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Assassinat du père Hamel : “Le pardon est un chemin concret”

Dominique Lebrun.

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"Ma confiance en la justice de mon pays s’est encore renforcée : j’ai le sentiment que la Cour a pris tous les moyens pour rendre la justice", confie à Aleteia Mgr Dominique Lebrun l'archevêque de Rouen. Il s'est constitué partie civile dans le procès de l'attentat de Saint-Étienne du Rouvray qui s'est achevé ce mercredi 9 mars. Entretien.

Le procès de l'attentat de Saint-Étienne du Rouvray s'est achevé ce mercredi 9 mars après plus de trois semaines d'audience. La cour d'assises spéciale de Paris a prononcé une peine de huit ans de prison contre Yassine Sebaihia, dix ans pour Farid Khelil et treize ans pour Jean-Philippe Jean Louis. "Je pense aux trois hommes qui étaient dans le box. Pour eux, le nombre d’années de prison est essentiel", souligne auprès d'Aleteia l'archevêque de Rouen, Mgr Dominique Lebrun, qui s'est constitué partie civile dans le procès."Depuis ce matin, je pense qu’ils ont compris que leur avenir était encore plus important que cela, je veux dire les choix fondamentaux qu’ils ont à faire pour leur travail, leur vie de famille, leur vie en société, leur vie spirituelle."

Aleteia : Le verdict vient de tomber : quel est votre sentiment ?
Mgr Dominique Lebrun : Le verdict est tombé. Ma confiance en la justice de mon pays s’est encore renforcée : J’ai le sentiment que la Cour a pris tous les moyens pour rendre la justice. Cela fait du bien. Je pense aux trois hommes qui étaient dans le box. Pour eux, le nombre d’années de prison est essentiel. Depuis ce matin, je pense qu’ils ont compris que leur avenir était encore plus important que cela, je veux dire les choix fondamentaux qu’ils ont à faire pour leur travail, leur vie de famille, leur vie en société, leur vie spirituelle.

Comment avez-vous vécu, en tant qu'archevêque de Rouen et partie civile, ces trois semaines de procès ?
J’ai vécu une grande plongée dans le monde du djihadisme, dans cette partie de l’humanité qui est prise dans une idéologie politico-religieuse mortifère. J’ai eu parfois la nausée. Mais, petit à petit, grâce à la messe quotidienne qui me reliait à cette messe de semaine au cours de laquelle le père Jacques Hamel a été tué, grâce aux témoignages de sa famille, de Guy Coponet et de ses enfants, le navire qui porte haute les couleurs de l’amour et du pardon a manifesté sa solidité, mieux sa vérité et sa beauté. Aujourd’hui, le pardon n’est plus seulement un horizon, il est un chemin concret que je partage avec tous ceux qui sont liés par cet attentat horrible du 26 juillet Saint-Étienne du Rouvray.

Les témoignages des victimes partie civile sont hors concours, si j’ose dire. Elles sont rejointes aujourd’hui par "les derniers mots" des trois accusés.

Je n’oublierai pas non plus qu’il y a eu aussi la fréquentation de l’institution judiciaire pendant plus de trois semaines. Nous pouvons en être fiers. Elle est vraiment au service de la vérité si difficile à atteindre quand il faut juger la personne humaine. Je pense que je vivrai différemment le procès de Jésus et la question de Pilate : "Qu’est-ce que la vérité ?".

Quels ont été pour vous les moments particulièrement forts ?
 Presque chaque jour m’a fait vivre un ou plusieurs temps forts. Les témoignages des victimes partie civile sont hors concours, si j’ose dire. Elles sont rejointes aujourd’hui par "les derniers mots" des trois accusés. Chacun d’entre eux leur a répondu d’une manière qui nous a beaucoup touchés. Ils reconnaissent tous qu’ils ont des choix de vie nouveaux à faire. Je ne peux pas m’empêcher de penser qu’ils ont fait le choix du "bon larron", quand l’un dit qu’il n’a pas droit de se plaindre devant Guy Coponet ou Roseline Hamel car ils savent qu’ils ont fait mal et que le père Jacques Hamel n’a rien fait de mal. Ils ont remercié avec des accents de vérité d’avoir entendu et vu que nous croyons à leur nouvelle vie possible.

Restons ou devenons humbles : c’est aussi le chemin du père Jacques Hamel.

Et maintenant ?
Il me faut d’abord digérer ces trois semaines, et les méditer. À nouveau, j’ai entendu avec toujours la même colère que des hommes et des femmes ont perverti la religion en prétendant tuer au nom de Dieu, en séparant l’humanité entre les bons musulmans et les "kouffars", inférieurs. Comment ne pas m’interroger : ma communauté et moi-même sommes-nous fidèles à notre Dieu de paix, de justice et d’amour ? Dimanche 20 mars prochain, il y aura la journée de mémoire des abus commis au sein de l’Église. Restons ou devenons humbles : c’est aussi le chemin du père Jacques Hamel. J’espère et j’imagine que la communauté musulmane et ses autorités s’interrogent aussi sur l’authenticité de ce qu’ils vivent.

Vous aviez indiqué lors de la conférence de presse à Saint-Étienne-du-Rouvray début février que "c'est cette justice qui permettra d'avancer sur le chemin de la vérité". Avec la fin de ce procès et ce verdict, estimez-vous que la justice a été rendue et que nous avons tous progressé sur le chemin de la vérité ?
La justice est rendue. Elle a discerné le bien du mal autant que possible, elle a jugé et a dû condamner pour le bien de la société, pour celui des hommes présents dans le box. Reste présente à ma foi la justice de Dieu. Elle discerne à coup sûr le bien du mal et, surtout, elle poursuit le cœur de l’homme jusqu’à ce qu’il revienne au bien, jusqu’à ce qu’il revienne à sa source d’amour, jusqu’à ce qu’il revienne à Lui, Dieu, vrai Dieu, le miséricordieux.

Propos recueillis par Agnès Pinard Legry

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