Selon les médias, la police a déposé 23.000 chefs d’accusation contre 25 personnes, les accusant d'avoir planifié les attentats. Mais vous n’êtes pas convaincu par ce rapport ?
Mgr Malcolm Ranjith : Le rapport en lui-même est très bon. Mais nous voulons que les recommandations soient mises en œuvre. Selon le rapport, les musulmans responsables des crimes ne semblent pas avoir perpétré cette attaque pour un motif religieux. Ils auraient eu un motif politique. Il semble qu'il y ait une personne ayant de l'autorité derrière cette attaque.
Quand avez-vous commencé à soupçonner que l’explication de l’État islamique n’était pas complète ?
Mes soupçons sont apparus immédiatement après l’attaque, car j’avais le sentiment qu’une bande hétéroclite de jeunes n’aurait pas pu mener à bien ce genre d'action très professionnelle. J’ai exhorté nos fidèles à ne pas réagir contre les musulmans. J’ai constaté qu’il y avait une tentative de dresser les chrétiens contre les musulmans pour les pousser vers la violence. Cela aurait pu être un désastre. Lorsque nous avons commencé à recevoir des informations de différentes sources, nous avons eu le sentiment que l’on n’était pas en train de conduire une véritable enquête. Maintenant, le rapport indique que la Commission de la Fonction Publique est arrivée à des conclusions très sérieuses en ce qui concerne le statut de l’appareil de renseignement de l’État. Les renseignements n’ont pas été communiqués aux parties concernées. La Commission indique également que des enquêtes supplémentaires seront nécessaires pour comprendre si des personnes ayant des intérêts particuliers n’auraient pas agi sur la base de renseignements afin de semer le chaos, la peur et l’incertitude dans le pays.
Des allégations en provenance de l'Inde laissent entendre que le gouvernement disposait déjà d'informations 17 jours avant l'attentat. Pouvez-vous nous donner un peu de contexte ? Quelles étaient les preuves ? De quels renseignements disposait l’Inde ?
Le rapport de la Commission présidentielle contient des preuves que le gouvernement indien avait averti nos services de renseignement quatre fois. Pourtant, le gouvernement sri-lankais n’a pas informé ni le public ni l’Église. Au lieu de cela, ils ont fait circuler une lettre privée entre eux, demandant aux hauts fonctionnaires et aux autres dirigeants d’être prudents, et d’éviter d’en parler en public. Par conséquent, ils étaient au courant de l’attaque en préparation et savaient que certaines personnes seraient blessées et tuées, mais ils ne voulaient pas l'empêcher.
Les services de renseignement sri-lankais et la police avaient eu connaissance des activités violentes d’un dénommé Zahran Hashim, leader du groupe islamique National Thowheed Jamath (NTJ), car avant l’attentat, on avait découvert un camp d'entraînement où les extrémistes islamistes étaient formés, y compris à l’usage d’explosifs. Ils le savaient, mais n’en ont pas tenu compte. On avait fait une série de découvertes concernant ces personnes et leurs activités et sur d'éventuelles attaques à venir. Et puis on a eu les avertissements indiens. Ainsi, si on met A et B ensemble, c’était clair qu’ils étaient au courant. Alors pourquoi n'ont-ils pas empêché l’attentat ?
Quel avantage les autorités sri-lankaises avaient-elles à ne pas informer leur population qu’un attentat pouvait se produire ?
Le rapport de la Commission parlementaire spéciale évoque la possibilité que les autorités n’aient pas voulu rendre publics ces renseignements par peur de causer le chaos dans le pays, et qu’un candidat aux élections avait tout à gagner à promettre la stabilité et la sécurité aux citoyens.
Ce candidat aux élections est l’actuel président du Sri Lanka ?
Mettez A et B ensemble et tirez vos conclusions.
Que demandez-vous ?
Nous voulons vivre la vérité. Nous voulons la mise en œuvre du rapport de la Commission. Sur certaines questions, la Commission recommande une enquête plus approfondie, et nous voulons des enquêtes plus approfondies pour ces questions. Si on ne peut pas faire cela, nous n’avons d’autre choix que de nous adresser à la communauté internationale. Il nous reste très peu d’options.