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La belle intuition des religieuses dominicaines de Marbury

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Fr. Patrick Briscoe - publié le 26/06/20
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Au monastère dominicain de Saint-Jude, à Marbury dans l’Alabama, des sœurs de différentes couleurs de peau cohabitent depuis plus de 70 ans, partageant prière, tâches domestiques, joies et peines. A l’époque de sa fondation, cette communauté religieuse faisait figure de pionnière dans un pays marqué par la ségrégation raciale.Tout est parti d’une vision de mère Marie de Jésus, une religieuse dominicaine américaine, dans les années 1940. Alors qu’elle se trouve dans le jardin de son monastère, elle voit une scène d’émeute raciale se dérouler devant elle. Un religieux à la peau sombre s’approche alors de la foule. Il porte l’habit dominicain et tient un chapelet. Il s’agit de saint Martin de Porres, fils d’une ancienne esclave noire péruvienne et d’un noble espagnol. Alors qu’il marche au milieu d’eux, les armes et les gourdins des émeutiers se transforment en chapelets et leurs combats en prière. Puis Martin pointe du doigt un monastère au sommet d’une colline où des religieuses dominicaines de différentes couleurs de peau prient le chapelet.

En 1944, mère Marie de Jésus et quelques autres femmes décident de fonder un monastère pour celles qui aspirent à la vie contemplative, sans distinction de race. Il s’agit du premier monastère interracial des États-Unis. Un projet absolument révolutionnaire puisqu’il n’est pas du tout dans l’esprit des lois raciales de l’époque.

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Dominican Monastery of St. Jude

Si mère Marie de Jésus ne vit pas assez longtemps pour voir son rêve prendre forme, ce sont deux religieuses de son monastère de Catonsville, dans le Maryland, qui le mènent à bien : mère Marie Dominique et mère Marie de l’Enfant Jésus. Les deux religieuses, qui cherchent un lieu pour la fondation, écrivent à de nombreux évêques, mais les réponses ne sont guère encourageantes. Si beaucoup admirent la noblesse de leur projet leur idéal, ils le trouvent trop imprudent pour l’époque. C’est finalement Mgr Thomas Toolen, évêque du diocèse de Mobile, dans l’Alabama, qui accepte de les accueillir.


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Grâce à son soutien, les religieuses s’installent dans une ferme et créent le monastère de Marbury, qu’elles placent sous le patronage de saint Jude, patron des causes désespérées (sainte Rita n’est pas la seule !). À ses débuts, la communauté ne compte que les deux fondatrices et une postulante. Quelques années plus tard, elles construisent un monastère permanent sur la colline voisine. Peu à peu, d’autres sœurs rejoignent le monastère et sœur Mary Jordan, l’actuelle maîtresse des novices, témoigne de son succès : “L’évêque était fier d’avoir une communauté comme celle-ci dans son diocèse et de nombreux prêtres et religieux y ont envoyé des jeunes femmes”.

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Dominican Monastery of St. Jude

Le principe fondamental de ce monastère est d’accueillir toute femme à la recherche de la vie contemplative, quelle que soit sa couleur de peau. Sœur Mary Joseph, une sœur afro-américaine qui a rejoint la communauté en 1947, raconte sa vocation : “Je ne pense pas que Dieu aurait mis ce désir dans mon cœur sans un moyen de le réaliser. […] Je savais que je voulais être sœur mais je ne voulais ni enseigner ni soigner. J’avais le désir d’une vie de prière où je pourrais chanter les louanges de Dieu et me donner complètement à Lui”.

Construire une culture de l’amour

Le monastère témoigne d’une culture de l’amour. Comme le souligne mère Marie du Précieux Sang, “quelle que soit leur couleur de peau, les sœurs sont unies dans leur identité de dominicaines et d’épouses du Christ se donnant à lui à travers le silence monastique, le chant liturgique, la prière du rosaire et le zèle pour le salut des âmes”. À Marbury, on ne parle pas de noires ou de blanches. Toutes sont sœurs. À la mort des deux fondatrices, c’est une sœur afro-américaine qui a pris la responsabilité de la communauté : elle n’a pas été choisie pour sa couleur de peau mais parce qu’il a été jugé qu’elle était la plus à même de diriger la communauté. Le monastère met en lumière la civilisation de l’amour parce que les religieuses de Saint-Jude sont données à Dieu et donc les unes aux autres.


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