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Avortement pour “détresse psychosociale”, le cavalier législatif du projet de loi bioéthique ?

ASSEMBLEE NATIONALE FRANCE

Assemblée nationale.

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Agnès Pinard Legry - publié le 03/08/20
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Lors de l’examen en deuxième lecture du projet de loi bioéthique, dans la nuit de vendredi à samedi 1er août, les députés ont voté un amendement autorisant l’interruption médicale de grossesse (IMG), permis pendant neuf mois, pour cause de "détresse psychosociale". Un critère que ses opposants estiment invérifiable et qui pourrait, pour certains, mener à détourner le dispositif de l’IMG quand le délai de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) est passé.

C’est un amendement qui n’a pas fait de bruit. Pourtant, il pourrait bien bouleverser à long terme la conception de l’avortement en France. Dans la nuit de vendredi 31 juillet à samedi 1er août, les députés ont voté l’amendement n°524 du projet de loi bioéthique, porté par plusieurs députés socialistes, autorisant l’interruption médicale de grossesse (IMG), permis en France pendant neuf mois, pour cause de "détresse psychosociale". "On constate trop souvent des interrogations, voire des divergences d’interprétation sur l’opportunité de prendre en compte, parmi les causes de péril grave justifiant la réalisation d’une IMG, la détresse psychosociale", a ainsi argumenté Marie-Noëlle Battistel. "Il convient de clarifier le cadre juridique dans lequel le collège médical rend son avis sur l’opportunité de réaliser cet acte. Ce sera plus clair pour tout le monde et la décision sera plus aisée".

Cette disposition "fait exploser l’encadrement de l’avortement en ajoutant le critère invérifiable de “détresse psychosociale” pour recourir à l’interruption médicale de grossesse (IMG), jusqu’au terme de la grossesse", a dénoncé l’association Alliance Vita, membre du collectif "Marchons enfants !", opposé au projet de loi bioéthique. "La condition des femmes enceintes faisant face à une détresse mérite toute l’attention de la société. Mais l’histoire a montré que, la notion de détresse étant difficile à objectiver, elle était utilisée pour détourner la loi".

Pour Mgr Malle, évêque de Gap et Embrun, il s'agit d'une "fuite en avant irresponsable de l'Assemblée nationale", a-t-il dénoncé sur Twitter. " Qui peut juger de la détresse psychosociale ? Appelons les choses par leur nom: un infanticide légal, un meurtre légal".

Cet amendement avait pourtant reçu un avis défavorable de la commission. "Le problème n’est pas le droit, mais la pratique", a expliqué le rapporteur du texte, Jean-François Eliaou. "Vos amendements m’offrent l’occasion de le redire haut et fort : oui, l’IMG constitue une possibilité, et la santé de la femme doit être prise dans sa globalité, dont fait partie la santé mentale. Toutefois, le préciser dans ce texte me gêne. Puisque cette possibilité existe déjà dans la loi, pourquoi la rappeler ? Pourquoi énumérer ce seul motif d’IMG, et non pas d’autres ? Que se passera-t-il si ce péril résulte d’une cause purement psychologique, et non psychosociale ? Comment définir exactement les causes psychosociales ? Enfin, je crains qu’on n’envoie, en inscrivant cette précision dans la loi, un signal complexe sur la frontière entre IVG et IMG". Le gouvernement, par la voix du secrétaire d’État Adrien Taquet, a quant à lui émis un avis de sagesse.

Plusieurs opposants ont dénoncé un cavalier législatif, c’est-à-dire un article de loi qui introduit des dispositions qui n’ont rien à voir avec le sujet traité par le projet de loi. En France, le Conseil constitutionnel censure ce type de dispositions.

Le projet de loi bioéthique a été adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale un peu avant 4 heures du matin dans la nuit de vendredi à samedi 1er août dans un hémicycle déserté. Sur les 577 députés que compte l'Assemblée nationale, 101 étaient présents. Le texte a été voté à 60 voix contre 37. "La version issue de l’Assemblée nationale en seconde lecture est même pire que la version gouvernementale initiale", a regretté le député LR Thibault Bazin lors de l'explication de vote sur le texte. "Elle contient de nouvelles dérives marchandes : l’extension, à titre expérimental, aux centres à but lucratif de la gestion des gamètes ; le double discours du garde des sceaux qui renonce à dissuader nos compatriotes d’aller louer le corps de femmes à l’étranger. Elle contient de nouvelles dérives transhumanistes : la possibilité confirmée de créer bientôt des embryons transgéniques, des gamètes artificiels à des fins de recherche, des embryons chimériques".

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