"Vous souvenez-vous de cette fille du peuple qui devint l’égale des plus grands capitaines, avec ses cheveux courts et ses habits d’homme ? La guerre durait depuis près de cent ans, et la France était sur le point de disparaître". Des premières voix à sa condamnation, Antoine de Meaux met en scène l’incroyable parcours de Jeanne d’Arc dans un long-métrage d’un genre hybride, entre le documentaire et le film d’animation. Le réalisateur revient sur le procès fantoche de Jeanne, celle que Bernanos appelait "relapse et sainte", l’enfant de Domrémy condamnée par la cruauté des hommes. C'est sur les mots d'Isabelle Rommée, la mère de Jeanne, que s'ouvre le long-métrage : "J’avais une fille, née en légitime mariage, que j'avais élevée dans la crainte de Dieu et le respect de la tradition de l'Église. Cette fille, certains ennemis l'ont fait traduire en procès de foi, un procès perfide, violent et inique, sans l'ombre de droit. Ils l'ont condamnée de façon criminelle et l'ont fait mourir très cruellement par le feu".
L’humble bergère aux mains d’enfant
C’est dans "un monde menacé de disparition" que la petite bergère de Domrémy s’impose pour porter aux princes de son temps le message que le Ciel lui envoie par les voix de l’archange saint Michel, de sainte Marguerite et sainte Catherine d’Alexandrie. Charles VII, face aux Anglais et leurs alliés les Bourguignons, ne règne plus que sur la moitié sud de la France et la guerre civile a déchiré la France entre Armagnacs et Bourguignons. C’est dans ce chaos que celle qui n’est alors qu’une "petite fille moqueuse et tendre, écrit Bernanos dans ses Essais et écrits de combats, […] répond d’une voix douce aux théologiens politiques, avec des sentences et des proverbes, à la manière des bergers".
Jeanne d’Arc n’a que faire des princes du monde et de l’Église ; elle n’appartient qu’à Dieu. Reims, Orléans, Beaugency, Auxerre, Troyes et Châlons : Jeanne, par sa seule présence, fédère les troupes et gagne les batailles qui mènent la France vers la victoire. Viennent pourtant la jalousie et la trahison de Charles VII qu’elle a mené vers le sacre et le triomphe : c’est le temps du martyre pour l’humble bergère aux mains d’enfant. Puis le procès fantoche, mené par l’évêque Cauchon, par lequel soixante hommes scellent le drame de l’enfance assassinée.
Une longue enquête
Illustré par une animation en motion capture, toutefois assez peu réussie, le long-métrage retrace la longue enquête qui a permis le procès de réhabilitation de Jeanne, confiée en 1456 à Jean Bréhal, accompagné par le fictif frère Pierre. C’est à lui que Laurent Stocker, de la Comédie Française, prête admirablement sa voix. Le téléspectateur accompagne ainsi le grand inquisiteur de France et son compagnon dans leur mission, de Domrémy à Chinon, en suivant la trace de Jeanne, pour interroger les nombreux témoins qui croisèrent sa route. Ensemble, ils relèvent les témoignages et leur redonnent une voix pour porter à l’écran les archives conservées lors du procès de révision par l’Inquisition. Antoine de Meaux illustre leur témoignage bouleversant et rend ainsi hommage à la jeune sainte qui, au pied de ce bûcher qui fut pour elle la porte du Ciel, n’a jamais cessé de fixer son regard sur la croix.
Pratique
France 2, mardi 19 décembre à 21h10
En rediffusion sur France.tv pendant six mois