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Confinement : comment maîtriser son stress ?

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Bénédicte de Saint-Germain - publié le 27/04/20
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Avec le confinement qui se prolonge et le déconfinement qui s’annonce mais dont les contours demeurent flous, le stress peut s’accumuler : peur de la maladie, peur pour ses proches, peur du chômage partiel et de l’avenir professionnel, problèmes de cohabitation familiale… Pour y faire face, “il faut promouvoir une information centrée sur les aspects positifs et encourageants comme l’altruisme, et pas trop sur ce qui crée de la peur”, assure à Aleteia le psychiatre Emmanuel Contamin. Entretien.Si certains se sont habitués au confinement et ont réussi à trouver un nouvel équilibre, d’autres, au contraire, subissent quotidiennement les assauts de l’angoisse. Et la perspective du déconfinement, dont les contours sont encore flous, contribue parfois à augmenter ce stress. Docteur Emmanuel Contamin, psychiatre spécialisé en thérapie EMDR (« eye movement desensitization and reprocessing »), auteur de nombreux ouvrages et intervenant dans le parcours de coaching en ligne “Moins de stress, plus de sérénité, mieux vivre avec ses émotions”, a accepté de répondre aux questions d’Aleteia et de donner de nombreux conseils pour gérer son stress.

Aleteia : En période d’épidémie, quelles sont les principales causes de stress ?
Dr Emmanuel Contamin : La revue médicale Lancet vient de publier une synthèse de 3.000 articles parus après les précédentes épidémies : SRAS, H1N1…, faisant ressortir les différentes formes de stress qui ont été éprouvées par les populations à ces moments-là. Ce sont les mêmes que l’on observe aujourd’hui. Les facteurs de stress sont liés soit au confinement, soit à ses conséquences dans la durée. Plus le confinement dure, plus le stress augmente. Au-delà de dix jours on commence à observer des symptômes post-traumatiques, de l’évitement ou de la colère.

Certaines personnes sont particulièrement vulnérables au stress : femmes enceintes et mères craignant pour leur enfant, personnes isolées, personnes fragilisées économiquement, soit parce qu’elles sont déjà pauvres ou qu’elles n’ont rien (migrants, sdf), soit parce qu’elles sont menacées de faillite ou en difficulté (travailleurs indépendants par exemple), personnes âgées et en particulier celles qui ont très peu de contact avec leurs proches depuis le début du confinement. Il existe aussi un stress spécifique aux soignants : la crainte d’être contaminés et de transmettre la contamination dans leur famille. Leur stress peut aussi venir d’un entourage hostile.

Les familles sont-elles touchées?
Dans les familles, le stress est lié à plusieurs facteurs : le nombre de personnes par rapport à l’espace dont on dispose, si les deux parents travaillent ou si l’un est en chômage partiel, si les enfants sont jeunes ou relativement autonomes, s’ils ont des fragilités ou un handicap, si on a des difficultés d’approvisionnement etc. Dans certaines familles, le temps libéré permet la créativité, pour d’autres au contraire il est très compliqué de gérer à la fois travail et enfants.

Le manque de connaissances sur le virus a-t-il un impact sur notre sérénité ?
Aujourd’hui, on ne sait toujours pas précisément à quel degré le covid-19 se transmet, quelle est sa létalité ou si on est complètement immunisé après l’avoir eu. La communication gouvernementale a reconnu des zones d’incertitudes. Lorsque des informations extérieures provoquent en nous de la peur ou de la colère, nous avons tendance à les transmettre aussitôt à notre réseau.

“Il est important de veiller à la qualité et de limiter la quantité de sources d’informations”

Ces émotions appartiennent à des réactions de défense instinctive par rapport à un danger et nous poussent à l’action immédiate pour nous protéger, au risque de perdre une capacité de recul et de réflexion. Nous risquons ensuite de sélectionner les informations qui vont dans ce sens et de nous rigidifier dans ces théories du complot : c’est pour cela qu’il est important de veiller à la qualité et de limiter la quantité de sources d’informations.

Comment parvenir à maîtriser les angoisses qui peuvent nous envahir ?
La recommandation qui a émergé de toutes ces études a été la nécessité de s’appuyer sur les liens familiaux. C’est paradoxal car le confinement permet chez certains de resserrer les liens, par exemple quand une famille est partie avec la grand-mère ou quand des grands enfants sont rentrés. Pour d’autres au contraire, c’est une source d’éloignement.

Spontanément, des moyens se sont mis en place pour soutenir les liens familiaux, comme les groupes Whats App. Certains de mes patients isolés dont les relations habituelles ont lieu dans un cadre associatif ou professionnel m’ont dit qu’au téléphone, leurs relations sont parfois plus profondes que d’habitude. Des numéros verts d’écoute ont été aussi assez rapidement créés par des acteurs publics ou privés comme l’Église de France.



