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Au Nigeria, un Noël de sang et de larmes

CHRETIENS-MASSACRE-NIGERIA-AED

Près de 200 chrétiens ont été massacrés au Nigeria entre le 23 et le 26 décembre 2023.

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Jean-Baptiste Noé - publié le 19/01/24
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L’effroi a de nouveau frappé le Nigeria avec un massacre qui a causé la mort de plus de 200 chrétiens. Un massacre de plus dans un pays perclus de violence, analyse le géopoliticien Jean-Baptiste Noé, où les autorités politiques ne parviennent pas à imposer la paix sociale.

Cela ressemble à un massacre des Innocents avant l’heure. Du 23 décembre au soir de Noël, des hommes armés ont attaqué une vingtaine de villages du plateau de Jos, massacrant les populations civiles rencontrées. Le bilan, très lourd, s’élève à 200 morts. Un massacre de plus, après beaucoup d’autres, des rapts de jeunes filles vendues comme esclaves sexuelles, des attaques terroristes contre les populations civiles. À quoi s’ajoutent des villages rasés, ce qui a chassé de leurs terres près de 15.000 personnes.  

L’indignation des évêques

Vaste massif situé au centre du Nigeria, le plateau de Jos, dont l’altitude moyenne est de 1.200 mètres, servit de refuge aux populations menacées par le jihad, comme c’est souvent le cas des montagnes en pays musulmans. D’où la forte concentration de populations chrétiennes, catholiques ou protestantes. Mais face à la poussée des Peuls et aux réveils des revendications islamistes, la montagne de Jos n’est plus le refuge qu’elle fut. Ces massacres ont été, pour l’essentiel, menés par les pasteurs nomades fulanis qui s’en prennent régulièrement aux agriculteurs chrétiens. Leur objectif étant de chasser les populations sédentaires afin de récupérer leurs terres. Si la dimension religieuse est donc un élément important de ces attaques, la dimension ethnique l’est tout autant. Le gouvernement central du Nigeria n’a réagi que très mollement aux massacres, suscitant l’indignation des évêques face à l’impossibilité de l’État d’assurer la sécurité des populations civiles, spécialement chrétiennes.   

Les chrétiens du Nigeria se sentent abandonnés.

Face à l’absence de réaction réelle du gouvernement, plusieurs hauts responsables chrétiens ont organisé une marche devant les bureaux du gouverneur de l’État du Plateau afin de faire pression sur lui pour que des mesures de sécurité soient prises. Les autorités chrétiennes du Nigeria estiment que 60.000 chrétiens ont été tués ces vingt dernières années, soit près de dix chrétiens tués chaque jour. Lors de ce rassemblement, les dirigeants chrétiens ont insisté sur la nécessité de la justice et de la paix, disant vouloir fonder une société d’espérance, avec une paix pour le plateau de Jos, mais aussi pour tout le Nigeria. Il y a en effet de quoi faire puisque tout le pays est gangrené par la criminalité, le sud étant notamment tenu par des gangs puissants dont les ramifications s’installent en France et aux États-Unis.

Absence de volonté politique

Mais si le président du Nigeria apporte un soutien verbal, les réactions policières et judiciaires se révèlent bien faibles. Les responsables des massacres savent qu’ils ne seront ni inquiétés ni jugés pour ces crimes, ce qui les encourage à les perpétuer. Cette inaction engendre une défiance à l’égard de l’État central, qui aboutit à une dissolution du sentiment civique dans le pays.    

Les chrétiens du Nigeria se sentent non seulement abandonnés par leur État, qui témoigne de bien peu d’ardeur pour les défendre en assurant leur sécurité légitime, mais aussi par le Pape, celui-ci n’ayant pas cité le Nigeria dans la liste des conflits lors de la bénédiction de Noël et des vœux au corps diplomatique. On touche en effet ici à l’une des limites de la diplomatie pontificale. En dépit des appels répétés du nonce à la nécessité de protéger l’ensemble des Nigérians et aux liens diplomatiques établis entre le Saint-Siège et le Nigeria, qui est le pays le plus peuplé d’Afrique (220 millions d’habitants), les massacres ne cessent pas et les chrétiens sont toujours persécutés. C’est à la fois la marque d’une absence de volonté politique du côté du Nigeria, mais aussi et surtout d’une impossibilité d’agir, le pays ne disposant pas d’une force armée suffisante pour établir la paix et la concorde sur l’ensemble de son territoire. Pays fédéral aux disparités ethniques et géographiques nombreuses, le Nigeria est traversé par des forces centrifuges qui détruisent sa cohésion et rendent illusoire son unité. Et les premières victimes en sont les populations civiles. 

Découvrez aussi ces attaques meurtrières qui ont visé des lieux de culte chrétiens ces dernières années :

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