La vie chrétienne n’est pas un code de moralité, mais elle ne va pas sans vertus. Oui, il y a des actions, visibles ou invisibles, qui nous mènent au bonheur de vivre en Dieu, y compris en dehors des sentiers battus !Il n’est pas nécessaire d’être chrétien pour être quelqu’un de bien. Ouf. Remarquez, on s’en doutait un peu. La bonne conduite n’est pas l’apanage de ceux qui ont eu la chance et la joie de rencontrer Dieu. Mais ce qui caractérise les chrétiens, c’est qu’on attend de les voir mener une vie conforme aux préceptes dont ils se réclament : une parfaite vie morale ! Et il semblerait même qu’on les attende un peu au tournant… Qui n’a jamais entendu (ou formulé) ces griefs : “Quand on pense qu’il va à la messe… Quand on pense que c’est une école catholique…” Pourquoi cette exigence vis-à-vis des chrétiens ?
On ne peut pas dissocier la vie chrétienne de la vie morale, et d’ailleurs ceux qui sont loin de la foi, ou même très hostiles à l’Église lui rendent en creux cet hommage : quand on se dit chrétien, on devrait être irréprochable. Voilà pourquoi le père Maxime Charles, ancien recteur de la basilique de Montmartre, répétait souvent à ses étudiants partant en mission d’évangélisation : “Vous êtes porteurs d’un message… qui vous condamne.” Ceci est juste.
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Mais ne nous y trompons pas : la foi chrétienne n’est pas un code moral ou social, l’Église n’est pas le parti des valeurs, auquel vous auriez adhéré par le baptême en signant une sorte de charte (vous ou vos parents) ici, en bas, à droite. L’Église est le corps vivant de ceux qui cherchent le visage de Dieu, de ceux qui l’espèrent, et de ceux qui, au Ciel, le voient. Voir Dieu “face à face”, son visage enfin devant le nôtre, comme l’écrit saint Paul sans trembler, est la réponse chrétienne à la question de la destinée humaine, à la question du bonheur que tous se posent, selon le désir naturel du cœur humain.
Faire notre bonheur
Et comme Dieu nous a fait à son image, comme il est venu lui-même en la personne de Jésus pour nous révéler son visage, la route est tracée : plus nous entrons dans la connaissance et l’amour de Jésus, plus grandit en nous le désir de le suivre et de lui ressembler, jusqu’au jour “où nous Lui serons semblables, parce que nous Le verrons tel qu’Il est” affirme saint Jean (1 Jn, 3-2). C’est le nom même du bonheur : “Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu” (Mt 5, 8). Or tout ceci passe par des actions, des actes bien concrets : il ne suffit pas de vouloir notre bonheur, il s’agit de le faire. Nous avons alors à nous interroger sur les actions que nous avons à mener, celles qui, pénétrées de l’amour de Jésus, nous mènerons à notre accomplissement, nous rendrons semblables à Lui. C’est précisément le but que se donne la théologie morale : considérer les actions, visibles ou invisibles, qui nous mènent au bonheur de vivre en Dieu. Et là, il est alors question de vérité, de justice, de pardon, d’amour, de toutes ces vertus que Dieu le premier attend de nous parce qu’elles nous rapprochent de Lui et de nos frères. Ce sont toutes ces vertus que nous attendons du chrétien.
D’autres routes
Et paradoxalement, c’est ici que les choses peuvent déraper ! L’exercice de la justice et de la charité ne sont pas toujours compatibles avec les codes de bonne conduite : le jeune François d’Assise n’a pas craint, dit-on, de montrer ses fesses à la bonne société quand il a choisi la pauvreté radicale pour le service des pauvres. Un saint Benoît Labre, avec sa vie de vagabond, n’aurait décroché aucun certificat de fréquentabilité ! Quant à sainte Geneviève, nombreux sont ceux qui lui ont fait une réputation de sorcière… Voilà où peut mener l’amour de Jésus : à suivre d’autres routes que celles qui conduisent à l’honorabilité.
Seigneur, donne à tous ceux qui se déclarent chrétiens de rejeter ce qui est indigne de ce nom, et de rechercher ce qui lui fait honneur.
Résumons-nous : l’amour de Jésus en qui nous plaçons notre bonheur exige de nous que nous nous mettions courageusement à sa suite. “Seigneur, donne à tous ceux qui se déclarent chrétiens de rejeter ce qui est indigne de ce nom, et de rechercher ce qui lui fait honneur”, voilà la belle prière que nous disons à la messe (prière d’ouverture du 15e dimanche ordinaire). C’est alors que notre bonheur rimera avec notre sainteté : voilà qui fait du bien à tous !
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