Le récit de l’effroyable révolte des Juifs contre la présence romaine en Judée à partir de 66 ap. J.C nous est parvenu grâce à l’œuvre de l’historien juif Flavius Josèphe, témoin privilégié de ces temps troublés puisqu’il y est lui-même mêlé, à la fois comme acteur et comme spectateur. Les récentes découvertes archéologiques viennent d’ailleurs corroborer sa narration des évènements dont le sommet est sans nul doute la destruction du Temple de Jérusalem, en septembre 70.
Depuis la conquête de la Palestine, les Romains utilisent souvent les princes locaux pour gouverner la Judée. Cependant, les tensions sont toujours palpables, et l’hostilité des Juifs face aux conquérants augmente avec le temps. En 66, plusieurs incidents mettent le feu aux poudres : l’exécution d’un sacrifice païen devant l’entrée d’une synagogue un jour de sabbat et le détournement d’une forte somme d’argent destinée au Temple convainquent les Juifs de rompre avec Rome. La révolte s’étend dans toute la Judée et la Galilée. Les historiens la considèrent souvent comme une guerre d’indépendance, car les autorités traditionnelles se rallient rapidement aux insurgés. Cependant, les Romains réagissent avec vigueur et reprennent progressivement le contrôle d’une partie des territoires.
Au printemps 70, le général romain et futur empereur Titus met le siège devant Jérusalem. La ville est particulièrement peuplée à cette période de l’année car beaucoup de Juifs de l’extérieur y sont venus pour fêter la Pâque. Jérusalem fait à l’époque sept kilomètres de circonférence. Bâtie sur deux collines, elle est entourée de ravins et protégée par trois séries de remparts. Le Temple vient juste d’être entièrement rénové et massivement agrandi afin d’accueillir le nombre toujours grandissant de pèlerins.
Une immense esplanade, des portiques, des autels, des bassins d’ablution et un énorme mur de soutènement viennent enrichir la construction initiale. À cette époque, le Temple domine la ville de Jérusalem et couvre 15 hectares. Il est entouré d’une muraille large de six mètres, et il est richement orné de colonnes de marbre, de décorations d’or et de cuivre. Il contient en outre de très nombreuses richesses, offrandes des fidèles, qui exacerbent la convoitise des Romains.
Les Hébreux combattent avec pugnacité et une opiniâtreté peu commune. Cependant, ils sont rapidement affaiblis par la famine qui s’installe et aussi par les violentes luttes intestines qui existent entre les différents courants politiques (zélotes, pharisiens, sadducéens, esséniens). Ils cèdent ainsi peu à peu du terrain, jusqu’à s’enfermer derrière l’enceinte du Temple. Le 29 août, celui-ci est aux mains des Romains qui y mettent le feu, pillent les richesses et massacrent pendant plusieurs jours sans discernement combattants, femmes, enfants, vieillards et prêtres.
La destruction du Temple ne donne pas le contrôle de la cité à Titus, et les dernières défenses de la ville haute ne sont réduites qu’un mois plus tard, le 25 septembre. Les Romains achèvent alors la destruction totale de la ville. Cette guerre judéo-romaine s’achève en 73 avec la prise de Massada, dernière place de résistance juive. Malgré la ruine engendrée par cette première guerre, une autre rébellion a lieu 60 ans plus tard, entre 132 et 135. Elle se solde à nouveau par un échec et Jérusalem est rasée une fois de plus.
Il ne reste aujourd’hui comme vestige du Temple que les murs de soutènement de l’esplanade construite au Ier siècle et les restes des arches qui permettaient l’accès à cette esplanade. Pourtant, le Temple et la ville elle-même faisaient l’admiration de tous les contemporains. On avait coutume de dire que celui qui n’avait pas vu le Temple n’avait jamais vu de bel édifice. Et plusieurs historiens romains vantaient la beauté et la richesse de Jérusalem, la considérant comme "la ville la plus renommée d’Orient" ; des merveilles aujourd’hui disparues à jamais.