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Pourquoi la liberté associative est une nécessité démocratique

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Jean-Baptiste Noé - publié le 11/10/20
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L’association, c’est le moyen de la subsidiarité pour construire une société politique. Lui mettre des entraves est un mauvais coup porté à la démocratie.L’annonce faite, au motif de la lutte contre le séparatisme, de l’interdiction de l’éducation à domicile et du contrôle renforcé des associations, notamment par l’obligation de signer une charte de respect des « valeurs républicaines » pose plusieurs problèmes de respect des libertés fondamentales. L’enjeu est beaucoup plus important qu’il n’y paraît et mérite une vraie réflexion et non pas quelques effets d’annonce ici et là. Notons d’abord que le terme « séparatisme » ne veut pas dire grand-chose. Il est ici employé pour ne pas nommer le véritable adversaire, à savoir l’islamisme. Or nul besoin d’être un grand stratège pour savoir que lorsque l’on refuse de nommer l’adversaire, que ce soit par peur de le provoquer ou par incapacité de le penser, la guerre est perdue d’avance. Parler de « séparatisme » pour ne pas désigner la réalité, c’est déjà affirmer son échec. 

Tour de vis sur les honnêtes gens

À la suite de quoi des mesures sont prises, inutiles pour combattre l’adversaire que l’on est censé combattre, mais qui, encore une fois, opèrent un tour de vis sur les honnêtes gens. L’école obligatoire à partir de trois ans était déjà une atteinte à la liberté éducative des parents, l’interdiction de l’école à la maison n’en est que la continuité. Si on laisse faire, d’autres vexations, d’autres restrictions de libertés suivront. Comme ces attaques contre la liberté associative avec l’obligation de signer une « charte de la République » pour les associations qui touchent des subventions publiques. Passons sur le ridicule de la chose : croit-on vraiment que les islamistes vont cesser leurs méfaits parce qu’ils ont signé une charte les engageant à respecter les valeurs républicaines ? Depuis plusieurs années déjà des affiches de la laïcité sont placardées dans toutes les écoles et les parents doivent s’engager à la respecter. Cela a-t-il été vraiment utile ?



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Une borne à contrôler ?

Ces propos démontrent surtout que la France conserve un problème de fond à l’égard de la liberté associative. La loi de 1901 qui régit aujourd’hui la plupart des associations, sauf celle de droit mosellan, n’était qu’une concession jugée inévitable et fut adoptée comme un moyen de lutter contre l’Église dans le contexte de la lutte anticléricale du début du XXe siècle qui aboutit à la loi de 1905 et à l’expulsion des congrégations religieuses. L’association n’a jamais été vue comme une liberté à permettre, mais comme une borne à contrôler. La liberté associative a toujours été vue par les gouvernements comme une concession limitée à octroyer faute de mieux, mais à limiter et à surveiller le plus possible. Ce que notait déjà Alexis de Tocqueville en 1833 dans La Démocratie en Amérique en constatant la différence de mentalité associative chez les peuples : « Partout où, à la tête d’une entreprise nouvelle, vous voyez en France le gouvernement et en Angleterre un grand seigneur, comptez que vous apercevrez aux États-Unis une association. »

L’association, c’est le moyen de la subsidiarité et de l’intégration des populations dans le jeu démocratique en leur permettant de construire une société politique

L’association : la science mère

Or, comme le constatait Tocqueville, l’association est indispensable à la bonne tenue de la démocratie. Elle est, selon ses termes, « la science mère » : « Dans les pays démocratiques, la science de l’association est la science mère ; le progrès de toutes les autres dépend des progrès de celle-là. » L’association, c’est le moyen de la subsidiarité et de l’intégration des populations dans le jeu démocratique en leur permettant de construire une société politique. Dans tous les secteurs, sportifs, culturels, spirituels, éducatifs, il est primordial que les personnes puissent s’associer pour mener des activités locales en commun. Les chrétiens ont toujours été très actifs dans ce domaine, notamment par la création des patronages et de nombreuses associations de jeunesse dont le scoutisme n’est qu’un élément. C’est aux collectivités locales d’étudier les dossiers en amont, avant d’attribuer les subventions. Signer une charte n’empêchera pas le clientélisme associatif qui voit très souvent les subventions pleuvoir sur les associations amies et utiles politiquement. Mais cela va créer une usine à gaz administrative, simple au début, de plus en plus compliqué ensuite, qui étouffera les petites associations. Or l’article 3 de la loi de 1901 prévoit déjà ce type de cas : « Toute association fondée sur une cause ou en vue d’un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes mœurs, ou qui aurait pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national et à la forme républicaine du gouvernement, est nulle et de nul effet. »

Créer de la cohésion sociale

Nul besoin de créer de nouvelles directives, il suffit de faire appliquer la loi existante. Mais a-t-on réellement le courage de fermer les associations islamistes et celles qui propagent l’islamisme ? La charte de la République n’est-elle pas un écran de fumée destiné à donner l’impression que l’on agit, quand dans les faits on laisse faire ? Il y aurait aussi beaucoup à dire sur les fameuses « valeurs de la République » toujours invoquées, mais jamais définies. Entendues dans une forme à la fois extensive et rigide, nombreuse sont les associations honnêtes qui pourraient en être exclues, notamment quand elles combattent l’esprit de mort. Ce n’est pas un petit débat, c’est un enjeu de fond de notre démocratie. L’association est la meilleure façon de lutter contre l’individualisme et de créer de la cohésion sociale, indispensable dans une société qui se délite. Leur porter des coups de canif et leur mettre des entraves est un mauvais coup porté à la démocratie. Tocqueville le disait déjà, l’association est l’une des conditions de la civilisation : « Parmi les lois qui régissent les sociétés humaines, il y en a une qui semble plus précise et plus claire que toutes les autres. Pour que les hommes restent civilisés ou le deviennent, il faut que parmi eux l’art de s’associer se développe et se perfectionne dans le même rapport que l’égalité des conditions s’accroît. » Ne laissons pas cet élément civilisationnel être étouffé à cause de querelles politiques liées à l’actualité.  


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