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Cinq pistes pour continuer à espérer en période de crise

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Aliénor Strentz - publié le 26/03/21
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Pour ne pas tomber dans la désespérance collective due au contexte de crise, il est essentiel de se reconnecter à ce don de Dieu qu’est l’espérance. En étant témoins de la « petite fille espérance » comme l’appelait Charles Péguy, nous pourrions devenir contagieux… de la Bonne Nouvelle de l’Évangile.

La crise de la Covid-19 a vu nombre de nos projets de vie remis en question. Ces espoirs sont autant d’aspirations humaines au bonheur : continuer sereinement ses études, trouver l’âme sœur, entrer dans le monde du travail, fonder une famille ou encore finir paisiblement sa vie, entouré des siens.

Des hommes et des femmes autour de nous ont pu vivre des situations dramatiques : perte d’emploi, liquidation de leur entreprise, décès d’un proche suite à la maladie ou à un suicide. Dans un tel contexte de crise sanitaire, économique et socio-politique, comment continuer d’espérer et d’avancer ? Comment nous défaire de ce fardeau pesant qui nous ralentit et nous bloque dans nos projets de vie ?

La réponse tient peut-être en un changement de regard sur nos « espoirs ». Dans cette perspective, voici cinq pistes pour réorienter nos pensées et nos actes vers l’espérance chrétienne afin que le royaume de Dieu continue au sein même de l’adversité de fleurir au-milieu et au-dedans de nous (Lc 17, 21).

1Méditer les promesses de Dieu

Toute la Bible peut se résumer dans cette révélation : Dieu nous aime immensément et il a un plan d’amour pour l’humanité et pour chacun d’entre nous en particulier. Même si nous ne comprenons pas toujours la mise en œuvre de ce plan, nous pouvons croire avec assurance dans la promesse que Dieu nous a faite par la bouche du prophète Jérémie : « Car je connais les projets que j’ai formés pour vous, déclare l’Éternel, projets de paix et non de malheur, afin de vous donner un avenir et une espérance » (Jr 29, 11).

Quelques soient les épreuves que nous traversons, Dieu a un plan de paix pour nous, et nous pouvons être sûrs qu’il aura le dernier mot sur nos tribulations. Il suffit pour cela de lui donner la main. Jésus dit à Marthe, et par elle à chacun d’entre nous : « C’est moi qui suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, même s’il meurt; et toute personne qui vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela? » (Jn 11, 25-26).

L’espérance chrétienne pousse ainsi à porter notre regard loin, très loin, jusque dans l’éternité. Mais ce regard n’est pas vague car il est focalisé sur la personne du Christ qui, par sa résurrection, a vaincu la mort et nous a ouvert les portes de l’espérance. La Bible regorge de promesses que nous pouvons recenser dans un journal pour les méditer, nous en imprégner et comme antidote au découragement. Elles diffusent en nous un flot de paix, de sérénité et de confiance dans l’avenir. Les méditer peut nous aider à définir plus justement nos priorités, à réorienter nos espoirs pour coopérer avec Dieu à la mise en œuvre de son projet d’amour, de paix et de bonheur pour l’humanité.

2Se confier au Saint-Esprit

Jésus ne nous a pas laissés orphelins (Jn 14, 18). Le Père, au nom de Jésus-Christ, nous a envoyé l’Esprit Saint, le Paraclet (παράκλητος), autrement dit celui qu’on appelle à son secours, celui qui intercède, qui défend et qui console. C’est Lui qui nous soutient, nous dirige dans nos prises de décision et qui nous pousse de l’avant, si nous le prions à cette fin.

Le contexte actuel nous fait réaliser d’autant plus notre grande faiblesse et notre vulnérabilité. Or, comme le disait Benoît XVI, « je ne dois pas porter seul ce que, en réalité, je ne pourrais jamais porter seul. La troupe des saints de Dieu me protège, me soutient et me porte » (Homélie lors de l’inauguration solennelle du ministère pétrinien, 24 avril 2005).  Si Benoît XVI nous a confiés aux saints de Dieu, c’est parce qu’ils sont précisément les témoins d’une docilité exemplaire à l’Esprit Saint qui les a protégés, soutenus et portés.

