Dans la chapelle de la paix de la cathédrale de Bayeux (Normandie), le drapeau britannique est en berne depuis le 9 avril, le jour de la mort du prince Philip, époux de la reine Elizabeth II. Et ce samedi 17 avril, à 16 heures, heure à laquelle ses funérailles seront célébrées dans la chapelle Saint-Georges du château de Windsor, de l’autre côté du Channel, les cloches de la cathédrale de Bayeux sonneront le glas. Car des liens historiques forts unissent la ville à la famille royale et au Royaume-Uni.
"Nous partageons la tristesse de la famille royale et du peuple britannique dans le deuil qui les frappe avec la mort du prince Philip. Celui-ci avait honoré plusieurs fois Bayeux, le Calvados et la Normandie de sa présence. Les cloches de la cathédrale sonneront ce samedi pour témoigner de notre prière et de notre soutien au moment de ses obsèques", précise ainsi le diocèse de Bayeux et Lisieux dans un communiqué.
Si la tristesse des habitants de Bayeux est si grande après la nouvelle du décès du prince Philip, c’est que l’histoire de la ville est étroitement liée à celle la nation britannique : Bayeux a été libérée le lendemain du Débarquement allié, le 7 juin 1944. Et c’est ici même que reposent 4.600 soldats du Commonwealth tombés lors de la Bataille de Normandie, ce qui en fait le plus grand cimetière britannique militaire d’Europe. Le duc d’Edimbourg, lui-même militaire ayant servi la Royal Navy en Méditerranée et dans le Pacifique lors de la Seconde Guerre mondiale, tenait de façon très fidèle "à saluer la mémoire des soldats britanniques tombés pour libérer l’Europe du joug de l’Allemagne nazi", comme le souligne dans son hommage Patrick Gomont, le maire de Bayeux.
Admiratif et proche des vétérans, décoré de la Croix de Guerre française 1939-45 avec palme, le duc d’Edimbourg s’est rendu à Bayeux à plusieurs reprises. Sa dernière visite date du 6 juin 2014, lors du 70e anniversaire du Débarquement. Aux côtés de la reine et de son fils, le prince Charles, il avait tenu une nouvelle fois à marquer de son empreinte les principales commémorations.
Cet engagement du prince Philip, comme sa fidélité à travers les joies et les peines de sa famille et de son pays, ont été également rappelés par Mgr Jacques Habert, évêque de Bayeux-Lisieux, dans sa lettre adressée à son homologue, Robert Atwell, évêque anglican d’Exeter, ville du Devon jumelée avec Bayeux.
Un autre lien historique très fort unit Bayeux et le Royaume-Uni : la Tapisserie de Bayeux, connue aussi sous le nom de Tapisserie de la reine Mathilde, et plus anciennement comme "Telle du Conquest" (pour "Toile de la Conquête"). Cette célèbre broderie du XIe siècle décrit des faits allant de la fin du règne du roi d'Angleterre Édouard le Confesseur en 1064, à la bataille d'Hastings en 1066, dont l'enjeu était le trône d'Angleterre, contesté au roi Harold par Guillaume, duc de Normandie. Les péripéties-clés de la bataille, dont l'issue détermina la conquête normande de l'Angleterre, y sont détaillées, mais près de la moitié des scènes relatent des épisodes antérieurs à l'invasion elle-même. Elle semble avoir été commandée par l’évêque Odon de Bayeux, le demi-frère de Guillaume et réalisée au cours des années qui ont suivi la conquête. Elle a une valeur inestimable pour la connaissance du XIe siècle du côté des normands et des anglais, en constituant un des rares exemples de l'art roman profane. Elizabeth II est l’arrière-petite-fille de Guillaume, à la 25e génération.