Les messes publiques à Hong Kong sont de nouveau autorisées depuis le 2 juin. Ce n’est pas le cas des rassemblements publics, notamment celui qui aurait dû avoir lieu comme chaque année le 4 juin, en commémoration du massacre de la place Tiananmen. Hasard ou Providence, les Hongkongais ont donc pu organiser des veillées de prières et des messes du souvenir dans les églises de la ville. Un prêtre sur place raconte à Aleteia l’émotion de la journée.Invoquant les préoccupations concernant le Covid-19, avec notamment l’interdiction des rassemblements de plus de huit personnes dans les lieux publics, le gouvernement hongkongais a interdit la traditionnelle veillée mémorielle qui rassemble chaque année, le 4 juin, près de 100.000 personnes dans le parc Victoria de la ville.
Mais le diocèse a fait savoir que des messes spéciales auraient lieu dans différentes églises le 4 juin au soir. Pour mémoire, la veillée traditionnelle du 4 juin de Hong Kong marque la fin des protestations étudiantes en 1989, lorsque l’armée chinoise a tiré sur des manifestants sur la place Tiananmen à Pékin.
En tant que région administrative spéciale, Hong Kong est le seul endroit en Chine où le massacre peut être commémoré. Ce qui n’est pas le cas cette année, puisque l’interdiction de rassemblement dans les lieux publics, fixée initialement jusqu’au 19 mai, a été prolongée jusqu’au 5 juin, avant d’être de nouveau décalée au 1er juillet.
Prêtre à Hong Kong, le père Nicolas de Francqueville (MEP) raconte à Aleteia la messe qu’il a célébré ce jeudi 4 juin en mémoire des victimes. Il partage son émotion car il s’agissait également de la première messe publique depuis le 15 février dernier.
Aleteia: Après trois mois et demi d’interdiction de messes publiques, celles-ci sont de nouveau autorisées depuis le 2 juin, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Père Nicolas de Francqueville: Je suis très ému aujourd’hui car je viens à l’instant de célébrer une messe spéciale en souvenir de Tiananmen, et je ne m’attendais pas à voir autant de monde ! Comme les manifestations publiques sont encore interdites, les gens sont venus ici se recueillir et prier. Au-delà de cette commémoration fêtée chaque 4 juin, c’était aussi l’occasion de revoir des paroissiens et de revivre enfin un moment communautaire. Mais je vous rassure tout de suite, ici, les consignes sanitaires sont extrêmement bien respectées. L’expérience du SRAS en 2003 a joué. Dès le mois de janvier, les habitants se sont masqués et ont limité leurs visites, notamment au moment du nouvel an chinois. Vous ne trouverez pas une personne dans la rue sans masque ! Résultat, nous n’avons pas eu de confinement et ne comptons “que” quatre morts depuis janvier.
Pourtant les messes étaient interdites ?
Les messes publiques étaient effectivement suspendues, mais j’ai pu dire la messe quotidienne de manière privée avec une quinzaine de personnes. Le dimanche, nous la diffusions sur Facebook, et après la messe, nous exposions le Saint Sacrement toute la journée, où un petit flux de paroissiens se relayait pour venir prier. En revanche les mariages comme les enterrements restaient autorisés, nous avons pu avoir parfois de belles assemblées !
Comment organisez-vous la reprise « sanitaire » de vos messes publiques ?
Nous nous sommes équipés avec l’achat d’un deuxième appareil de prise de température infrarouge à l’entrée de l’église. Nous avons divisé par deux, comme demandé, notre capacité d’accueil et pouvons accueillir 250 personnes au lieu des 500 habituelles à l’intérieur. Mais nous avons aussi installé dehors, dans le « playground » des enfants, 200 chaises supplémentaires et un grand écran pour suivre la messe. Les gens sont masqués, se lavent les mains en entrant, respectent la distance entre eux sur les bancs, bref tout se passe bien.
Comment les Hongkongais réagissent aux dernières dispositions prises par les autorités chinoises ?
Les gens sont inquiets pour leurs libertés futures. Que leur réserve cette nouvelle “loi de sécurité nationale”, votée fin mai par le Parti réuni en Congrès ? Les manifestations ont repris la semaine dernière, alors qu’il est interdit de se réunir à plus de huit personnes. On peut avoir des amendes, et se faire arrêter. D’ailleurs, un soir de la semaine dernière, 600 personnes, essentiellement des jeunes, ont été interpellées. Les habitants sont attachés à leurs libertés, notamment à la liberté de culte, qui est jusqu’à présent, bien réelle ici. Je suis d’ailleurs frappé par le calme, la patience et la foi de nos paroissiens. Ce soir, pour notre première messe publique, nous venons de vivre un moment très beau et très recueilli, empli de silence et de prières. Deo Gratias !
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