Petite entreprise familiale nichée au pied du mont Ventoux, Villa d’Elba fabrique depuis 2007 des statues religieuses en plâtre. Des modèles classiques, traditionnels “qui permettent de s’élever rapidement vers Dieu”, assure Gilles Deloup, à la tête de l’entreprise avec son épouse, Nathalie.Elles accompagnent la prière des fidèles depuis les premiers siècles de la chrétienté. Statues de la Vierge ou de la Sainte-Famille, croix dépouillées ou ornementées, angelots et bas-reliefs, les possibilités sont nombreuses pour soutenir les fidèles dans leur foi. Et les artisans – ou devrait-on dire artistes ? – ne s’y sont jamais trompés. Ils n’ont eu de cesse de redessiner ce visage si doux de la Vierge Marie, de réinventer la croix dont le bois a porté le salut du monde. Mais alors que la tendance est aujourd’hui aux lignes épurées et aux formes abstraites, Gilles et Nathalie Deloup ont décidé d’aller à contre-courant. C’est à Carpentras, au pied du mont Ventoux, qu’ils ont lancé en 2007 Villa d’Elba, une entreprise familiale et artisanale de fabrication de statues religieuses.
L’histoire de Villa d’Elba est partie d’un constat et d’une opportunité. Au début des années 2000, Gilles Deloup part à la recherche d’une statue de la Vierge assez classique “permettant de s’élever rapidement vers Dieu sans passer par l’abstraction artistique moderne”. Après s’être rendu dans plusieurs magasins, il finit par se rabattre sur une statue “certes classique mais en résine et pas de très bonne qualité”. Il réalise alors la difficulté à trouver une statue classique et traditionnelle. Peu de temps après, sa femme met en place un petit atelier de moulage de statues religieuses afin d’aider une école privée dans laquelle sont scolarisée leurs enfants. Et le succès est immédiat. “Ses moulages en plâtre ont rencontré un tel succès que d’autres écoles l’ont contacté afin de faire un nouveau stand de vente”.
Après un temps de réflexion, Nathalie se forme aux différentes techniques de moulage et de patine avec une ancienne élève de l’école du Louvre. “Je voyais mon épouse réaliser de plus en plus de moulages et les stocks s’accumuler dans le garage”, se souvient Gilles Deloup. Responsable logistique dans l’industrie en quête d’une reconversion professionnelle, il décide alors avec son épouse de se lancer ensemble dans cette nouvelle aventure. Villa d’Elba est née.
Notre vocation est de ressusciter trésors disparus de la statuaire.
Leur crédo : “la statuaire d’hier pour la prière d’aujourd’hui”. “Notre vocation est de ressusciter les trésors disparus de la statuaire”, résume Gilles Deloup. “Il y a eu mouvement à la fin des années 1960 de destruction des statues classiques. C’était tout d’un coup devenu has been. C’est cette disparition de la statuaire populaire traditionnelle que nous essayons de ressusciter avec mon épouse”.
“Bien sûr cela reste un marché de niche dans une niche”, reprend le fondateur. “Mais notre activité nous a permis depuis quinze ans de faire vivre une famille de six personnes”. Car si la demande reste par définition limitée, elle est continue dans le temps. Villa d’Elba propose au total plus de 400 références allant de la toute petite fleur de lys à 75 centimes aux statues monumentales de plusieurs centaines d’euros. Leur best-seller est une statue de Notre-Dame de la sagesse de 42 centimètres. “Je l’avais en photo dans mon missel depuis longtemps et un jour, en se promenant, on l’a trouvé dans une niche sur le mur d’une maison”, se souvient Gilles Deloup. Il demande alors aux propriétaires s’ils peuvent l’emprunter afin de la reproduire. Et elle a su séduire nombre de clients : un cabinet d’avocat qui a souhaité en prendre une pour l’installer sur sa façade, des prêtres afin de l’offrir aux mariés dont ils célèbrent l’union…
Derrière ces nombreux modèles se cachent autant de belles histoires de famille et de jolies découvertes. Il y a aussi ces bas-reliefs de saint Joseph qu’ils ont pu reproduire grâce à des plaques de cuivre gravées à l’ancienne qui sommeillaient dans une église. Il se souvient aussi de cette grande famille dont la grand-mère les a contactés afin de leur demander de reproduire une statue de la Vierge de famille oubliée dans le grenier afin d’en faire cadeau à ses enfants et petits-enfants. “Elle avait la particularité d’avoir une robe couverte de montgolfières”, reprend Gille Deloup. “Depuis nous avons chaque année quelques commandes de ce modèle de la part de la famille !”.
Une fois les modèles originaux récupérés, c’est un savoir-faire bien précis que déploient les Deloup. Une fois les moules réalisés, ils utilisent du plâtre de moulage “réputé pour son esthétique, sa qualité et sa résistance”. Il est travaillé avec délicatesse et passion, “depuis le mélange d’eau et de poudre blanche effectué au gramme près jusqu’à la chasse aux petites bulles qu’il faut faire remonter à la surface en plongeant son bras dans le moule”. Les statues extérieures sont quant à elles confectionnées “avec de la pierre reconstituée, qui leur confère une patine authentique et une extrême résistance aux aléas climatiques”. Quant aux médailles et aux crucifix parés de détails ouvragés, “c’est le plâtre statuaire qui leur donne cette apparence si raffinée”.
Quinze ans après, la passion est-elle toujours présente ? “Villa d’Elba est pour nous une œuvre apostolique : nous avons tellement de retours de nos clients, de témoignages extraordinaires ! C’est ce qui nous pousse chaque jour”, assure Gille Deloup. “Notre motivation est sans cesse renouvelée”.