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Football : le feuilleton du contrat Kylian Mbappé vire à l’absurde

KYLIAN MBAPPE
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François Morinière - publié le 12/01/24
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Partira, partira pas ? Toute l’Europe se demande si le joueur du Paris-St-Germain va quitter son club ou pas. Vendre un contrat qui lie un club et un joueur n’est pas immoral en soi, soutient François Morinière, mais le commerce des joueurs à outrance est devenue une pratique qui tourne à l’absurde, dit-il, comme l’illustre le feuilleton Kylian Mbappé. Le sport récompense la victoire des talents, pas leur marché.

Même si vous n’êtes pas très intéressé par le football, vous devez vous demander pourquoi les médias parlent à longueur de journée du contrat de Kylian Mbappé avec le club du Paris Saint-Germain (PSG). Un peu d’éclairage est nécessaire sur le dossier juridique et économique. Une des façons pour un club de football de gagner de l’argent est de revendre la fin d’un contrat qui le lie à un joueur à un autre club. C’est même devenu pour certains la première source de revenus, sous la forme d’un trading de talents. Ayant la maîtrise du temps, le club peut librement négocier une soulte avec l’acheteur. Cette forme de commerce est devenue prépondérante, bien encouragée par les agents des joueurs commissionnés à chaque transaction. Les transferts de joueurs se font désormais majoritairement de cette façon, plutôt que d’attendre que le joueur soit libre pour le faire venir.

Peu de clubs sont capables de s’aligner

Au cas d’espèce de Kylian Mbappé, le joueur a resigné un contrat de deux ans en 2022, avec une option d’une année supplémentaire qu’il n’a pas exercée, et sera donc "libre" en juin prochain. Ce qui veut dire que le PSG ne percevrait aucune indemnité de transfert, alors qu’il a longtemps espéré une prolongation, pour pouvoir ensuite monnayer le contrat. Kylian MBappé étant considéré comme l’un des meilleurs joueurs du monde, on parle en théorie de plus de 150 millions d’euros, somme considérable même à l’échelle de l’économie du football. En réalité, peu de clubs sont capables de s’aligner sur les conditions salariales du joueur dont on estime qu’elles dépassent probablement 200 millions d’euros par an. Le Real Madrid est sur les rangs depuis longtemps, et peut-être un club anglais. On pense à Manchester United ou Liverpool par exemple. 

Ce commerce à outrance de joueurs devient caricatural, et montre un dévoiement du sport qui s’éloigne de la récompense attachée à la victoire, qui peut être remplacée par celle du meilleur commerce de talents.

Depuis trois ans maintenant, le joueur et le club parisien tentent de trouver un chemin commun au gré des tensions créées pour négocier au mieux et défendre les intérêts de chacun. Et presque tout le monde s’en est mêlé, y compris de manière assez certaine le président Macron et l’ancien président Sarkozy qui ont à tour de rôle tenté d’influencer Kylian Mbappé pour qu’il reste jouer en France. Les enjeux économiques indirects sont en effet importants, car le joueur est la star n° 1 de notre championnat national, et contribue donc directement à son attractivité sportive… et économique.

Le cynisme du système

Quel regard porter sur une telle situation ? Le débat sur le salaire et la valeur des joueurs semble un peu caricatural. Nous sommes dans une économie de marché où la loi de l’offre et de la demande fonctionne, et où les flux financiers sont investis là où les rendements sont forts. Aucune nouveauté. Le marché des yachts ou des voitures de luxe n’a jamais été aussi florissant. On ne peut faire de procès aux footballeurs en fonction de ses propres goûts ou ses affinités au nom d’une morale établissant qu’un diamant ou un Van Gogh ont plus de valeur "éthique" qu’un "garçon courant derrière un ballon".

En revanche, ce commerce à outrance de joueurs devient caricatural, et montre un dévoiement du sport qui s’éloigne de la récompense attachée à la victoire, qui peut être remplacée par celle du meilleur commerce de talents. Même si les joueurs ont évidemment leur mot à dire, et savent aussi jouer de la situation, il faut reconnaître que les perturbations liées à des changements de club à répétition sont souvent dommageables pour le succès de leur carrière. Ils énervent également les supporters qui dénoncent le cynisme du système. Il est temps que les instances régulent cette situation en encadrant davantage les pratiques, pour limiter les abus et assainir une pratique qui tourne à l’absurde, à commencer par la limitation des périodes de transfert. Si rien n’est fait, c’est le football lui-même qui risque de perdre ce qui lui reste d’éthique sportive.

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