Au lendemain de l’excommunication par Jean Paul II de Mgr Lefebvre II qui avait ordonné sans son aval quatre évêques, le Saint-Siège avait mis en place en 1988 la commission pontificale Ecclesia Dei, afin de conserver un lien avec les communautés qui souhaitaient continuer à dire la messe selon le missel de saint Pie V sans rompre avec Rome. C’est à travers cette structure romaine que beaucoup d’instituts ont obtenu un droit particulier pour dire, le plus souvent exclusivement, la messe de 1962.
La spécificité du canon 20
Or depuis la publication en juillet 2021 de Traditiones custodes, le motu proprio qui limite et encadre strictement l’usage du missel préconciliaire, les instituts traditionnels étaient partagés entre incompréhension et peur de ne plus pouvoir poursuivre leur mission. En effet, la limitation de la célébration de la messe en forme extraordinaire du rite les concernait d’autant plus que celle-ci fait partie du charisme de leurs communautés. Sauf qu’un canon du droit de l’Église leur donnait un espoir. En effet, le canon 20 dispose qu’ "Une loi nouvelle abroge la précédente ou y déroge, si elle le déclare expressément, si elle lui est directement contraire ou si elle réorganise entièrement la matière ; mais une loi universelle ne déroge en aucune manière au droit particulier ou spécial, sauf autre disposition expresse du droit."
En d’autres termes, ce canon 20 pouvait s'interpréter de la façon suivante : Traditiones custodes introduit certes une loi nouvelle qui abroge les précédentes dispositions du Saint-Siège sur le sujet, en l’occurrence le motu proprio Summorum pontificorum de 2007, mais la règle ayant pour but la sanctification de l’âme des fidèles, il lui faut donc être le plus proche possible des chrétiens. C’est dans cet esprit que les droits particuliers et spéciaux demeurent quand la loi universelle change. Est-ce que cela ne concerne pas directement les instituts ?
La FSSP réaffirmée dans sa mission
Conscient de cela, le pape François, après avoir écouté deux prêtres de la Fraternité Saint-Pierre venus à Rome lui dire leurs doutes et leur volonté de continuer à dire la messe pour laquelle ils ont été ordonnés, a réaffirmé, dans un décret du 11 février signé de sa main, la possibilité d’user de tous les livres liturgiques préconciliaires, conformément à leurs statuts approuvés par le Saint-Siège. Si cette décision constitue un signe d’apaisement entre le pape François et la Fraternité Saint-Pierre, elle ouvre aussi une perspective pour toutes les communautés traditionnelles attachées à la messe du missel de 1962. Elles vont pouvoir faire valoir cette interprétation et de Traditiones custodes et du droit pour continuer d’apporter leur part à la mission de l’Église avec leur charisme propre.