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Et si le rapport Sauvé nous aidait à mieux confesser ?

confession
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Bruno Valentin - publié le 11/10/21
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La levée du secret de la confession fait partie des recommandations phares de la commission Sauvé sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase). Mgr Bruno Valentin, évêque auxiliaire de Versailles, y voit plutôt l’occasion d’inscrire la confession dans une pratique mieux balisée. Il s’en explique pour Aleteia.

Dans les semaines et les mois qui viennent, il nous faut lire le rapport Sauvé. Le lire vraiment, le lire complètement, pour qu’il nourrisse l’important travail de réforme dont l’Église a besoin, et qu’il ne serve pas seulement à caler l’armoire de nos préjugés. Avant même que ce travail de lecture ait vraiment commencé, un des éléments du rapport a déclenché de vives polémiques. Il s’agit de l’affirmation reprise deux fois, dans les propositions n. 8 et n. 43, que « le secret de la confession ne peut déroger à l’obligation, prévue par le code pénal et conforme, selon la commission, à l’obligation de droit divin naturel de protection de la vie et de la dignité de la personne, de signaler aux autorités judiciaires et administratives les cas de violences sexuelles infligées à un mineur ou à une personne vulnérable ». Dans un alinéa précédent de cette même proposition n. 8, la Ciase rappelle « que le secret de la confession s’inscrit dans le seul temps du sacrement de pénitence ». Ces deux éléments, tenus ensemble, pourraient bien indiquer la juste direction pour avancer, qui n’est pas tant la remise en cause du secret lui-même, que celle de notre pratique de la confession.

Un constat, tout d’abord, s’impose : des sept sacrements, la confession est certainement celui pour la célébration duquel nous prenons le plus facilement des libertés avec les prescriptions de son rituel. Comme la messe, la confession est une liturgie réglée par un rituel, qui prévoit par exemple une lecture de la Parole de Dieu, même dans le cadre d’une confession individuelle. Qui peut dire que ce point, comme d’autres, fait effectivement partie de sa pratique ordinaire de pénitent comme de confesseur ? Nos libertés prises avec le rituel ne sont sans doute pas sans rapport avec le fait d’aboutir à des pratiques qui brouillent largement les contours spécifiques de ce sacrement, et tendent davantage vers des entretiens spirituels, voire psycho-spirituels, scellant du même coup la totalité des propos échangés sous le sceau d’un secret absolu. Celui qui a déjà eu l’occasion de se confesser dans un grand sanctuaire italien, polonais ou portugais par exemple, mesurera tout l’écart de nos mises en œuvre de la confession avec leurs pratiques concises et ritualisées parfois jusqu’au formalisme. N’avons-nous pas, quant à nous, tendance à verser dans l’excès inverse ?

Dans le détail, bien des éléments de notre pastorale de la confession, et de la manière dont nous initions les jeunes, nourrissent ce flou. À titre d’exemple seulement, citons la durée de la rencontre : il n’est pas rare de voir des prêtres rester quinze, vingt minutes ou plus à « confesser » un même pénitent ; autre exemple avec les examens de conscience proposés notamment aux enfants et adolescents qui euphémisent le péché en invitant à « confier ce qui est lourd, ce qui te pèse » plutôt que « ce que tu as fait de mal ». Le cadre et l’espace dans lesquels nous confessons ne sont pas non plus sans incidence sur le contenu et le déroulement de l’échange.

Une voie de réponse à l’interpellation de la société et des pouvoirs publics, en écho au rapport Sauvé, serait donc de modifier nos pratiques, en délimitant plus clairement le sacrement de réconciliation dans son objet propre, et en l’inscrivant dans un chemin de parole mieux balisé : dans le cas d’un entretien de quinze ou vingt minutes, surtout avec un jeune, la confession au sens propre ne demande pas plus que quelques minutes. Le reste relève de l’entretien pastoral destiné à préparer, ou à prolonger le sacrement, couvert à ce titre par le secret de l’accompagnement spirituel, et non par celui de la confession. Si le droit français ne distingue pas franchement les deux, considérés comme un même secret professionnel, nous savons, nous, toute la différence au plan canonique et théologique : le secret de confession appartient à Dieu seul, et ne peut en aucun cas être levé par le confesseur, même pas à la demande du pénitent lui-même. À l’inverse, le secret de l’accompagnement spirituel appartient à la personne accompagnée : elle a toute liberté de demander, ou d’autoriser, son accompagnateur à en sortir.

Dans la préparation comme dans le déroulement des rencontres pénitentielles, il convient donc de séquencer plus clairement le temps, en respectant davantage le caractère liturgique de la célébration du sacrement, et en ritualisant de manière visible les étapes : une bougie que l’on allume ou que l’on éteint, une étole que l’on passe pour le seul moment de la confession, etc. Sans doute faut-il surtout que le pénitent soit conduit plus progressivement du terrain du « ce que j’ai fait de mal » au terrain du « ce que je porte de lourd », dans un sens ou dans l’autre, ne serait-ce que pour l’aider à distinguer pour lui-même le mal dont il est victime, du mal dont il est coupable. Si l’on considère que cette distinction demande du temps, alors le moment de confession devrait être situé au terme du chemin, plutôt qu’au début.

« La commission a cherché à contribuer au travail de vérité. C’est à l’Église de s’en emparer et de le poursuivre, afin de retrouver la confiance des chrétiens et le respect de la société française dans laquelle elle a tout son rôle à jouer. Il est impératif de rétablir une alliance qui a été durement mise à mal. » En concluant ainsi l’avant-propos de son rapport, M. Jean-Marc Sauvé formule avec justesse le défi que nous devons désormais relever ensemble : chercher une plus grande vérité de nos pratiques comme de nos discours, en nous laissant guider par l’Esprit vers la « Vérité tout entière » (cf. Jn 16, 13).

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