Marie Rivier est native de Montpezat, dans l’actuel département du Gard. Elle grandit dans une famille catholique dans ce pays marqué par les affrontements avec les protestants depuis le XVIe siècle. À 16 mois, elle fait une mauvaise chute qui la blesse à la hanche et l’handicapera toute sa vie. Elle souffre terriblement et n’arrive pas à marcher. Sa mère l’amène alors tous les jours dans une chapelle où se trouve une sculpture de Notre-Dame-des-Douleurs pour demander sa guérison.
Dévotion mariale
La petite, surnommée "Marinette", aurait fait à 4 ans cette promesse à la Mère de Jésus : "Si tu me guéris, je t’amènerai des petites et leur dirai de bien t’aimer". Le miracle se serait produit en la fête de la Nativité de la Vierge Marie quelques mois plus tard, alors que Marie Rivier contemplait le mystère de la Pieta – la figure de la Vierge portant le corps sans vie du Christ au pied de la Croix. Dès lors, elle cultivera une ferveur sans limites pour sa sainte patronne.
La jeune fille peut désormais marcher mais elle reste affligée par son handicap et est d’une taille anormalement petite. Soucieuse de respecter son engagement, elle demande néanmoins, à ses 16 ans, à se faire admettre chez les Sœurs de Notre-Dame. Cependant, celle-ci la refusent à cause de sa santé fragile.
Fondatrice à 18 ans
Marie Rivier n’abandonne pas et décide donc d’agir seule. Elle monte son couvent et ouvre sa première école, se consacrant intégralement au soin des plus pauvres. Nous sommes alors en 1886 et la petite Gardoise a seulement 18 ans. "Son désir de faire connaître et aimer le Christ, son amour pour les petits et les pauvres, son courage devant les souffrances, nous encourage à l’imiter pour que notre monde soit plus beau, plus fraternel", estime Sœur Lorraine, membre de la communauté des Sœurs de la Présentation de Marie qui réside à Castel Gandolfo.
Trois ans plus tard, la Révolution éclate, et la jeune mère supérieure doit s’installer en Ardèche, dans le village de Thuyets. Là, dans cette commune reculée, elle endure les plus dures années de la Terreur, évitant les attaques des anticléricaux. Mieux, elle regroupe quatre autres jeunes femmes désireuses de s’unir à son projet. Le 21 novembre 1796, elle fonde la congrégation des Sœurs de la Présentation de Marie. "Au moment de la Révolution française, alors que ferment toutes les maisons religieuses, Marie Rivier fonde une congrégation", s’émerveille Bernard Ardura, président du Comité pontifical des sciences historiques.
Fécondité de son action
Et son activité est à cette époque impressionnante : jusqu’à sa mort, en 1838, elle va ouvrir 46 maisons de religieuses en France. S’appuyant sur sa devise "Tout pour Dieu ! Tout par le Saint-Amour !", elle bouleverse les vies de centaines de jeunes femmes et de leurs proches. Après elle, son œuvre continuera à grandir : aujourd’hui, les sœurs de la Présentation de Marie sont présentes tout autour du globe.
On les retrouve notamment en France, en Espagne, en Italie, au Portugal et en Suisse pour l’Europe ; au Brésil, au Pérou, au Canada et aux États-Unis pour les Amériques ; au Cameroun, au Burkina-Faso, en Gambie, au Mozambique et au Sénégal pour l’Afrique ; enfin, au Japon et aux Philippines en Asie. L’ordre comptait 135 maisons pour 897 religieuses en 2020.
Joie chez les Sœurs de la présentation de Marie
La supérieure de la congrégation, Mère Maria dos Anjos Alves, accueille cette canonisation de leur fondatrice comme "un moment de grande bénédiction et de lumière" et qui "dépasse" leurs attentes. Elle le voit aussi comme un "grand défi" de la sainteté à laquelle toutes les sœurs de sa communauté sont appelées, les enjoignant à "vivre, avec une foi ardente et un grand amour, la bonne nouvelle que Jésus a vécue et a proclamée".
En 1982, le pape Jean Paul II l’avait béatifiée. Après un miracle survenu aux Philippines attribué à son intercession, qui permet la guérison d’une fillette nouveau-née souffrant d’une grave maladie en 2015, la Congrégation pour les causes des saints et le pape François ont ouvert la porte à sa canonisation.
Le postulateur de la cause, Waldery Hilgeman, s’est réjoui de cette annonce : "nous remercions Dieu pour le don de cette femme, un modèle de foi vivante et d’amour profond et de confiance en Dieu et en la Bienheureuse Vierge Marie".