Romancier, essayiste et scénariste, Didier Decoin a reçu le prix Goncourt en 1977 pour son roman “John l’Enfer.” Près de vingt ans après, il prend son couvert de membre de l’Académie en 1995. Et, depuis le 20 janvier, il en assure la présidence.Jusqu’au jour où Dieu daignera dévoiler l’avenir à l’homme, toute la sagesse humaine sera dans ces deux mots : “Attendre et espérer!” Ce mot d’Edmond Dantès dans Le comte de Monte-Cristo, dont Didier Decoin a écrit un scénario remarquable pour la télévision, pourrait être le sien à l’annonce de cette nouvelle. Et le nôtre, par la même occasion. Car Didier Decoin n’a jamais caché sa foi catholique, et ce dès la publication de son essai Il fait Dieu en 1975. Un tel homme à la présidence de l’Académie Goncourt pourrait dévoiler un avenir plein de sens dans l’attribution du prestigieux prix littéraire. Après la démission de Bernard Pivot, c’est en tout cas à cet homme de 74 ans que l’Académie a confié son avenir.
L’obsession de Dieu et l’amour de la Bible
Loin s’en faut, ce n’est pas seulement sa foi qui fait valoir l’homme, mais toute sa production littéraire. Homme de plume et de verbe, cet ancien journaliste a publié pas loin d’une quarantaine d’ouvrages et écrit une vingtaine de scénarios pour le cinéma, tout autant pour la télévision. On lui doit par exemple de belles collaborations avec Henri Verneuil (I…comme Icare) et Marcel Carné (La Merveilleuse visite). C’est aussi un amoureux de la mer, il navigue et préside l’association des Écrivains de Marine. Jeune homme du monde et marin, il prend donc la vie comme un homme de la mer.
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Mais c’est toujours avec finesse qu’il écrit et avec humour qu’il transmet, que ce soit son témoignage de foi dans Il fait Dieu ou son dialogue intime avec Élisabeth de la Trinité dans Élisabeth Catez ou l’obsession de Dieu. “J’ai attrapé la foi… j’ai plutôt attrapé la joie”, répondit-il à Christophe Henning, au micro de RCF, alors qu’il évoque sa conversion d’adulte. Pourtant, il sait que pour avoir foi en Dieu, “si on ne l’approche pas en tant qu’enfant on n’y comprend rien !”. Pour lui, “croire fermement que Dieu existe sous la forme de Jésus-Christ, d’un être d’amour absolu”, c’est “tel un ver de terre amoureux d’une étoile” savoir ne pas être “à la hauteur du cadeau”.
Il l’explique dans plusieurs de ses livres, Jésus, le Dieu qui riait ou Célébration de l’inespéré, pour dire comment sa foi a bouleversé sa vie ; puis il écrit carrément sur la Bible, pour la rendre plus accessible aux autres. Comment a été reçue l’annonce de sa nomination dans le milieu littéraire ? Interrogé par Nathalie Lévy sur Europe 1, David Foenkinos la juge être “un excellent choix”, et confirme que Didier Decoin “a une respectabilité assez importante dans le milieu littéraire.” De son côté, Bernard Pivot a exprimé son assentiment dans un tweet élogieux : “Je suis heureux que Didier Decoin, qui en était le précieux toujours avisé et disponible secrétaire général, devienne le président de l’Académie Goncourt”, et d’ajouter “à travers lui, c’est la littérature, le cinéma et la télévision qui sont honorés.”
Je suis heureux que Didier Decoin qui en était le précieux, toujours avisé et disponible secrétaire général, devienne président de l’académie Goncourt. Prix Goncourt 1977 – il n’avait que 32 ans-, à travers lui c’est la littérature, le cinéma et la télévision qui sont honorés.
— bernard pivot (@bernardpivot1) January 20, 2020
À 32 ans, déjà, il écrivait : “À quoi servirons-nous, le jour où les ordinateurs auront notre passé ?”, dans le livre qui le mena au Goncourt. C’est peut-être le moment, pour lui, de pouvoir y répondre.