Conrado Gimenez est biologiste de profession. Il est aujourd'hui le papa de cœur de plusieurs milliers d’enfants. Sa vie d’avant, il la passait dans les bureaux des banques pour lesquelles il a travaillé. Quand un accident de voiture a tout fait basculer. « Je sortais d’une réunion préparatoire pour un conseil d’administration. Un automobiliste m'a refusé la priorité et je me suis retrouvé projeté contre un mur. Je me souviens des pompiers qui sont arrivés pour me dégager, puis j’ai perdu connaissance », raconte l'Espagnol.
Quand il se réveille à l’hôpital, il se rend compte qu’il est dans une situation critique. « Je pensais que j’allais y passer... C’est pour ça que j’ai crié vers Dieu : “Si tu m’accordes la vie je travaillerais là où tu voudras." Sa prière est exaucée et malgré le grave accident, il est tiré d’affaire. "Après quelques mois, je suis retourné à la banque." Mais il n’y est pas revenu comme avant, quelque chose avait changé en lui. "J’ai commencé à m’engager comme volontaire auprès des religieuses de Mère Teresa. Elles visitaient, la nuit, les malades du Sida en phase terminale et les accompagnaient vers ce grand passage."
Conrado continue de se donner dans le service de son prochain jusqu’en Amérique latine.
"J’ai vécu une expérience forte au Pérou. À Lima et à Cuzco, j’étais aux côtés d’enfants de la rue qui mangeaient les déchets faute de mieux. Je leur ai donné à manger et ensemble, nous allions prier à la chapelle."
C’est là-aussi qu’il fait une expérience fondatrice : son aide peut changer la vie ne serait-ce que d’une personne. "J’ai été très touché quand j’ai vu une maman accoucher dans des conditions précaires, se rappelle-t-il. À ce moment-là, j’ai décidé que j’allais consacrer ma vie à l’entreprise la plus importante du monde : la famille".
Alors, il quitte tout, comme un saut dans l'inconnu. Sa foi s’intensifie et il prend l’habitude d’aller prier dans une chapelle de la capitale madrilène. Et pour y accéder, il traverse le parc de Casa de Campo où il croise des femmes qui se prostituent. "J’allais vers elles et nous prenions le temps de prier ensemble même si leurs clients devaient attendre, se rappelle-t-il. J’ai eu envie de les aider parce que j’ai rencontré des mères prêtes à se prostituer pour sauver leurs enfants." Il poursuit son engagement dans sont nouvel apostolat : "Une des femmes que j’ai rencontrées dans ces conditions est devenue catéchiste dans une paroisse".
Conrado Gimenez commence donc à travailler au service des femmes et des mères. Je me suis lancé seul dans ce projet fou ! Je me disais : "Si c’est une véritable folie, dans quelques mois tout sera terminé mais si c’est de Dieu, je pourrais avancer et Il pourvoira en mettant des personnes sur ma route." Il met en place une banque alimentaire dédiée aux besoins des mamans et de leurs bébés. "Une des raisons pour lesquelles les mères font le choix d’avorter c’est parce qu’elles n’ont pas l’essentiel pour vivre : lait, couches, nourriture, etc." Il commence alors à collecter les aliments et à les distribuer
L'une des premières à qui il vient en aide est une adolescente. Désespérée, elle lui a confié vouloir mettre un terme à sa vie. L'ancien cadre passe la nuit à prier. Il reçoit par la suite un mail de la demoiselle. Elle le remercie d’avoir agit comme une "marraine bonne fée". Le nom de l'ONG est tout trouvé : Madrina, marraine en espagnol.
Même si je n’avais aidé à arranger qu’une seule situation, ça aurait valu le coup.
Elle a maintenant une trentaine d’années et aide le fondateur de l’ONG Madrina. Ensemble, ils ont mis sur pied un foyer d’accueil où les mères sans possibilité de logement sont hébergées. Une trentaine de foyers de ce genre existe aujourd'hui. Depuis la fondation de son ONG en 2001, elle n’a cessé de croître. En 2020, la fondation a aidé 4.000 personnes par jour. La pandémie a aussi fait exploser les besoins. L’équipe qui distribue normalement 30 tonnes d’aliments par trimestre en a parfois distribué 20 par jour. « Ces enfants que nous avons sauvés sont le fruit de notre travail », se réjouit Conrado.
Lorsqu’il repense à son accident, à ce qui en a découlé deux décennies plus tard, Conrado Gimenez en est sûr : « Tout cela vient de la Vierge. Il aurait été impossible de survivre sans elle. C'est une œuvre d’amour au service de l'enfance, de la maternité et de la Vierge. C'est quelque chose de sacré que Dieu a mis entre mes mains... Je Lui demande de pouvoir être un instrument d'amour humble et digne entre ses mains. » Parce qu'il a remis sa vie à Dieu, Conrado peut dire aujourd'hui : « En 20 ans, nous avons aidé un million cinq cent mille enfants. »