À une époque où beaucoup de gens ressentent le besoin de dialoguer avec un coach pour affronter leurs blocages et avancer sur leurs chemins de vie, nous avons nous aussi chrétiens besoin d’un coach pour ne pas rester enfermés sur nous-mêmes. Or, le meilleur coach qui soit est le Saint-Esprit ! Il est toujours avec nous, il est toujours en nous, dans notre cœur (Pape François, 2014, cycle de catéchèses).

Alors prions-le, ouvrons-lui notre cœur dans la foi et la confiance pour recevoir de lui les sept dons qui le caractérisent et dont nous avons tant besoin : dons de sagesse, d’intelligence, de conseil, de force, de science, de piété et de crainte de Dieu.

La prière du Cardinal Verdier, « Ô Esprit Saint, inspire-moi toujours », peut nous être d’un précieux secours :

3Rester focalisé et persévérer

Le Catéchisme de l’Église catholique a cette belle formule de « l’élan de l’espérance » qui préserve de l’égoïsme (§1818). L’espérance décentre en effet de son ego pour entrer dans le projet de Dieu qui concerne toute l’humanité. Elle implique notamment l’exercice de la force, vertu cardinale qui assure, dans les difficultés, la fermeté et la constance dans la poursuite du bien.

Le pasteur Jérémy Sourdril, dans un message sur Youtube, nous invite, en cette période de pandémie, à poursuivre notre route comme le Christ qui est resté focalisé sur sa mission jusqu’au sein de la pire adversité.

Alors que Jésus est averti du projet d’Hérode de le tuer, il poursuit consciemment sa route en dépit du danger. Il ne se laisse pas perturber dans sa mission par celui qu’il qualifie de « renard ». À notre tour, nous pouvons méditer cet Évangile de la persévérance, où notre « renard » pourrait être en ces jours la Covid-19.

À ce moment-là, quelques pharisiens s’approchèrent de Jésus pour lui dire : « Pars, va-t’en d’ici : Hérode veut te tuer. » Il leur répliqua : « Allez dire à ce renard : voici que j’expulse les démons et je fais des guérisons aujourd’hui et demain, et, le troisième jour, j’arrive au terme. Mais il me faut continuer ma route aujourd’hui, demain et le jour suivant, car il ne convient pas qu’un prophète périsse en dehors de Jérusalem » (Lc 13, 31-33).

A l’opposé, Lot représente le contre-exemple de celui qui demeure dans l’espérance et qui persévère au sein de l’adversité. Il demande en effet à Dieu de s’arrêter dans la petite ville de Tsoar, lors de sa fuite de Sodome et Gomorrhe (Gn 19, 18-22). Dieu avait pourtant pour lui un projet bien plus grand et plus heureux, mais Lot a choisi la facilité. Tsoar (צוער) signifie en hébreu « insignifiant, petit ».

Dieu ne nous a pas appelés à la petitesse. Il a un grand projet pour chacun d’entre nous. N’avons-nous pas tous d’ailleurs une « petite voix » qui nous souffle que nous avons quelque chose de beau à accomplir sur cette terre avant notre mort ? Alors persévérons comme sainte Louise de Marillac qui priait la Vierge Marie de lui donner la grâce de la « sainte persévérance dans le bien ».

4Faire un petit pas chaque jour

L’espérance est concrète. Elle demande de faire un petit pas chaque jour. Nos pères dans la foi, ou selon l’expression paulinienne « la grande nuée de témoins » (Hb 12, 1), qui nous ont précédés, nous ont montré l’exemple en faisant plusieurs petits pas chaque jour, sans savoir où la mission les conduirait le jour suivant. Encore aujourd’hui, ils nous encouragent à leur exemple à « ne pas nous arrêter en chemin, à continuer de marcher vers le but » (Pape François, Gaudete et Exsultate).

