En ce début d’été, le pape François semble ne pas baisser la cadence, malgré sa récente hospitalisation du 7 au 16 juin pour une intervention chirurgicale à l’abdomen. Alors qu’il continue à recevoir en audience – y compris pendant sa pause estivale –, il vient d’annoncer, lors de l’Angélus du 9 juillet, la tenue d’un consistoire pour la création de 21 cardinaux, dont 18 électeurs, le 30 septembre prochain, à la veille du Synode sur l’avenir de l’Église. Parmi les cardinaux désignés, huit sont Européens, donnant une teinte plutôt occidentale à ces nouvelles entrées qui représenteront 13% de l’ensemble du collège électeur.
Au soir du 30 septembre prochain, 99 des 137 cardinaux électeurs auront été choisis par le pape argentin, soit près des trois quarts. Ce neuvième consistoire convoqué par le pape argentin depuis son élection en 2013 fait la part belle à l’Europe. François a ainsi choisi deux Français (Mgr François-Xavier Bustillo, évêque d’Ajaccio, et Mgr Christophe Pierre, nonce apostolique aux États-Unis), deux Espagnols (Mgr José Cobo Cano, archevêque de Madrid, et le père Ángel Fernández Artime, recteur majeur des salésiens), un Portugais (Mgr Américo Manuel Alves Aguiar, évêque auxiliaire de Lisbonne), un Suisse (Mgr Emil Paul Tscherrig, nonce apostolique en Italie), un Polonais (Mgr Grzegorz Ryś, archevêque de Łódź) et un Italien (Mgr Claudio Gugerotti, préfet du dicastère pour les Églises orientales).
Un autre Italien compte parmi les cardinaux désignés, bien qu’il soit comptabilisé au Moyen-Orient de par sa mission. Il s’agit du patriarche latin de Jérusalem, Mgr Pierbattista Pizzaballa.
Trois cardinaux de la Curie romaine
Trois nominations de préfets importants dans les rouages de la Curie romaine étaient attendues : Mgr Robert Francis Prevost, préfet du dicastère pour les Évêques, Mgr Claudio Gugerotti, préfet du dicastère pour les Églises orientales, et Mgr Víctor Manuel Fernández, préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi.
Cette nouvelle promotion ne bouscule pas foncièrement les équilibres au sein du collège cardinalice, mais, outre le renforcement de l’Europe – dont la part a cessé de décroître -, il est à signaler l’inflexion concernant la proportion de cardinaux asiatiques, maintenue à 16,1%. Seuls deux nouveaux cardinaux électeurs appartiendront au continent asiatique : Mgr Stephen Chow Sau-Yan, évêque de Hong Kong, et Mgr Sebastian Francis, évêque de Penang en Malaisie. Ces dernières années, l’Asie avait connu une forte progression puisqu’elle ne représentait que 7,9% du collège qui avait élu François.
19 cardinaux africains électeurs
Trois nouveaux cardinaux africains intègreront le Collège cardinalice, portant à 19 le nombre de cardinaux africains électeurs en cas de conclave, soit près de 14% du collège des électeurs. Ils n’étaient que 11 lors du conclave de 2013, soit 9,6%. Huit mois après la visite du pape François, le Soudan du Sud aura son premier cardinal (l’archevêque de Djouba, Mgr Stephen Ameyu Martin Mulla). Les deux autres cardinaux africains viennent d’Afrique du Sud (Mgr Stephen Brislin, archevêque du Cap) et de Tanzanie (Mgr Protase Rugambwa, évêque coadjuteur de Tabora).
À noter que diverses congrégations religieuses sont également représentées parmi les 18 nouveaux électeurs en cas de conclave : deux franciscains, deux jésuites, un salésien, et un religieux augustinien.
Au-delà des origines géographiques, les profils choisis par le pape François traduisent aussi ses dossiers prioritaires. A travers la promotion étonnante du discret nonce apostolique aux Etats-Unis, Mgr Christophe Pierre, le Pape adresse certainement un signal de fermeté aux évêques américains menacés par de fortes polarisations idéologiques. Mgr Grzegorz Ryś incarne pour sa part en Pologne une ligne d’ouverture aux questions œcuméniques et interreligieuses, un axe encore relativement rare dans cette terre d’un catholicisme plutôt traditionnel et homogène. Le très jeune évêque auxiliaire de Lisbonne, Mgr Américo Manuel Alves Aguiar, 49 ans, se trouve pour sa part encouragé dans la préparation des JMJ, dont il est le coordinateur, et sera probablement appelé ensuite à de nouvelles responsabilités.
Une nouvelle fois, le pape François s’est affranchi des traditions qui attribuaient autrefois des cardinaux aux diocèses majeurs (Paris, Milan, Turin, Venise, Prague ou encore Naples demeurent sans cardinal), préférant marquer des impulsions personnelles traçant une ligne pastorale sur les décennies à venir. Grand absent également de cette liste, l'archevêque majeur de l’Église gréco-catholique ukrainienne, Sviatoslav Schevchuk. Le Pape confirme ainsi sa ligne de prudence et de distance dans le contexte de la guerre en Ukraine, quitte à susciter perplexités et incompréhensions au sein de cette Église martyre.