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À Pellevoisin, le message de Marie à Estelle Faguette : “Publie ma gloire”

chapelle sanctuaire de pellevoisin

La chapelle du sanctuaire de Pellevoisin.

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Anne Bernet - publié le 04/11/23
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Miraculeusement sauvée de la maladie par la Sainte Vierge, Estelle Faguette reçoit à Pellevoisin la mission d’appeler à la prière et la conversion et de promouvoir le scapulaire du Sacré Cœur. Elle tiendra bon dans ses épreuves jusqu’à son retour à Dieu, le 23 août 1929.

Née à Saint-Memmie près de Châlons-sur-Marne, le 12 septembre 1843, Estelle est la fille d’un couple d’aubergistes que les malversations d’une proche a ruiné. Sa "famille honorable et déchue" ne cessera plus de dégringoler l’échelle sociale. Dans les années 1860, M. Faguette accepte un emploi à Paris. La maladie va l’en priver et faire sombrer les siens dans la misère. Entrée chez les Augustines hospitalières, Estelle, après deux ans de noviciat, est victime d’un accident qui la contraint à renoncer à la vie religieuse. Afin de subvenir aux besoins de ses parents, de sa cadette et bientôt des enfants de son aînée, décédée, elle trouve, en 1864, une place de lingère couturière au service des La Rochefoucauld d’Estissac, y donne toute satisfaction, devient bonne d’enfants, poste de confiance que lui valent sa probité, son sérieux et sa piété.

"Ne crains rien !"

En 1866, lors d’un séjour de ses maîtres dans leur propriété du Berry, près de Pellevoisin, Estelle tombe malade. Les médecins mettront du temps à comprendre que ses symptômes cachent une tuberculose intestinale, incurable, qui, pendant dix ans, empirera. Les La Rochefoucauld la gardent à leur service et paient ses soins médicaux, vains puisqu’à la fin de l’été 1875, Estelle n’est pas en état de regagner Paris. L’on fait venir sa famille à Pellevoisin, afin qu’elle n’y meure pas seule. En décembre, Estelle, à l’agonie, écrit une lettre à la Sainte Vierge déposée dans la réplique de la grotte de Lourdes du parc du château. Elle y expose à Notre-Dame son angoisse de mourir en laissant sa famille sans soutien financier, unique raison pour laquelle elle demande à guérir. 

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Lettre écrite par Estelle à la Vierge.

Si mon Fils te rend la vie, je veux que tu publies ma gloire.

Dans la nuit du 14 février 1876, Estelle, ravagée de souffrances, voit, terrifiée, le diable à son chevet. Mais Notre-Dame apparaît et le chasse : "Que fais-tu ici ? Ne vois-tu pas qu’elle porte ma livrée [le scapulaire] et celle de mon Fils ?" puis, s’adressant à la mourante, elle lui dit : "Ne crains rien ! Mon Fils va se laisser toucher. Tu souffriras encore cinq jours en l’honneur des cinq plaies de mon Fils. Samedi, tu seras morte ou guérie. Si mon Fils te rend la vie, je veux que tu publies ma gloire." Le lendemain, elle précise : "Tu seras guérie samedi. Tu souffriras et ne seras pas exempte de peines : c’est ce qui fait le mérite de la vie." Puis elle lui révèle l’étendue de ses péchés passés avant de lui affirmer : "Tu as par ta résignation racheté tes fautes. Je suis toute miséricordieuse et maîtresse de mon Fils."

On la traitera de folle

Le 18 février, Estelle se lève, guérie, après avoir contemplé Notre-Dame dans sa splendeur. Celle-ci lui révèle le texte de l’ex-voto qu’elle devra installer dans l’église de Pellevoisin : "J’ai invoqué Marie ; elle m’a obtenu de son Fils ma guérison complète." La Vierge lui dit :

"Si tu veux me servir, sois simple et que tes actes répondent à tes paroles. On peut se sauver dans toutes les conditions. Où tu es, tu peux faire beaucoup de bien. […] Ce qui m’afflige le plus, c’est le manque de respect qu’on a pour mon Fils dans la sainte communion et l’attitude de prière qu’on a quand l’esprit est occupé à autre chose. Je dis ceci pour des personnes qui pensent être pieuses."

