Publiée discrètement le 8 novembre, une note du dicastère pour la Doctrine de la foi revient sur plusieurs points sensibles liés à la place des personnes transsexuelles et homosexuelles dans l’Église. Signée le 31 octobre par le pape François, elle répond à un courrier du 14 juillet dernier adressé au Vatican par Mgr José Negri, évêque de Santo Amaro, au sujet de « certaines questions relatives à la possible participation aux sacrements du baptême et du mariage de la part des personnes transsexuelles et des personnes homo-affectives ».
Dirigé par Mgr Victor Manuel Fernandez, le document semble témoigner d'une certaine ouverture quant à ces situations. Il rappelle le discours tenu jusqu'ici par le pape François, qui avait affirmé dès sa première exhortation apostolique que "l’Église n’est pas une douane" et que "les portes des sacrements ne devraient pas se fermer pour n’importe quelle raison". Interrogé par I.Media, Mgr Philippe Bordeyne, président de l’Institut pontifical Jean-Paul II pour les sciences de la famille et du mariage, explique les grandes lignes de cette note afin de préciser la position du Vatican.
1Sur le baptême des transsexuels
Dans sa note, le dicastère pour la Doctrine de la foi déclare qu'"un transsexuel – même en ayant subi un traitement hormonal et une opération chirurgicale de réassignation sexuelle – peut recevoir le baptême, dans les mêmes conditions que les autres fidèles, s’il n’y a pas de situations qui risquent d’engendrer un scandale public ou de désorienter les fidèles."
"Cette réponse s’oppose à l’attitude pastorale qui consiste à présupposer que la personne transsexuelle serait toujours dans ce cas en situation de péché grave l’empêchant de recevoir la grâce", estime Mgr Philippe Bordeyne. Deux arguments sont à prendre en compte, selon le prélat."D’une part, même s’il y a une situation objective de péché, le sujet n’en est pas toujours totalement responsable". D’autre part, "même si sa responsabilité personnelle devait l’empêcher de recevoir la grâce de Dieu (la grâce sanctifiante) dans la célébration du sacrement, celui-ci resterait vivant dans la personne baptisée". Il précise que "si les obstacles à la grâce devaient disparaître par un travail de conversion, le sacrement pourrait alors pleinement se déployer".
2Sur la responsabilité de parrain d'une personne transsexuelle
Pour ce qui est des personnes transsexuelles souhaitant devenir parrain ou marraine de baptême, ou témoin de mariage, le Dicastère pour la doctrine de la foi estime cette opportunité acceptable. Toutefois, rappelle Mgr Bordeyne, cet avis n'est pas sans nuance ni limite. "Comme cette tâche ne constitue pas un droit, la prudence pastorale exige qu’elle ne soit pas autorisée s’il existe un risque de scandale, de légitimation indue ou de désorientation dans la sphère éducative de la communauté ecclésiale", relève-t-il. Un principe de "prudence pastorale" est proposé concernant la fonction de parrain ou marraine de baptême confiée à des personnes homosexuelles vivant en couple.
"Le texte invite à écarter spécifiquement celles qui militeraient ouvertement pour l’assimilation de leur union au mariage, mais il ne ferme pas la porte pour les autres", explique Mgr Bordeyne. "C’est le même principe que dans une récente instruction sur la bénédiction des personnes homosexuelles : éviter toute confusion ou assimilation au mariage", précise encore le prêtre français, faisant allusion à la réponse du pape François aux “dubia” de cinq cardinaux conservateurs, publiée début octobre, avant l’ouverture de l’assemblée synodale.
Par ailleurs, la note de la DDF "rappelle qu’il vaut mieux recourir à la fonction de témoin au baptême quand les doutes sont avérés sur la capacité du parrain à transmettre la foi", détaille Mgr Bordeyne. Dans ce cas, il faudra prendre en compte "la possibilité qu’une autre personne du cercle familial puisse se faire garante de la correcte transmission de la foi catholique au baptisé".
4Sur le baptême d'enfants nés d'une GPA
Dans sa note, le dicastère pour la Doctrine de la foi explique que les enfants et adolescents qui ont entamé ou achevé une transition de sexe pourront recevoir le baptême "s’ils sont bien préparés et disposés". Les enfants nés d'une gestation pour autrui le peuvent tout autant, de même que ceux adoptés par un couple homosexuel. Il doit cependant "y avoir l’espérance fondée qu’il sera éduqué dans la religion catholique". L’idée sous-jacente reste de ne pas priver de la grâce du baptême ces enfants, pris dans des situations dont ils ne sont aucunement responsables, et d’inviter leurs parents à un parcours de conversion, relève Mgr Bordeyne.
5Sur la possibilité d'une personne transsexuelle ou homosexuelle d'être témoin de mariage
La note publiée par le dicastère indique que rien dans la législation canonique universelle n’empêche a priori une personne transsexuelle et-ou homosexuelle d’être témoin d’un mariage.
Pour Mgr Bordeyne, la réponse du Vatican à l'ensemble de ces questionnements "utilise des raisonnements très classiques (scolastiques)", tout en les appliquant à des cas nouveaux. "L’Église n’a cessé de faire ainsi pour répondre à des questions nouvelles, qu’on ne pouvait pas se poser auparavant."