué que les gens étaient différents, tout le monde souriait. Je n’étais pas habitué, je pensais qu’ils se foutaient de moi en fait".
Tout de suite, Rodrigue est attiré par le Saint Sacrement exposé pour accueillir les pèlerins. "Je ne connaissais pas le Saint Sacrement. J’ai vu une boule et à travers cette boule, j’ai senti une grande force qui m’appelait, une douceur et un amour qui me saisissaient. Quand je me suis approché, j’ai commencé à pleurer. Je me suis agenouillé et j’ai demandé pardon. Face à cet amour et à cette douceur, je ne me suis pas senti digne", raconte-t-il.
Après cela, Rodrigue entend une voix intérieure qui l’encourage à jeter tout ce qu’il avait ramené. "J’ai donc jeté le cannabis. Au début, je me suis dit que je pouvais le vendre aux mecs qui étaient là, mais finalement je l’ai jeté. Et depuis ce jour-là, je n’ai plus jamais fumé", raconte-t-il. Une grâce qui lui a donc permis de faire un choix radical. À partir de ce moment-là, Rodrigue passe de confessionnal en confessionnal, prie de longues heures devant le Saint Sacrement, assiste à la messe et est habité par une immense joie.
Retour à Bondy
"Je suis revenu à Bondy avec le feu. Je chantais des alléluias partout dans le quartier. Je me suis dit que je n’allais plus jamais pécher et que désormais j’étais devenu saint. Je voulais dire mon secret à mes potes, mais ils pensaient que je commençais à péter les plombs". Rodrigue commence à ne plus être en phase avec eux, il décide donc de s’éloigner, paye ses dettes et sort du monde de la délinquance, de la violence et de la drogue.
Grâce à l’une des religieuses, il commence l’École de Charité et de Mission de la Communauté de l’Emmanuel et à l’âge de 24 ans il devient éducateur spécialisé aux Apprentis d’Auteuil, puis dans l’association Le Rocher. Aujourd’hui, âgé de 43 ans, Rodrigue est marié et père de trois enfants. Grâce à son parcours de vie et à son expérience professionnelle, il a cofondé une association appelée "Réseau des deux cités" pour faire rencontrer des personnes aux parcours différents : des grands entrepreneurs et des personnes issues des quartiers sensibles, pour aider ainsi, avec l’aide de Dieu, des centaines de jeunes de banlieues à changer radicalement de vie comme lui.