Elle lui demande de ne rien révéler avant d’en avoir parlé à son confesseur et la prévient qu’on "la traitera de folle" mais qu’elle l’aidera.

La guérison de Mademoiselle Faguette est le sceau posé sur les apparitions de février qui les authentifie mais, Estelle sait qu’il y en aura d’autres et brûle d’envie de revoir Notre-Dame. Elle doit attendre juillet. Marie revient le 1er et le 2 : "Tu as déjà publié ma gloire. Par moi, Il [le Christ] touchera les cœurs les plus endurcis. Je suis venue spécialement pour la conversion des pécheurs." À partir du 3 juillet, et jusqu’à la dernière apparition, le 8 décembre, Estelle voit des gouttes de rosée tomber en pluie lumineuse des mains de Notre-Dame, symbole des grâces qu’Elle veut répandre sur l’humanité, sur la France et les Français.

La dévotion du scapulaire

Deux mois durant, Marie se dérobe ensuite à ses attentes, même à l’occasion de ses fêtes. Son confesseur lui interdit de revenir au village ; or, c’est dans la chambre témoin de la guérison et transformée en oratoire que les apparitions ont lieu. Il faut à Estelle un immense effort pour résister à la tentation de désobéir, récompensé puisque, le 9 septembre, elle revoit Notre-Dame : "J’attendais un acte d’obéissance. Tu as bien le caractère des Français ; ils veulent tout savoir avant d’apprendre et tout comprendre avant de savoir." "La France… Que n’ai-je pas fait pour elle et pourtant, elle refuse d’entendre. Je ne peux plus retenir mon Fils. La France souffrira." Estelle a la vision de guerres terribles, résultat de la révolte de la nation contre Dieu. L’Église ne sera pas épargnée en raison de ses divisions.

C’est ici que je serai honorée. Courage et confiance. Tant pis pour ceux qui ne voudront pas croire.

Marie ne semble pas laisser d’échappatoire au châtiment. En revanche, elle offre encore les moyens de salut individuel, sous la forme du scapulaire blanc orné du Sacré Cœur qu’elle montre pour la première fois à la voyante le 9 septembre en disant : "Depuis longtemps, les trésors de mon Fils sont ouverts ; qu’ils prient ! J’aime cette dévotion." "C’est ici que je serai honorée. Courage et confiance. Tant pis pour ceux qui ne voudront pas croire." "Je t’ai choisie car je choisis les petits et les faibles pour ma gloire." Dès lors, Estelle fabrique des copies du scapulaire et commence à le diffuser.

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Modèle de scapulaire de Pellevoisin.

Le 8 décembre, Notre-Dame dit apparaître pour la dernière fois mais restera « invisiblement » près d’Estelle afin de la soutenir dans "le temps des épreuves". Sur les gouttes de rosée lumineuses qui coulent de ses mains, Estelle lit : "Piété, salut, confiance, santé, conversion" et entend : "Ces grâces sont de mon Fils. Je les prend de son cœur, Il ne peut me refuser." Marie répète à Estelle qu’elle l’a choisie "pour publier sa gloire et répandre cette dévotion", qu’elle devra faire beaucoup de scapulaires et qu’il convient de prier "en réparation des outrages faits au Christ dans le sacrement de son amour". Puis elle lui présente à baiser le Sacré Cœur du scapulaire qu’elle sent vivant.

Estelle tient bon

La mission de mademoiselle Faguette commence, elle rencontrera maintes traverses. Il faut trois enquêtes canoniques pour reconnaître le caractère miraculeux de sa guérison mais l’Église ne se prononce pas sur la réalité des apparitions. Malgré tout, en 1900, Léon XIII, bien disposé en faveur d’Estelle car elle a prophétisé son élection, l’a reçoit et l’encourage, en dépit de la décision prise en 1886 par l’archevêque de fermer le "sanctuaire", à cause des querelles suscitées autour de la maison par la paroisse et ses propriétaires, les La Rochefoucauld. Persécutée, critiquée, moquée, mademoiselle Faguette tient bon, jusqu’au bout. Elle s’éteint paisiblement le 23 août 1929, fidèle envers et contre tout à la mission que lui a donnée "la Mère miséricordieuse".

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