En réponse à une saisine du Directeur général de la santé, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) a publié le 29 janvier des recommandations relatives à l’exposition des enfants aux écrans. Un soutien nécessaire et bienvenu à l’heure où le taux d’équipement en appareils numériques explose chez les plus jeunes.Ils sont de plus en plus nombreux et de plus en plus jeunes à posséder et utiliser des appareils avec écrans. La dernière enquête de référence concernant les écrans, effectuée par Médiamétrie pour l’Unaf (Union nationale des associations familiales) et l’Open (Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique), déclinent des chiffres qui sont sans appel. Entre 7 et 10 ans, près d’un enfant sur huit (13%) est déjà équipé d’un mobile. Un pourcentage qui passe à près de deux tiers (65%) chez les 11-14 ans. À 10 ans, ils sont 35% à posséder leur propre console de jeu, 28% leur propre tablette, et 11% leur propre téléviseur. Quant à l’âge d’accession, un enfant se voit aujourd’hui offrir son premier téléphone à 9 ans et 9 mois. À titre de comparaison, en 2016, l’âge moyen du premier téléphone portable était de 11 ans. La première console de jeu arrive à 7,3 ans, la tablette juste avant 7 ans, et l’ordinateur à 8 ans et demi. La majorité des enfants est donc bien loin de respecter la règle des « 3-6-9-12 » élaborée par le psychiatre Serge Tisseron.
Dans un rapport publié le 29 janvier, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) se montre assez directif dans ses préconisations. S’il souligne des éléments contradictoires parmi les nombreuses études et publications sur l’impact des écrans sur le développement cognitif de l’enfant, il reconnaît néanmoins des effets néfastes sur le sommeil, le surpoids, ainsi que le risque avéré de tomber sur des contenus sexuels, pornographiques ou violents. Par conséquent, le HCSP recommande :
1Pas d’écran avant 3 ans
Pour le HCSP, les écrans sont à proscrire avant l’âge de 3 ans, à moins que « les conditions d’une interaction parentale ne soient réunies ». Autrement dit, si le dessin animé donne lieu à un dialogue, ou s’il s’agit d’un jeu d’apprentissage sur écran accompagné par le parent, ça passe… Le psychiatre Serge Tisseron, à l’initiative de cette même injonction « pas d’écran avant 3 ans », est quant à lui plus strict : pas d’écran avant 3 ans, point. « Rappelons que l’utilisation des écrans est déconseillée pour les enfants de moins de 3 ans parce qu’ils ne sont d’aucune utilité pour développer quatre compétences dont l’acquisition est fondamentale à cet âge : le langage et la reconnaissance des mimiques, qui s’acquièrent au fil des interactions avec les humains, la capacité d’attention pour une tâche que l’enfant se choisit lui-même et dans laquelle il trouve du plaisir, et les compétences motrices, notamment manuelles », souligne-t-il dans L’emprise sournoise des machines parlantes (Les liens qui libèrent), un ouvrage à paraître le 18 mars prochain. Le HCSP recommande également d’interdire les écrans 3D pour les enfants âgés de moins 5 ans. En effet, les images 3D nécessitent plus d’accommodation que les images 2D et engendrent plus de fatigue oculaire.
2Pas d’écran dans la chambre
Une règle qui fait déjà partie des quatre « pas » de Sabine Duflo, psychologue clinicienne et thérapeute familiale. Ceci permet de limiter le temps d’exposition, mais surtout de contrôler le contenu du film ou du dessin animé. “Les enfants possédant un téléviseur dans leur chambre regardent moins de films pour enfants, plus de programmes et films pour adultes que les enfants sans téléviseur”, alerte le rapport. Il est aussi recommandé de ne pas laisser les enfants regarder la télévision une heure avant l’endormissement. L’exposition à la lumière bleue le soir retarde la production de mélatonine ainsi que l’endormissement, entraînant une dette de sommeil plus ou moins importante.
3Accompagner l’utilisation des écrans
Une grande majorité des études s’accorde à dire que l’accompagnement dans l’utilisation des écrans est l’élément essentiel. Les parents, premiers éducateurs de leurs enfants, ont la responsabilité de les accompagner dans la gestion des écrans, et ce en fonction de leur âge et des contenus visionnés. Mais c’est large, la gestion des écrans ! Cela va de l’apprentissage de la maîtrise de soi (se déconnecter à l’heure des repas par exemple), à comment faire des recherches sur Internet, en passant par protéger son identité numérique. Un vaste programme auquel les parents ne peuvent plus se soustraire.
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4Consacrer du temps aux autres activités
“Les écrans semblent détourner l’enfant d’autres activités jugées comme fondamentales pour son développement physique, psychologique, neurologique et émotionnel”, admet le HCSP. C’est pourquoi il enjoint à trouver un équilibre entre autorisation et interdiction, et à limiter le temps d’utilisation pour consacrer du temps aux autres activités. Les logiciels de contrôle parentaux peuvent aisément aider les parents à limiter le temps, en instaurant des durées de connexion limitées par jour. En effet, un enfant, pour se développer, a besoin d’interagir avec les autres, de jouer, de parler, de lire, de se défouler.
5Savoir demander de l’aide
Certains signes peuvent alerter sur un usage excessif des écrans : isolement, irritabilité, addiction… Autant de comportements qui invitent à demander aide et conseils auprès de professionnels (psychologues, médecins…).
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