De clown à aumônier, en passant par l’IKW, le parcours de Jean-Louis Berdat est loin d’être ordinaire. Comédien professionnel, il s’est investi pendant vingt ans au sein de l’association Le Rire Médecin. Connu sous le nom de Lulu Poireaux, il rend visite aux enfants malades hospitalisés. Formateur auprès des soignants, animateur de groupes de parole avec les comédiens, Jean-Louis Berdat sait écouter, accompagner, consoler. Il développe davantage ce charisme en poursuivant, sur quatre années, une formation à l’Institut Karol Wojtyla, à Paris, et obtient un diplôme universitaire (DU) d’anthropologie et accompagnement de la personne. Vers la cinquantaine, Jean-Louis Berdat aspire à autre chose. Lui qui depuis des années, pour son plus grand bonheur et celui des enfants, joue un personnage, a désormais envie d’être lui-même, sans maquillage ni artifice. C’est ainsi que depuis quatre ans il met son expérience de clown professionnel et sa fine connaissance de l’âme humaine acquise à l’IKW au service des patients de l’hôpital de Colmar en tant qu’aumônier. L’hôpital Pasteur possède 1.000 lits. Si Jean-Louis Berdat intervient principalement dans les services d’oncologie et de néphrologie, ce sont autant de lieux où il peut être appelé pour écouter, consoler, accompagner, rassurer, et faire rire, aussi.
Une conversion tardive et radicale
Jean-Louis Berdat grandit en Suisse. Il fait une école de commerce et à 22 ans, devient fonctionnaire de la Ville de Genève. "J’étais malheureux, pour moi, cet avenir n’avait pas de sens", confie-t-il à Aleteia. Quant à la foi, il ne l’avait "pas vraiment" : "J’étais baptisé mais plus par tradition". Un jour, il tombe sur une affiche dans la rue. Une invitation à une journée portes ouvertes d’une école "sur le mouvement". "Si cela avait été une école de théâtre, je n’y aurais jamais mis les pieds, j’étais bien trop timide ! Mais un travail sur le corps, le mouvement, cela m’a interpellé". Plus tard, il y verra une grâce du Seigneur. Car cette découverte est fabuleuse, et le début d’une belle histoire. Au bout de deux ans, son professeur l’engage à faire de l’art dramatique son métier. Jean-Louis Berdat part donc pour Paris et fait l’école internationale de théâtre Jacques Lecoq.
C’est à Paris qu’il se convertit à la foi catholique. "Les églises sont pleines à Paris !", explique-t-il. La foule, nombreuse, de fidèles parisiens, mais aussi la beauté de la liturgie, découverte auprès des Fraternités de Jérusalem, le conduisent à une vraie rencontre avec le Christ. Jean-Louis Berdat se dit également marqué par la spiritualité de Charles de Foucauld. "Charles de Foucauld m’a converti", reconnaît-il en récitant cet extrait de la prière d’abandon qui le touche profondément : "Je remets mon âme entre tes mains. Je te la donne, mon Dieu".
Parallèlement à son activité au Rire Médecin, Jean-Louis Berdat fait plusieurs retraites spirituelles, à Cîteaux, puis chez les Chartreux. Il part deux ans en mission humanitaire au Liban avec une association catholique. Années pendant lesquelles il développe une intense vie de prière. De retour en France – il a alors 44 ans – il est atteint d’un cancer du rein, est opéré, puis guérit. Il entre alors au noviciat, dans l’abbaye de saint Benoît-sur-Loire. Il y reste deux ans, jusqu’à discerner qu’il est fait pour être en relation et aider les autres. Le responsable des novices l’incite à s’inscrire à l’IKW, afin d’avoir des outils pour mieux se connaître et comprendre la personne humaine.
L’Institut Karol Wojtyla
A 51 ans, Jean-Louis Berdat retrouve ses activités au Rire Médecin, et entame un parcours de formation à l’IKW. Un parcours universitaire qui l’a passionné, se faisant en quatre ans à raison de six week-ends par an, à l’issue duquel lui est délivré un DU d’anthropologie et accompagnement de la personne, reconnu grâce au partenariat avec l’UCO (Université Catholique de l’Ouest). "Cela m’a d’abord aidé à me comprendre : qui je suis, comment je réagis dans telle ou telle situation, puis cela m’a éclairé sur le fonctionnement de la personne humaine, ses émotions, ses passions, sa volonté… Une connaissance très utile quand on fait de l’accompagnement, car on redécouvre ce qu’est la vertu, on apprend comment mettre l’intelligence au service du bien, on redéfinit la vraie liberté…", témoigne-t-il.
L’accompagnement, c’est essayer de ne pas rester dans l’émotionnel, mais de mettre l’intelligence au service du bien, de la vertu.
"L’IKW m’a donné des outils qui m’ont servi au Rire Médecin et qui me servent beaucoup aujourd’hui en tant qu’aumônier. J’ai appris à accompagner la personne, à écouter ses émotions, ses sentiments, à mettre du sens là où parfois il n’y en a pas", affirme Jean-Louis Berdat "Ces études m’ont permis de rejoindre la personne malade là où elle en est, de comprendre ce qu’elle vit et de tenter d’y apporter une réponse. L’accompagnement, c’est essayer de ne pas rester dans l’émotionnel, mais de mettre l’intelligence au service du bien, de la vertu".
L’IKW enseigne une connaissance complète et réaliste de la personne qui donne à l’étudiant le sens de l’écoute, des clés d’analyse et permet d’aider à retrouver le chemin de la vertu. La formation a une dimension pratique, avec des séminaires consacrés à l’étude de cas, et des stages d’écoute et d’accompagnement. Elle a de solides fondements avec l’apport d’Aristote, saint Thomas d’Aquin et saint Jean-Paul II, tout en ne négligeant pas les sciences humaines récentes qui sont enseignées à la lumière de ces auteurs. La formation invite à réfléchir à la place à accorder à l’intelligence, à la volonté, à l’affectivité et au corps, en vue de la pratique de la vertu.
Aumônier à l’hôpital
Fort de ces belles et grandes découvertes sur les profondeurs de l’âme humaine, Jean-Louis Berdat se demande comment se mettre davantage au service de l’Église. "Célibataire, je n’avais pas peur de prendre des risques pour le Seigneur", admet-il. Ses réflexions l'amènent à envisager la mission d’aumônier à l’hôpital. Un ami prêtre, responsable de la pastorale de la santé, l’aide à discerner. "Après vingt ans comme clown, j’avais envie d’être moi-même, d’être Jean-Louis, sans maquillage. L’hôpital, je connaissais bien. Je savais comment entrer dans une chambre. Au Rire Médecin, j’avais appris l’humain, la relation, par un geste, un regard… C’était une évidence, le Seigneur m’appelait là."
Pour Jean-Louis, il ne s’agit donc pas d’un nouveau numéro mais d’une nouvelle mission. Certes le rire est toujours présent : "J’introduis toujours l’humour dans mes visites", mais il fait place aussi à une autre dimension, plus spirituelle. "Je suis envoyé par l’Église, ma mission consiste à être le sourire de Dieu face à toutes les personnes que je rencontre. A l’hôpital, on est tellement fragile, les patients ont soif d’être aimés, écoutés. Alors si je peux apporter cette joie, cette paix qui viennent du Christ, je suis heureux d’être simplement là, de sourire aux malades et de leur tenir la main."
Pratique
En partenariat avec l’Institut Karol Wojtyla (l’IKW fait partie de l’Association pour la Formation Chrétienne de la Personne).