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RSA : les fausses bonnes idées

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Véronique Fayet - publié le 02/04/22
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Pour l’ancienne présidente du Secours catholique, assortir le versement du RSA d’une activité d’insertion obligatoire est une idée indécente. Cette contrainte ne fera qu’entretenir la précarité.

Dans une belle unanimité, Valérie Pécresse et Emmanuel Macron veulent reformer le revenu social d’activité (RSA) et imposer au moins 15 heures par semaine d’activité d’insertion. Une idée populaire puisque huit Français sur dix y seraient plutôt favorables. Surtout une idée très populiste ! Une fausse bonne idée totalement irréaliste qui méprise la réalité de vie des bénéficiaires du RSA et fait fi de la capacité des associations ou municipalités à inventer ces milliers d’heure de « bénévolat obligatoire » (un bel oxymore !), ou de « travail d’intérêt collectif » (le « travail d’intérêt général » étant réservé à des peines alternatives à la prison). 

La réalité du RSA

À vrai dire, personne ne sait comment nommer ces heures d’activité. Et pourtant, les emplois aidés ont fait leur preuve depuis les années soixante-dix : ils donnent un vrai travail (20 heures par semaine au moins) avec un vrai salaire. On pourrait, bien sûr, améliorer ce système et les passerelles vers le marché du travail, mais il est déjà très apprécié des personnes car « avoir un salaire, explique Fulbert, même petit, c’est une fierté » ! « Avec le RSA, on ne vit pas, on survit ; on a la peur au ventre » disent souvent les bénéficiaires. Gisèle, par exemple, qui a 50 ans et vit à la campagne, perçoit 1.085 euros de RSA pour quatre personnes. « Le travail, c’est pas facile, dit-elle. Je n'ai pas le permis donc c’est mon mari qui m’emmène, mais s’il a du boulot, je suis coincée. Et puis on a tous les deux des soucis de santé... Souvent, le 15 du mois, on n’a plus rien. Et c’est de pire en pire, car tout augmente : la nourriture, l’essence, les loyers. » 

C’est cela la réalité du RSA : une majorité de bénéficiaires qui se battent pour trouver quelques heures de travail par ci par là, toujours précaires, souvent au noir.

Oui, c’est cela la réalité du RSA, celle que je connais en tous cas personnellement : une majorité de bénéficiaires qui se battent pour trouver quelques heures de travail par ci par là, toujours précaires, souvent au noir. Tous disent qu’ils veulent être protégés des aléas de la vie, mais qu’ils veulent aussi contribuer à la société, se sentir utiles et considérés. Être toujours jugés et montrés du doigt, considérés comme des fainéants et des profiteurs est très humiliant. Et pourtant ils sont nombreux à être engagés au service du bien commun dans leur voisinage, dans des associations ou comme aidant familial. Mais leur contribution n’est jamais reconnue.

Un revenu digne

Si on écoute les bénéficiaires du RSA et tous ceux qui les accompagnent et les connaissent, il faut assurer un revenu minimum garanti décent, qui leur permette de se sentir en sécurité pour faire des projets et s’engager, par exemple, dans une formation qualifiante. Ce revenu doit absolument atteindre d’ici la fin du quinquennat 40% du revenu médian, considéré comme le seuil de grande pauvreté (soit 735 euros pour une personne seule, au lieu de 575 euros aujourd’hui). Selon Esther Duflo, prix Nobel d’économie, un revenu digne est un investissement social et si l’accompagnement social et professionnel est intense — ce qui n’est pas le cas aujourd’hui où beaucoup de bénéficiaires sont livrés à eux-mêmes — le retour à l’emploi peut être rapide. La vraie bonne idée c’est donc un revenu digne ET un accompagnement humain renforcé qui organise avec le bénéficiaire, principal acteur de son projet, les étapes vers une insertion choisie et à la mesure de ses capacités.

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