Pensons à Abraham qui « partit sans savoir où il allait » (Hb, 11, 8) ou encore aux Rois Mages, guidés uniquement par l’astre durant leur grand périple vers l’Enfant Jésus. Bien sûr, il ne s’agit pas ce soir de faire ses valises et de partir sur les routes ! L’espérance est ainsi une vertu corrélée à l’autre vertu théologale qu’est la foi : elle consiste à avancer sans visibilité à moyen terme, certain que le Christ, fidèle à ses promesses, ouvrira les portes au temps fixé. Pour un jeune professionnel, le petit pas peut être d’envoyer des lettres de motivation tout en continuant de prier avec confiance le Saint-Esprit et Saint Joseph. Pour une personne malade, le petit pas peut être d’offrir ses souffrances du jour pour la délivrance d’une âme du Purgatoire, en espérant la retrouver un jour dans la béatitude éternelle.

Chaque acte d’amour posé participe de la construction du Royaume de Dieu et est donc un signe d’espérance pour notre monde. Quand bien même nos espoirs humains seraient mis en berne par un nouveau confinement ou de nouvelles mesures restrictives, nous pouvons continuer d’avancer en tant que chrétien sur notre route unique et spécifique de sainteté.

5Accepter de ne pas tout comprendre

Accepter de ne pas tout comprendre est la dernière étape, peut-être la plus vertigineuse, pour continuer d’espérer en cette période de crise. Il ne s’agit pas ici de renoncer à comprendre la politique de notre pays, car ce serait de l’imprudence et de la négligence quant à notre devoir de citoyen.

Mais il s’agit d’accepter de ne pas comprendre au sens de « saisir » le projet de Dieu pour notre pays et pour l’humanité. Le Livre d’Isaïe nous apprend que les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées, et que ses voies ne sont pas nos voies (Is 55, 8). Nous ne devons donc pas craindre de laisser à Dieu le gouvernail de notre bateau, comme l’évoque le pape François dans sa lettre  Avec un cœur de père car Lui regarde beaucoup plus loin que nous.

Abraham est notre père non seulement dans la foi mais aussi dans l’espérance. St Paul a cette belle formule pour parler de lui : « espérant contre toute espérance… » (Rm 4, 18). Abraham espère en effet contre toute espérance qu’il verra s’accomplir la promesse de Dieu. Or l’Eternel lui demande d’offrir son fils unique, Isaac, en sacrifice… Comment dès lors continuer d’espérer dans la promesse de Dieu d’une descendance « aussi nombreuse que les étoiles du ciel » (Gn 22, 17) ? C’est pourtant ce que fait Abraham. Et Dieu accomplit effectivement sa promesse envers lui en son temps.

Marie et Joseph, eux non plus, ne comprennent pas tout, notamment lors du recouvrement de Jésus au temple de Jérusalem (Lc 2, 50). Mais la réponse de Jésus les recentrant sur « les affaires du Père » suffit à les faire rentrer dans le silence de l’acceptation et à poursuivre avec Jésus leur vie cachée et humble à Nazareth.

Jésus enfin a lui aussi connu son « pourquoi ». « Pourquoi m’as-tu abandonné ? » est l’une des dernières paroles qu’il prononce sur la Croix. Mais au jardin de Gethsémani, il avait déjà donné le « gouvernail » de sa Passion au Père : « Non pas ma volonté mais la tienne » (Lc 22, 42). Les pourquoi demeurent souvent sans réponse, mais non pas les « comment ». Marie, lors de l’Annonciation, demande simplement à l’ange Gabriel « comment » cela va-t-il se faire (Lc 1, 34). Nous pouvons, comme elle, prier le Saint Esprit de nous éclairer sur la meilleure manière de traverser cette crise, d’accueillir la vie telle qu’elle est, d’être enfin comme Marie les serviteurs et servantes du Seigneur, en toute circonstance.

L’espérance est une « ancre ferme et sûre de l’âme » (Hb 6, 19-20). Même vécue dans la fragilité de notre condition humaine, elle témoigne pour tous ceux qui ne croient pas que nous sommes « les enfants de la promesse » (Rm 9, 8) : celle d’une communion heureuse avec Dieu et en Lui pour la vie éternelle.

Aliénor Strentz est docteur en ethnologie-anthropologie, enseignante et fondatrice du blog "Chrétiens heureux".

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