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Ennio Morricone, le plus inspiré des compositeurs de film

ENNIO MORRICONE
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Louise Alméras - publié le 06/07/20
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Légende du siècle et compositeur de génie, Ennio Morricone a fait plus pour le cinéma que certains cinéastes, comédiens ou scénaristes de talent. À lui seul, il insuffla l’âme, l’émotion, la teneur dramatique à une histoire. On parlait de ses compositions comme on parle d’un musée ou d’une cathédrale italienne. Il est mort ce 6 juillet 2020 à Rome, le lieu où il est né.Le point commun de notre histoire tient parfois à des hommes. Parce que certains ont su donner la quintessence de leur talent au monde, avoir apprécié leur oeuvre nous fait devenir héritier d’un même don ou d’un même territoire. Ennio Morricone l’a fait par la musique. Il était une fois dans l’Ouest, Les Moissons du ciel ou Mission appartiennent au patrimoine mondial à cause de sa musique, tout comme une bonne partie des westerns du début du siècle dernier, dont ceux de Sergio Leone. Sans elle, ils ne seraient devenus qu’une oeuvre parmi d’autres. Avec elle, ils ont franchi le seuil de la pérennité. C’est peu de dire que le cinéma lui doit tant, et d’ailleurs, on ne parle pas de la musique, on ne la dit pas non plus : on l’écoute et on la ressent. 

La bénédiction de la musique de Mission (1986)

Plus de trente ans après, les impressionnantes images des chutes d’Iguazu dans la scène d’ouverture de Mission (1986) restent encore en mémoire. Le film de Roland Joffé, palme d’or de l’année au Festival de Cannes et Oscar de la meilleure photographie, raconte la mission de prêtre Jésuites au XVIIIe siècle. Entre drame de conscience et rédemption, l’histoire retrace la difficulté et la beauté de leur vocation au coeur des terres amérindiennes. 


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Si la force de ce film tient au sujet, c’est aussi parce que la présence de la musique est double : Ennio Morricone en a composé la bande originale et l’histoire met l’accent sur une école de musique de haut niveau, symbole de résistance du peuple des Guaranis face à l’annonce du partage de leurs terres entre les Espagnols et les Portugais. Différents thèmes musicaux accompagnent l’évolution du drame complexe, qui se trouve au carrefour de plusieurs cultures. Un exercice que le compositeur a qualifié “de miracle technique” qui fut “une grande bénédiction”. 

Du plus grand honneur aux honneurs

Ennio Morricone a raflé les prix les plus prestigieux d’une carrière de compositeur et d’artiste : cinq nominations aux Oscars au compteur, un Oscar d’Honneur, cinq Baftas, un Grammy Award et une élévation au grade de Chevalier dans l’ordre de la Légion d’Honneur. Pourtant, son aspiration était tout autre. En tant que musicien d’abord, mais de croyant surtout. Car l’Italie a créé beaucoup d’hommes de foi, et s’il s’est exporté à l’international, le compositeur est demeuré avant tout italien et catholique. Cela explique sans doute la grande spiritualité présente dans sa musique et l’effet qu’elle nous fait. On s’y émerge sans se diminuer, au contraire, elle donnerait même le goût du ciel. 

Dans un entretien accordé à Zenit, le génie musical reconnaît que “la spiritualité est toujours présente en lui quand il compose”, dont il précise que “ce n’est n’est pas par un effet de sa volonté ; il la ressent tout simplement.” Comme infusée en lui plutôt qu’une arme prosélyte, Ennio Morricone semblait placer son honneur à composer selon sa foi, bien que toujours au service de chaque film, pour rendre à sa musique l’ossature de la grâce. Le geste précédait l’idée au sens sans doute où Andreï Tarkovski disait qu’il n’envisageait pas l’artiste sans l’homme de foi. 



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Et le compositeur du film Le professionnel (1981), dont la douceur du violon ne peut faire que vibrer ou arracher des larmes, se recommandait lui-même en homme de foi. “En tant que croyant, cette foi est probablement toujours là, mais c’est à d’autres de s’en rendre compte, aux musicologues et à ceux qui ne se contentent pas d’analyser les morceaux de musique, mais qui ont aussi une compréhension de ma nature, comme aussi du sacré et du mystique”, expliquait-il alors. Nous pourrions dire à l’égard de son oeuvre comme le cardinal dans Mission : “L’esprit des morts survit dans la mémoire des vivants”. Mais son esprit n’est pas mort. Et il survivra autrement.


NATHAN PACHECO
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