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La plus grande souffrance des pauvres ? Être dépendant

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Distribution de petits-déjeuners à des sans-abri, Toulouse.

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Véronique Fayet - publié le 16/10/21
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À l’occasion de la Journée mondiale du refus de la misère, Véronique Fayet, ancienne présidente du Secours catholique, attire l’attention sur la plus grande souffrance des personnes pauvres : se sentir dépendant.

Ce dimanche 17 octobre est la Journée mondiale du refus de la misère ! Cette journée reconnue par les Nations unies depuis 1992, à la demande du mouvement ATD-Quart Monde, veut signifier qu’il faut refuser la fatalité de la misère, que la misère peut être vaincue et éradiquée si nous le décidons. Le père Joseph Wresinski disait en effet : "La misère est l’œuvre des hommes, seuls les hommes peuvent la détruire."

Il y a deux ans s’achevait une recherche internationale pilotée par l’université d’Oxford dans six pays (Bolivie, Tanzanie, Bangladesh, Royaume-Uni, France et États-Unis) sur les dimensions de la pauvreté ; cette recherche participative associait les personnes pauvres en tant que co-chercheuses, à égalité avec les universitaires et les professionnels. En France, ce fut ATD-Quart Monde, le Centre socio-culturel de Poitiers et le Secours catholique, sous la direction d’Elena Lasida, enseignante-chercheuse de l’Institut catholique de Paris, qui ont mené l’enquête pendant trois années pour comprendre, analyser les diverses dimensions de la pauvreté. Nous le savons bien dans les associations, la pauvreté n’est pas qu’une affaire de revenu monétaire. Mais qu’est ce qui fait qu’on est pauvre ? Qu’est ce qui fait qu’on se sent pauvre ? 

Les résultats sont surprenants pour ceux qui n’ont pas l’habitude de dialoguer avec des personnes pauvres et surtout, ils sont les mêmes d’un pays à l’autre, que l’on soit pauvre dans un pays riche comme la France ou les États-Unis, ou pauvre dans un pays très pauvre comme la Tanzanie. 

L’étude met en avant, tout d’abord, l’interdépendance de toutes les dimensions et la nécessité de prendre en compte l’ensemble des paramètres simultanément car tout est lié ! Sans travail il est difficile de se loger, de se nourrir correctement, ou de se soigner. À l’inverse, une mauvaise santé, l’absence de formation ou de logement peuvent empêcher d’accéder à un travail digne. Mais la plus grande souffrance est de se sentir dépendant des autres, des personnes, associations ou institutions qui décident à votre place de ce qui est bon pour vous. Ce sentiment d’inutilité, le regard de la société, lourd de préjugés, et parfois la violence des institutions sont ressentis très douloureusement. Et ceci dans tous les pays, donnant à cette étude une vraie portée universelle. 

Il faut insister sur ce point crucial car on est souvent tenté de penser la pauvreté en termes de revenus et moi-même, je n’ai pas échappé à ce piège en demandant par exemple, à temps et à contretemps, au nom du Secours catholique et de toutes les associations, une augmentation des minimas sociaux. Bien sûr que c’est nécessaire et urgent, mais rien ne sera résolu tant que les personnes qui vivent la pauvreté et la privation d’emploi sentent qu’elles sont dépossédées de leur pouvoir d’agir sur leur propre vie et celle de leurs enfants, qu’elles doivent subir les décisions prises à leur place et bien sûr « pour leur bien » ! 

Rien ne changera tant que les personnes confrontées à la pauvreté ne seront pas associées à l’élaboration des politiques les concernant. Alors qu’elles font preuve d’un courage et d’une intelligence incroyables pour résister et survivre dans des conditions très difficiles, leur pensée est comptée pour rien, leurs savoirs et leurs expériences sont méprisées. En plus d’être une grande souffrance pour elles-mêmes, c’est aussi un immense gâchis social et humain pour la société qui se prive de talents et d’intelligences. Oui ! Il est possible d’éradiquer la misère, si nous le décidons et si nous nous mettons à l’écoute de ceux qui la vivent, vraiment à l’écoute !

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