Par Cyprien Viet et Isabella H. de Carvalho, envoyés spéciaux à Lisbonne. C’est dans une ambiance bouillante que le pape François est arrivé, vers 20h30, bruyamment acclamé par les plus d’un million de jeunes rassemblés sur cet espace situé à 13 kilomètres du centre de Lisbonne. Après avoir marché sous une chaleur accablante et avoir rejoint les espaces prévus pour les différents groupes présents, les jeunes ont écouté le pape François les exhortant à apporter "leur joie aux autres", car la joie est "missionnaire et ne peut pas rester enfermée en soi-même, a-t-il insisté.
Dans une courte méditation largement improvisée en espagnol, le pape François a notamment souligné que "l’amour de Jésus est la seule chose gratuite qui existe dans la vie", invitant à se laisser guider par Jésus sur son chemin. "Celui qui abandonne et arrête de cheminer chute", a averti le pape François. La veillée a également été rythmée par des danses et des chants, et par un ballet de drones dessinant dans le ciel l’inscription "Rise Up", "Lève-toi", avant un temps d’adoration.
Alberto, séminariste coréen, qui deviendra diacre l’an prochain, a vécu cette veillée avec "un cœur brûlant". "La jeunesse est venue ici en disant que Dieu est là, et qu’Il nous appelle", souligne-t-il. Alors que le nombre de croyants diminue, "cela peut nous donner la force de continuer à aller de l’avant et simplement de suivre le chemin sur lequel Jésus a marché", insiste-t-il.
“L’évènement clé” des JMJ
Pour Tobias, volontaire de 36 ans venu du Zimbabwe, “la veillée est clairement l’évènement clé car c’est là que nous prenons nos messages pour le retour à la maison, pour ce que nous devons faire spirituellement”. Il considère que l’Église catholique vit un changement qui doit prendre la forme d’un "pèlerinage" parcouru par les jeunes. La présence du Pape "est une bénédiction pour nous, et cela nous donne la vie", alors que "beaucoup d’entre nous pensent que nous n’avons pas de futur, que c’est la fin de notre vie".
Pour Aleksandra, 26 ans, venue de Pologne, les JMJ vivent leur apogée dans "cette soirée, car tous les jeunes sont dans le même endroit sous le ciel, sous le coucher de soleil. L’adoration était très belle", confie la Polonaise, qui avait également vécu les JMJ de Cracovie dans son pays en 2016. "Ce n’est pas habituel de venir ici et de dormir dehors, mais c’est une bonne chose pour les jeunes, quand nous avons internet tout le temps, une vie confortable dans nos maisons, c’est une bonne expérience", reconnaît-elle.
Rodney Coco, journaliste venu de l’Ile Maurice pour suivre le groupe des 180 jeunes de son diocèse, remarque que le nombre de jeunes présents sur le Campo do Graça correspond à la population entière de son pays. "Cette ambiance me touche et me stimule, notamment avec cette dimension de pèlerinage qui a conduit les jeunes à marcher vers ce lieu, pour y rencontrer le Christ. Je trouve ça très beau, de voir tous ces jeunes engagés qui osent venir jusqu’ici, c’est l’espérance de l’Église", raconte le jeune trentenaire, qui vit à l’occasion de ce reportage ses premières JMJ.
"Montrer au Pape qu’il peut compter sur nous"
Ségolène, jeune Française venue avec l’association Fratello qui prend notamment en charge des personnes atteintes de handicap psychique, est émue de participer à cette veillée. "Cela a un sens magnifique car il y a toute la jeunesse mondiale qui est réunie. On voit que l’Église est jeune, qu'elle est belle, dynamique. Nous, les jeunes, nous voulons montrer au Pape que nous sommes là et qu’il peut compter sur nous", confie la jeune fille, qui souhaite promouvoir auprès du Pape et des jeunes la cause de canonisation du prêtre polonais Jerzy Popieluszko afin de demander son "intercession pour l’Europe".
Pour Kelly, venue de Suisse, cette veillée scelle un recommencement dans la foi. "Il y a trois ans, je me suis fâchée avec le Seigneur en raison d'événements dans ma vie. J’ai dit au Seigneur : ‘Tu n’es pas un père si tu me fais souffrir comme ça’. Mais cette année, pendant le Carême, j’ai eu un déclic et j’ai dit à Dieu : ‘On va essayer de se refaire confiance'".
Finalement venue aux JMJ après avoir été contactée par l'association Fratello, cette assistante de soins accompagne aux JMJ trois jeunes agoraphobes, qui suivent la veillée sur écran dans leur lieu d’accueil à Lisbonne. Mais en participant personnellement à ce rassemblement, Kelly renoue avec sa foi, dans cet espace ouvert sur le vaste estuaire du Tage, qui glisse vers l’Océan Atlantique. "C’est comme si après avoir traversé l’océan, les vagues se calmaient et que je recommençais à apercevoir le port, et la fin des galères. C’est comme revenir à la maison après un très, très long voyage", confie-t-elle.