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Je recommande de chercher les liens les plus constructifs. Par exemple : j’ai une patiente isolée. Elle a décidé d’appeler une amie chaque soir. Elles partagent leur vécu quotidien puis disent ensemble le chapelet. Si besoin, élargir le réseau pour ne pas se cantonner à une seule personne. Les études recommandent aussi la création de groupes de soutien et d’échange en ligne sur le vécu des expériences de confinement.

Et si les informations sont particulièrement anxiogènes ?
Il faut promouvoir une information centrée sur les aspects positifs et encourageants comme l’altruisme, et pas trop sur ce qui crée de la peur : communiquer sur les personnes guéries et non pas seulement sur le nombre quotidien de morts. Toutes les communications qui montrent les personnes qui font le bien et mettent en valeur les actions de solidarité entre voisins renforcent les liens sociaux, la confiance en nos concitoyens, nous font du bien.

“Je conseille de privilégier les comportements pro-sociaux, par exemple en applaudissant ou en envoyant des petites attentions aux soignants.”

L’information doit être issue d’émetteurs sérieux et doit donner des repères, en expliquant par exemple comment fonctionne le virus. Elle doit permettre une projection positive dans le futur : nous avons besoin de réfléchir à la manière dont nous allons organiser l’après-confinement. Aujourd’hui, nous nous rendons compte que, sous l’effet d’une nécessité vitale immédiate, nous mettons en place des changements importants dans notre manière d’agir et de consommer et nous pouvons nourrir l’espoir que notre société adoptera un modèle de développement plus durable.

Je conseille d’écouter les informations une seule fois par jour et de privilégier les comportements pro-sociaux, par exemple en applaudissant ou en envoyant des petites attentions aux soignants.

Que faire en famille pour diminuer le stress ?
En famille, nous pouvons privilégier la recherche de sens et favoriser la projection positive dans l’avenir. Par exemple en annonçant à l’enfant : “Dans 25 dodos tu vas pouvoir repartir à l’école”. Cela donne une perspective d’espoir. Structurer les journées et les semaines peut diminuer le stress en mettant en place des routines auxquelles on ne dérogera pas, des soirées films tous les vendredis soirs par exemple. Créer des occasions de fête permet de faire baisser la pression, comme dans cette famille dont les enfants organisent une fois par semaine une soirée thématique : soirée espagnole avec dîner tapas et danses, soirée police avec entraînement physique des parents puis Cluedo pour montrer leur capacité à résoudre un crime.

Cette structuration du temps est importante pour inclure des temps d’activité physique réguliers (attention à ne pas se sur-confiner par anxiété excessive !) et maintenir un sommeil de qualité. Ils concourent à diminuer le stress. L’organisation de l’espace est nécessaire également pour préserver un espace d’intimité pour chacun (les enfants peuvent construire une petite cabane qui leur est personnelle par exemple). L’espace du télétravail doit être aussi bien différencié.



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Le conseil de famille où chacun peut dire ce qu’il ressent, ses besoins principaux, ses émotions est aussi un facteur d’apaisement. Cela fait du bien et construit des liens. Mais le plus important pour rassurer les enfants, c’est que les parents montrent l’exemple. Ils sécurisent leurs enfants quand ils sont capables de partager de façon authentique et de réguler leurs émotions. Si les couples éprouvent des tensions, ils doivent chercher à en parler de façon non violente pour les résoudre et inventer des solutions créatives. L’humour est aussi une bonne ressource pour diminuer le stress.

La prière a-t-elle un rôle dans la gestion du stress ?
Les liens spirituels sont une source de résilience reconnue par toutes les études, à la fois pour le sens que cela donne aux événements et aussi pour tous les liens communautaires qu’ils permettent. Le fait de ne plus pouvoir aller à la messe en paroisse ou en communauté appauvrit ce dernier point : regarder la messe à la télévision, ce n’est pas la même chose. Mais cela pousse à rechercher comment vivre sa foi dans une relation d’église domestique, à trouver des solutions. Je connais une famille qui fait un soir par semaine la lecture continue de l’évangile de saint Marc.

J’encourage les parents à favoriser ce qui permet de partager de l’émotion, tout en étant suffisamment calme et contenu. Par exemple des petits bricolages à faire ensemble ou bien des actes de générosité. Les adultes peuvent ouvrir aux enfants leur propre manière de gérer le stress en partageant un exercice de relaxation, un temps de méditation, une promenade.

Et quand on est loin ?
Les liens intergénérationnels peuvent être développés en ligne par les grands parents qui peuvent trouver des moyens créatifs pour laisser souffler leurs enfants : lire des histoires aux petits-enfants, faire un spectacle de marionnettes en vidéo…

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