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Mgr Chauvet : “Face au drame de Notre-Dame, le Seigneur m’apprend l’humilité”

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Mgr Patrick Chauvet, recteur de Notre-Dame.

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Caroline Becker - publié le 19/01/21
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Dans son dernier livre “Silence de Dieu, silence des Hommes”, Mgr Chauvet, recteur de Notre-Dame de Paris, aborde la question difficile du silence de Dieu face au mal. Il confie à Aleteia ses doutes mais offre aussi des clés pour avancer sur un chemin d’Espérance. “Pourquoi Seigneur ?” Dans les épreuves, la souffrance, la maladie, les catastrophes, la question hante le croyant. Et la réponse est bien souvent le silence de Dieu. Cela signifie-t-il pour autant son absence ? Dans son livre, Mgr Chauvet, recteur de Notre-Dame de Paris, témoigne du chemin parcouru par un prêtre qui n’a pas toutes les réponses mais propose une voie pour que tout homme puisse retrouver la paix intérieure sans se laisser anéantir par la révolte et le désespoir.

Aleteia : Votre livre traite de cette fameuse question que tout le monde se pose face au mal : “Pourquoi Seigneur ?”. Est-ce une question qui vous hante ? 
Mgr Patrick Chauvet : Cette question, je me la suis véritablement posée le 15 avril 2019 face à Notre-Dame qui brûle. “Pourquoi Seigneur ?”, ai-je dis. Et la seule réponse fut son silence ! C’est une question qui est toujours là. J’ai toujours été scandalisé par le mal qui règne. Pourquoi le Seigneur laisse-t-il tous ces événements arriver ? Les catastrophes, les guerres, les épidémies… Au lendemain de l’incendie de Notre-Dame de Paris, j’ai reçu beaucoup de courriers. Certains évoquent la punition de Dieu. Je n’y crois pas. Dieu n’est pas responsable du mal car il n’est qu’Amour. Mais il donne du sens à ces événements. Beaucoup me demandent : “Que fait votre Bon Dieu, mon père ?”. Malheureusement, même en tant que prêtre, je n’ai pas toutes les réponses !

Deux ans après l’incendie de Notre-Dame, avez-vous trouvé des réponses ? 
Je pense que le Seigneur veut me conduire à un chemin de conversion. Il m’apprend l’humilité. En tant que recteur de Notre-Dame, je suis très attaché à la cathédrale. Mais le Seigneur me rappelle que ce n’est pas la mienne. Elle appartient à tous. C’est la lecture que je fais de cette catastrophe. Dieu me dépossède, m’oblige à me détacher. Ce feu, c’est mon chemin de purification.

Comment expliquer ce silence apparent de Dieu ?
C’est toute la contradiction du Dieu chrétien. Il nous semble silencieux alors qu’il n’est que Parole. Dieu est Verbe, il n’arrête pas de parler ! Il suffit d’ouvrir la Bible ! Comment se fait-il qu’on ne l’entende pas ? Peut-être parce qu’on ne sait pas écouter ou bien qu’on ne veut pas entendre. Certains fidèles se plaignent que Dieu est peu bavard, ils aimeraient entendre des voix ! Dans mon livre, je propose un chemin pour aller au plus profond de soi-même. Si nous voulons entendre le Seigneur, il faut intérioriser la Parole, il faut qu’elle prenne chair en nous. Pour comprendre le drame du confinement il faut relire le Divertissement de Blaise Pascal. “Tout le malheur des hommes vient d’une seule chose qui est de ne pas savoir demeurer au repos dans une chambre”. Nous sommes sans cesse abreuvé d’activités. Nous ne savons plus rester seul et intérioriser la Parole de Dieu.

Le Christ nous a donné les armes. Il nous offre la possibilité de ne pas se laisser aller au mal. Il n’y a rien d’héroïque, c’est la grâce de Dieu qui nous empêche de se laisser conduire par la souffrance.

Que dire à ceux qui souffrent et qui ont l’impression de ne pas obtenir de réponse ?
Face à la souffrance de l’innocent  je n’ai pas beaucoup de réponses. C’est toute l’histoire de Job. Pourquoi Dieu fait-il agoniser les hommes qui se confient à lui, qui ne cherchent qu’à l’adorer ? Le scandale de Job, c’est celui du mal au cœur de la foi. Car malgré les souffrances, Job garde une confiance absolue en ce Dieu d’amour. Il faut dépasser l’image du Dieu qui punit qui demeure encore aujourd’hui. Ce dont je suis sûr, c’est que Dieu est toujours présent car le Christ n’est que compassion. Il faut sentir sa présence et lui offrir notre souffrance. Le Christ nous a donné les armes. Il nous offre la possibilité de ne pas se laisser aller au mal. Il n’y a rien d’héroïque, c’est la grâce de Dieu qui nous empêche de se laisser conduire par la souffrance. “Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse”, dit le Seigneur à saint Paul.

Quelles sont nos armes pour lutter contre le désespoir ?
La patience, tout d’abord. La patience dans les épreuves comme Dieu est patient avec nous. La foi, bien sûr, car elle est essentielle. Elle permet de prendre du recul, de donner du sens. Enfin l’espérance. Une espérance sans détour dans le Christ. C’est elle qui nous permet d’avancer. Elle change notre point du vue, nous pousse à franchir le pas.

La prière apparaît être la solution ultime pour entendre Dieu ? Vous dites, n’ayons pas peur des prières arides ! 
Oui, n’ayons pas peur des prières arides ! Lorsque nous prions, nous aimerions sentir des tremblements car nous sommes des êtres sensibles. Ce silence apparent de Dieu peut nous donner l’impression de perdre notre temps, que la prière est inefficace. Pourtant il s’agit uniquement de se laisser envahir par la présence du Christ. Que de fois ai-je entendu : “Je n’ai pas le temps ou je ne sais pas faire !” Mais nous arrivons toujours à faire ce que l’on veut bien faire ! Pendant plusieurs mois de vie cloîtrée, avons-nous pris ce temps pour Dieu ? On commence véritablement à prier lorsqu’on a compris que prier c’est d’abord se taire pour entrer dans le silence divin. 

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© Artège

Silence de Dieu, silence des Hommes, par Mgr Patrick Chauvet, Artège, janvier 2021.


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