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Cinéma : 9 jours à Raqqa, ou le courage des femmes après Daech

Leïla Mustapha

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Louise Alméras - publié le 07/09/21
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Xavier de Lauzanne nous avait beaucoup ému avec son documentaire Les Pépites (2016), racontant le combat d’enfants pour survivre aux abords des décharges de Phnom Penh. Avec 9 jours à Raqqa, sélectionné au festival de Cannes, il ouvre cette fois une trilogie sur la vie après Daech et nous fait partir à la rencontre de femmes d’exception.

Autrefois resplendissante, Raqqa n’est désormais plus qu’une ville fantôme depuis l’invasion de l’État islamique, en 2014, qui la proclame alors capitale du califat. Après plus de trois ans de terreur, les Forces démocratiques syriennes libèrent enfin la ville le 18 octobre 2017. Un affrontement terrible qui a laissé la ville exsangue. Un général de l’armée américaine a même déclaré qu’aucune ville n’avait reçu autant de tirs depuis Saïgon en 1975. Aujourd’hui encore, la ville n’est pas sûre car des factions dormantes de Daech sont toujours à l’affût. 

Marine de Tilly, grand reporter, est allée à la rencontre de Leïla Mustapha, élue maire de Raqqa en avril 2017. Elle a embarqué Xavier de Lauzanne dans ses valises pour immortaliser l’événement. Ils n’ont que neuf jours pour la voir. À seulement 30 ans, cette ingénieur en génie civil musulmane a pour mission de diriger la reconstruction de la ville et d’instaurer une démocratie unie autour de toutes les communautés, de la majorité arabe à la minorité kurde, en passant par les chrétiens. 

Seule femme à siéger au Conseil civil de Raqqa, dont elle est la co-présidente, c’est pourtant sur ses épaules que repose l’avenir d’une cité historique de Syrie. Mais ce qu’elle symbolise, c’est surtout l’image d’une femme forte, qu’elle revendique sans complexe aux côtés des hommes. Mais elle n’est pas seule. Une autre fille de Raqqa, qu’elle admire, s’est engagée dans les Forces démocratiques syriennes pour combattre Daech. Figure de proue d’un féminisme éclatant, Leïla Mustapha se montre aussi humble que déterminée. Son regard clair semble donner la direction aux autres : offrir un avenir digne à la Syrie et à ses femmes. Désormais, après les armes et l’horreur, la Syrie peut, grâce à elle, être associée à un visage de paix. La volonté du réalisateur est d’ailleurs de montrer des raisons d’espérer au-delà d’une actualité anxiogène.

Travaillant sans relâche, Leïla accorde quelques moments volés à la journaliste pour la rédaction de son livre hommage : La femme, la vie, la liberté. Elle raconte leur histoire. Après le départ des terroristes, pas moins de 8.000 mines sont retrouvées au cœur de la ville. Les femmes ressortent terrorisées par le régime inhumain auquel elles ont été soumises et, quant à la ville, elle est entièrement détruite. Parmi les victimes, les enfants, qui ont vu leur mère se faire tuer ou lapidée pour adultère. Les biens ont été spoliés et des têtes innocentes sont tombées, accrochées ensuite sur des piquets à la vue de tous. Malgré cette vision d’horreur, la population de 300.000 habitants reste unie et incroyablement déterminée à continuer à vivre. 

Raqqa

Le documentaire revient ainsi sur des moments clés de la guerre en Syrie et suit la reporter au fil de ses questions et de ses prises de notes. Derrière les murs délabrés et la poussière pérenne, le cinéaste parvient à capturer des instants d’émotion, de recueillement et même de joie. Ce qui étonne le plus dans ces images c’est la peur surmontée, la paix plutôt que la colère, l’envie irrépressible d’aller de l’avant. Le témoignage unique de cette femme, décidée à remonter jour après jour sa propre ville des enfers, invite indéniablement au respect, mais aussi à repenser le rôle des femmes dans le monde. 

9 jours à Raqqa, de Xavier de Lauzanne, avec Marine de Tilly et Leïla Mustapha, 89 minutes, au cinéma le 8 septembre.

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