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« La question est maintenant de savoir comment va évoluer cette mobilisation »

Agnès Pinard Legry - publié le 07/10/19

Soulignant la remarquable affluence de la manifestation « Marchons enfants ! », plus importante que ce que les organisateurs avaient prévu, Guillaume Bernard, politologue et maître de conférences à l’ICES, estime que l’amendement porté par Jean-Louis Touraine sur la GPA a « certainement contribué à augmenter la mobilisation ». Décryptage.One-shot ou début d’une longue série ? La manifestation « Marchons enfants ! » contre le projet de loi bioéthique, ce dimanche 6 octobre, a rassemblé 600.000 manifestants, assurent les organisateurs. D’après un comptage réalisé par le cabinet Occurrence, ils étaient 74.500. « Incontestablement, les manifestants ont été plus nombreux que prévus : en témoignent les itinéraires alternatifs qui ont été mis en place pour permettre à tous de converger vers Montparnasse », explique à Aleteia Guillaume Bernard politologue et maître de conférences à l’ICES. Entretien.

Aleteia : La manifestation du 6 octobre a-t-elle atteint son objectif ?
Guillaume Bernard : C’est d’abord une réussite au niveau du nombre de personnes qui sont descendues dans la rue ! S’ils l’espéraient, les organisateurs ne l’avaient néanmoins pas prévu. Les derniers événements liés à l’amendement porté par Jean-Louis Touraine visant à reconnaître la filiation des enfants nés par GPA à l’étranger, et voté à l’Assemblée jeudi soir (une seconde délibération aura lieu, ndlr), ont certainement dû exaspérer un certain nombre de nos concitoyens et augmenter la mobilisation. Oui, on peut dire qu’au niveau numérique la manifestation a atteint son objectif.



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Qui sont les gens qui sont allés manifester ?
La manifestation était bon enfant avec toutes les générations représentées même si j’ai constaté un renouvellement avec de nombreux jeunes adultes. Ceci étant dit, je pense qu’il y a une base manifestante qui est un peu plus radicale dans son discours que les organisateurs. Beaucoup de manifestants évoquaient la lie de 2013 et plus généralement les évolutions liées à la bioéthique depuis quarante ans. C’est l’effet cliquet : l’occasion de la mobilisation est le projet de loi bioéthique mais la base manifestante est consciente des évolutions sociétales et n’hésite pas à rappeler que le sujet du moment n’est pas venu comme ça ex nihilo, mais qu’il s’agit d’une conséquence d’une cause antérieure qu’est la loi Taubira.

Le message a-t-il été audible ?
Le gouvernement n’en tiendra certainement pas compte pour deux raisons. D’abord il a une majorité parlementaire donc il n’y a pas de raison que le texte ne soit pas voté. Ensuite, ce serait un très mauvais signal pour ses soutiens que de reculer. La question va être de savoir comment va évoluer cette mobilisation quand le gouvernement annoncera qu’il ne reculera pas.

“Les organisateurs vont-ils en rester à des manifestation bon enfant comme ça a été le cas en 2013 ou vont-ils évoluer vers une forme plus offensive, plus efficace ?”

Et pour l’opinion publique ?
De nombreuses personnes doutaient d’une réactivation du mouvement transpartisan qu’avait été la manif pour tous en 2013. Certains ont donc adopté une forme de fatalisme mais, voyant la mobilisation de ce dimanche, ils vont peut-être se réengager. Il y a aussi un phénomène de l’imitation. Sans doute qu’un certain nombre de nos compatriotes n’osaient pas prendre position contre pensant qu’il y avait une majorité favorable. Mais voyant l’opposition massive, cela pourrait certainement en débloquer certains.


PREGNANT
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La France a été le théâtre ces derniers mois de manifestations plus ou moins violentes dans le cadre du mouvement des Gilets jaunes. Manifester dans le calme et la sérénité paye-t-il ?
Il y a un état d’esprit commun entre la manifestation de ce dimanche et la naissance du mouvement des Gilets jaunes qui est le refus de la marchandisation de l’homme, de la réduction de l’homme à un simple matériel. Ces deux situations sont le signe qu’il y a une césure entre la France réelle et les dirigeants politiques. Malgré des différences sociologiques, il y a une vraie convergence. Les deux partagent la même inquiétude que la société soit entièrement réduite à un grand marché. La question des méthodes va désormais se poser aux organisateurs de la manifestation : vont-ils en rester à des manifestations bon enfant comme ça a été le cas en 2013 ou bien vont-ils évoluer vers d’autres formes de protestation ? La manifestation de ce 6 octobre est réussie mais si le mouvement se réduit à une répétition du même type de manifestation cela pourrait démobiliser les gens, les rendre fatalistes.

Ils ont participé à la manifestation du 12 octobre :
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