Depuis des siècles, la dévotion orthodoxe à Marie, "la Très Pure", est intense. Dans ses hymnes, l’Eglise orthodoxe proclame la Vierge comme "bienheureuse et très pure, toute immaculée Mère de Dieu", "plus vénérable que les chérubins et incomparablement plus glorieuse que les séraphins". Comme les catholiques, les chrétiens grecs-orthodoxes "voient en Marie la Reine des Cieux, une mère et une protectrice puissante ; ils l’honorent, ils l’aiment et l’invoquent", souligne Mgr Dominique Le Tourneau dans son Dictionnaire encyclopédique de Marie.
Un titre marial
La Russie et l’Ukraine peuvent toutes deux se targuer de porter un titre marial. Elles ne sont pas les seules, c’est aussi le cas de la France ("Royaume de Marie"), de la Colombie ("terre de la Vierge, jardin marial"), de Ceylan ("Notre-Dame-de-Lanka") et de l’Ouganda ("Règne de Marie") mais cela reste un rare privilège. Ainsi, la Russie bénéficie du titre d’"Apanage alloué à la Mère de Dieu". En outre, le tsar Nicolas II, qui avait une très grande dévotion envers la Mère de Dieu, aurait confié la Russie à "Marie souveraine de la Russie", le jour de son abdication, le 2 mars 1917.
Quant à l’Ukraine, elle a été qualifiée par le pape Jean Paul II de "terre mariale" lors de son voyage apostolique en 2001. En effet, elle a vu germer, avec le baptême de Vladimir le Grand, une longue tradition chrétienne, particulièrement attachée à la Vierge Marie. Son fils, Jaroslav le Sage, proclame la Vierge reine du peuple ukrainien en 1037, ce qui fait de lui le premier souverain occidental à consacrer son peuple à Marie.
Une profonde dévotion envers Marie
Chez les orthodoxes, un culte particulier est voué à Marie en tant que Mère de Dieu (Théotokos). En attestent les icônes mariales, représentant Marie tenant dans ses bras l’Enfant-Dieu. Si les orthodoxes la qualifient de "très pure", ils ne reconnaissent pas pour autant le dogme de l’Immaculée conception. Les catholiques croient que Marie est immaculée dès sa conception. Les orthodoxes sont d’accord pour dire qu’elle est sans péché (ils la qualifient de "toute pure", "toute glorieuse", "toute immaculée"), mais seulement depuis le moment où elle a dit oui à l’ange Gabriel. Avant cela, Marie fait partie du genre humain, pêcheur, elle a été conçue et mise au monde de manière naturelle. L’Eglise orthodoxe croit que Marie a dû lutter, jusqu'à la conception du Sauveur, pour être sans péché personnel. Le caractère immaculé de la Vierge, pour les orthodoxes, ne vient donc pas d'une exemption du péché de ses parents, mais de sa lutte et de sa victoire sur le mal.
Des églises et des sanctuaires dédiés à Marie
Preuve de la dévotion mariale en Russie et en Ukraine : les sanctuaires et les églises dédiées à la Vierge. En Russie se trouvent de nombreuses églises dont les noms font référence au culte de Marie : église de la Dormition, de l’Assomption, de la Nativité de la Mère de Dieu, ou encore de l’Intercession de la Mère de Dieu. En Ukraine, parmi les nombreux sanctuaires, il en est un, dédié à Marie Mère de Dieu, qui attire de nombreux pèlerins. Il s’agit du sanctuaire de Zarvanytsia, de rite gréco-catholique, situé dans la région de Ternopil, dans l’ouest de l’Ukraine et surnommé "la Lourdes de l’Ukraine", sans doute en raison de sa source miraculeuse.
Des apparitions de la Vierge
La Vierge serait apparue à plusieurs endroits en Russie, à Altaï (Sibérie), Guerboviets, Igritsa, Slovetsky… L’apparition la plus connue est celle de Kolomenskoïe, près de Moscou, où Marie est apparue en songe à Eudoxia Adrianova dans la nuit du 13 février 1917, en pleine révolution russe, pour lui indiquer où se trouvait cachée une icône de la Vierge. "Il y a à Kolomenskoïe une grande icône noire. Il faut la prendre, la nettoyer et que le peuple la prie", lui aurait soufflé Marie. L'icône miraculeuse devint célèbre et Kolomenskoïe devint un lieu de pèlerinage important.
En Ukraine aussi, la Vierge apparaît en divers lieux, comme à Grouchiv, en Galicie, au XVIIe. Un saule y fut planté en souvenir. Un siècle plus tard, une source jaillit au pied de l’arbre et provoqua des guérisons miraculeuses. En 1806, Stepan Chapowskyj peignit une icône de la Vierge et les villageois la fixèrent sur l’arbre. Ce dernier devint un lieu de pèlerinage. En 1856, la Vierge est vénérée pour avoir stopper une épidémie de choléra. Le 26 avril 1987, elle serait de nouveau apparue au même endroit à une fillette de 11 ans, Maria Kizyne.