Qui n’a jamais rêvé, comme Aladin et sa lampe merveilleuse, de pouvoir faire exaucer ses vœux les plus chers par un bon génie ? Que demanderions-nous ? L’amour, le bonheur, la santé, la prospérité si souvent souhaités en ce début d’année ? Ou bien un poste prestigieux, une belle maison, un don artistique… ? Le roi Salomon, lui, a demandé à Dieu qui lui était apparu en songe la sagesse, un « trésor inépuisable » pour les hommes (Sg 7, 14) :
« Donne à ton serviteur un cœur attentif pour qu’il sache gouverner ton peuple et discerner le bien et le mal ; sans cela, comment gouverner ton peuple, qui est si important ? » (1R 3, 9)
Et c’est sans doute sa réputation d’homme et de roi sage qui ont conduit à lui attribuer la plupart des écrits de sagesse de l’Ancien Testament, dont le Livre des Proverbes, le plus ancien des livres sapientiaux. Ce recueil, plus probablement composé sur plusieurs siècles par différents auteurs, est une collection de conseils, de maximes et de paraboles. Présentés comme les recommandations d’un père à son fils, les Proverbes invitent à faire preuve de réflexion et de discernement pour conduire sa vie et non se laisser conduire, dans un monde où rien n’est évident et où la tentation de la facilité est permanente.
Bien qu’il ait été écrit il y a plusieurs siècles, le livre n’en contient pas moins des conseils pratiques toujours pertinents car il traite de thèmes « éternels » : la vie, l’amour, la mort, les relations conjugales, familiales et humaines en général, le travail… ou encore la corruption, comme dans le chapitre 28 du livre, d’où vient notre expression (Pr 28, 21) :
« Être partial dans un jugement n’est jamais bon ; pour une bouchée de pain, un homme s’en rend coupable ».
« L’un des pires maux du monde »
Cet avertissement contre le risque de partialité, même en échange d’une faible contrepartie, la fameuse « bouchée de pain », se retrouve à plusieurs reprises dans la Bible, issu des paroles mêmes de Dieu, comme dans le Livre d’Ézéchiel (Ez 13, 19) :
« Vous me profanez devant mon peuple pour quelques poignées d’orge et quelques morceaux de pain, en faisant mourir des gens qui ne doivent pas mourir, et en faisant vivre ceux qui ne doivent pas vivre ; ainsi vous mentez à mon peuple qui écoute le mensonge. »
Ou celui de l’Exode (Ex 23, 8) :
« Tu n’accepteras pas de présent, car le présent aveugle les clairvoyants et compromet la cause des justes. »
Et pourtant, triste constat et preuve que le Livre des Proverbes reste d’une grande actualité, la corruption est aujourd’hui l’une des plus importantes causes de pauvreté au niveau mondial. Lors d’une allocution à l’occasion du sommet sur la lutte contre la corruption en 2016, le président du Groupe de la Banque mondiale l’identifiait comme « un obstacle majeur au développement économique et social et à l’objectif mondial d’élimination de la pauvreté d’ici 2030 ». Il n’est guère étonnant alors que ce mal qui gangrène toutes les strates de la société soit pour le pape François « l’un des pires maux du monde ».