Qui n’a pas ressenti le vide en priant ? Qui n’a pas connu cette sensation d’être coincé dans l’ennui et d'attendre un Dieu qui ne vient pas ? Qui ne s’est pas surpris à se dire finalement "À quoi bon ? La prière n’est pas pour moi, je ne suis pas fait pour prier". Si on lit les récits de certains grands moines, on se rend compte que personne n’échappe à l'expérience de l'ennui et du vide pendant la prière. Pire encore : celle d’une "sécheresse spirituelle" qui peut durer des années. Même les saints en témoignent ! Thérèse d’Avila, grande mystique espagnole du XVIe siècle qui en a fait une très longue expérience, raconte que parfois lors de l’oraison, elle ne savait avoir "aucune pensée fixe et arrêtée, ni de Dieu ni d’aucun bien". D’ailleurs, un jour, elle s’ennuyait tellement pendant la prière qu’elle s’est surprise à compter les clous sur la chaussure de la religieuse qui priait juste à côté d’elle. Rien de grave bien sûr, mais comment comprendre cet ennui si lassant et surtout comment ne pas être tenté de tout abandonner ? Voici trois conseils de sainte Thérèse d’Avila.
1Accepter de s’ennuyer devant Dieu
Pour la mystique espagnole la prière consiste parfois à… s'ennuyer tout simplement devant Dieu. "Il m’arrive d’avoir beaucoup de mal à prier. Pour ne pas vagabonder et tomber dans l’ennui, j’ai besoin de fixer mon regard sur une icône. C’est essentiel de savoir que m’adresse à quelqu’un qui, en plus, m’aime ! On ne se lance jamais seul dans la prière ! Il ne faut donc pas s’affoler. Car si on accepte de s’ennuyer devant Lui, si on le laisse faire, alors Il peut agir", confie à Aleteia Stéphanie Sassi, membre du Carmel séculier (OCDS) depuis vingt ans, coach en orientation scolaire et mère de trois enfants.
Ainsi, sans rien attendre, on met alors toute son espérance dans la grâce de Dieu. Cette expérience de l’impuissance appartient à Dieu, même quand elle se traduit par l’ennui ! Car tout ce qu’on vit, appartient à Dieu. Si la prière est un combat parfois, son ultime but est toujours la remise de son existence entre les mains de Dieu, qui est un Père qui aime infiniment. "Prier, ce n’est pas beaucoup penser, mais beaucoup aimer", dirait sainte Thérèse d’Avila.
2Lui répéter un seul mot
L’ennui dans la prière peut venir d'une simple fatigue, d'un mauvais choix du moment, d'un travail stressant. Lorsque cette réelle lassitude dans la prière se laisse trop ressentir, le plus simple est de répéter un seul mot, comme "Jésus", ou une phrase : "Je t'aime, Seigneur, et je sais que tu m'aimes aussi", ou juste réfléchir à cette phrase "Notre père qui es aux cieux". La mystique espagnole explique que c’est une façon propice à fixer les pensées, et à "aider l’âme à se recueillir". Car on n’a pas "besoin d’ailes pour aller chercher Dieu", il suffit que l’âme se mette à regarder au-dedans d’elle-même "pour y trouver un si bon hôte". Thérèse d’Avila invite à Le chercher en son âme, à entrer en relation d’amitié avec Lui.
L’ennui peut être une occasion d'apprendre à écouter le silence de Dieu. Il faut juste Lui permettre d’atteindre les profondeurs de son âme, là où les distractions n’entrent pas, où le vide, l’ennui, le sensible n’ont pas accès. Ce ne sont pas ces distractions qui vont empêcher Dieu de transformer notre âme. La relation d’amitié avec Dieu est première, la prière est avant tout un mouvement du cœur.
3Rester fidèle au rendez-vous
Pour sainte Thérèse d’Avila, l’oraison permet de passer d’une approche utilitaire envers Dieu à une approche d’amitié. Pour cela, il est important de rester un ami fidèle en fixant un rendez-vous avec Lui chaque jour. Un rendez-vous que Stéphanie Sassi honore chaque matin entre 6h et 7h avant que commence le marathon quotidien : "Je prie devant mon petit oratoire installé sur la cheminée du salon avec, au centre, l’icône de la Sainte Famille. J’allume la bougie, je prie souvent les textes de la messe, l’Évangile du jour, puis je fais silence", confie-t-elle en avouant que même dans les moments de désespoir, elle n’a jamais loupé ce tête-à-tête avec Dieu. "Pendant la période de grandes épreuves personnelles où j’étais "toute cassée", j’étais quand même présente. C’était vital pour moi d’offrir ainsi à Dieu mon plus intime et mon plus misérable. En faisant cet acte d’offrande et de foi, je sais que Lui permettais d’agir en moi.
Je crois profondément que Dieu a besoin de ces moments d’humilité pour nous manifester sa miséricorde. Il a besoin des "pauvres" pour étendre son amour dans le monde. C’est un acte qui sauve le monde", souligne-elle. Dans une vie bien remplie, parfois secouée par des crises ou des soucis quotidiens, la fidélité peut être un véritable défi. Mais n’est-il plus que vital de laisser entrer Dieu dans notre intériorité la plus intime et la plus pauvre ? La réponse semble lumineuse : "Le ciel n’est-il pas à l’intérieur de nous-mêmes, puisque le Seigneur est en nous ?, se demandait sainte Thérèse d’Avila.