Dans ma paroisse, après avoir passé toute l’année qui lui était dédiée devant l’autel, la statue de saint Joseph a repris sa place habituelle. Plus cachée, plus discrète, mais toujours près du chœur. À l’image de celui dont elle se fait image : la présence humble. Juste à sa place, et à sa juste place. Dans toute sa force. Cette année aura été l’occasion de méditer de belles pensées sur cette figure de père et d’époux. À commencer par la Lettre apostolique du pape François, Patris corde. Ce texte, Avec un cœur de père, nous fait entrer dans la beauté de la paternité et de la conjugalité. Modèle de tendresse, d’obéissance et d’accueil, Joseph ne comprend pas tout des événements qui adviennent dans leur vie. Mais il est là, solide et doux. À l’écoute. Debout. Il incarne cette noblesse de cœur que, chacun en 2021, quoi qu’on en dise, admire encore quand il l’entrevoit chez quelqu’un. D’autres merveilleux textes sur saint Joseph, sur l’homme et le père ont fleuri dans nos librairies cette année, à commencer par les délicieux et percutants livres de Fabrice Hadjadj et de Martin Steffens, pour ne citer qu’eux.
Le père vaporisé
Et pourtant. Cette année n’aura-t-elle pas été douloureuse à vivre pour les pères ? Que n’ont-ils trop souvent entendu ? Qu’ils ne comptent pour rien. Au plus haut sommet de l’État, que d’absurdités il nous aura fallu supporter. "Un père cela peut être une grand-mère, un voisin…" Une loi rédigée par quelques-uns, votée par quelques-uns, pour quelques-uns, mais au nom de tous prétend vaporiser le père. Le réduisant à la plus petite cellule de son corps : son spermatozoïde. Le considérant, au pire, comme simple donneur de "matériel génétique". Au mieux, comme quelques données, consultables à la majorité par ceux qui, de lui, seront nés.
Cette loi, ouvrant l’accès à la procréation artificielle aux femmes seules ou en couples de femmes, consacre, de fait, l’inutilité du père dans le sens où elle dit, et c’est donc valable pour toute la société : un père, ça ne sert à rien, puisque la loi décide par avance que certains n’en ont pas besoin. Les défenseurs de ce droit l’affirment sans sourciller : l’enfant ne souffrira nullement de l’absence de père, car peut-on souffrir du manque de ce qu'on n'a jamais eu ? Un aveugle ne serait donc pas autorisé à souffrir d’un manque, la vue, s’il ne l’a jamais eu ?
Les parents, une importance cruciale
Il y a des pères absents, lâches, infidèles et même violents. Éteints, parfois aussi, "à quoi bon", quand leur rôle n’est plus reconnu ? Les difficultés générées par une éducation délétère ou des parents défaillants poursuivent parfois toute la vie, combien d’adultes en thérapie à cause d’une blessure liée à l’un des parents ? C’est bien la preuve, par la négative malheureusement, que les parents sont d’une importance cruciale dans la vie de chacun. Dans notre société liquide, où "être fluide" serait plus épanouissant qu’être soi, c’est désormais de son nom de famille qu’on pourrait facilement se dévêtir.
Nous ne sommes pas des électrons libres, sans histoire ni racines.
On ne peut ignorer la souffrance de porter le nom d’un père ou d’une mère qu’on préfère oublier. Mais pouvoir changer de nom comme de chemise, n’est-ce pas le risque que notre société, encore plus, ne se fragilise ? Nous ne sommes pas des électrons libres, sans histoire ni racines. S’en amputer ne fait pas forcément disparaître le mal que parfois, l’une ou l’autre, font. Pas aussi bien peut-être que ne le ferait d’apprendre à vivre avec cette réalité que, même si elles sont ma raison d’être là, elles ne résument pas ma raison d’être.
Pourvu que 2022 valorise moins les féministes hystériques qui veulent "tuer l’homme", tout en se rêvant être un homme comme les autres, agissant comme ceux qu’elles exècrent… Mais valorise plus de beaux exemples, pour ne pas dire une brillante exemplarité. Comme l’écrit le Saint-Père, "aujourd’hui, en ce monde où la violence psychologique, verbale et physique envers la femme est patente, Joseph se présente comme une figure d’homme respectueux, délicat qui, sans même avoir l’information complète, opte pour la renommée, la dignité et la vie de Marie".
Ce dont notre société a besoin
Ce qui ferait du bien à notre société, c’est d’être élevée, tirée vers le haut. Qu’on nous partage de beaux modèles de paternité, de maternité, de familles unies qui tiennent leur bonheur à bout de bras, malgré les épreuves et les combats. Les bons pères sont légion. J’en connais plein, autour de moi. Ce dont notre société a besoin, ce n’est pas d’une écriture qui n’a d’inclusif que le nom, mais d’hommes et de pères.
De virilité et de féminité. De protecteurs et de forces d’âmes. De fidélité, de courage et de sainteté. De galanterie. De tout ce qui conduit avec droiture sur le chemin de la vie. Pour s’émerveiller et se laisser enseigner, vivra toujours celle qu’on fêtait ce dimanche après Noël : la Sainte Famille.