« Deux moi » est le dernier né du réalisateur de « L’auberge espagnole », Cédric Klapisch. Le film se lance dans une critique, assez édulcorée mais convaincante, de la jeunesse parisienne en prise avec les réseaux sociaux et la solitude. Il est en salle depuis le 11 septembre. L’actualité du sujet peut sans doute parler à un grand nombre de jeunes. Et tout autant aux moins jeunes qui observent l’évolution d’une société qu’ils n’ont pas connue, qu’ils ne comprennent pas ou qu’ils découvriront à travers cette histoire.
La guerre des mondes virtuels et réels
Une jolie palette de très bons acteurs compose la chronique de cette actualité qu’on voudrait ne pas associer à la réalité, tant on y voit le vide, l’absence de sens et de rêve, mais avec beaucoup de parcimonie. C’est cela sans doute qui est le pire. Rien n’est vraiment grave, mais tout est un peu tiède. Ainsi, Camille Cottin et François Berléand reçoivent en consultation deux jeunes déprimés par la vie : François Civil et Ana Girardot. Le petit soleil du film est quant à lui incarné par Simon Abkarian. Parce qu’il en faut bien un.
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Très vite, on devine que le fil rouge de l’histoire est la confrontation du monde moderne et virtuel avec celui du réel : Rémy perd son emploi et va être remplacé par des machines. Ensuite, c’est au monde virtuel que fait face Mélanie, à travers les applications de rencontre et le décalage qu’elle y trouve entre ses désirs et la réalité des rendez-vous. Ces deux-là vivent à côté, dans des immeubles mitoyens, dans la rue, le métro, leur épicerie de quartier, tenue par Simon Abkarian. Un symbole simple mais efficace qui dit beaucoup sur l’absurdité des grandes villes, et surtout de la capitale.
Les relations humaines peuvent-elles sauver le monde ?
Cédric Klapisch s’est spécialisé dans l’analyse de la jeunesse et les comédies sociales, et il parvient toujours à s’adapter. En observateur aguerri, il va à l’essentiel sans tourner autour de conceptions idéologiques ou caricaturalement sociales. L’équilibre est à la mesure de ce qu’il veut dire : montrer ce qu’il sait des enjeux principaux de la jeunesse normée. Ses personnages ne souffrent pas d’une trop grande conceptualisation de l’être humain, mais parviennent à émouvoir quand même. Ils sont, en tout cas, de bons représentants de ce qu’est devenue, en partie, la société. À savoir une productrice de liens détachés, virtuels, ne sachant plus trop se parler. D’ailleurs, pour cela, il y a les psychothérapeutes.
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La jonction de la vie des « deux moi » dans l’épicerie de quartier est très bien vue, dans le sens où elle est par excellence le lieu de la réalité du quotidien. Faire ses courses, quoi de moins subsidiaire ? Les deux protagonistes s’y sentent en tout cas mieux qu’à bien d’autres endroits, parce qu’il y a des dialogues, de la communication, de l’attention même rapide et succincte. Pendant qu’ils cherchent à régler leurs problèmes personnels, sentimentaux ou de sommeil, les sages représentés par les psychothérapeutes ne peuvent rien pour eux quand ils sont seuls. Et la réalité leur répond parfois bien mieux, par petites touches, bien simples, qui recouvrent tout le mystère de la vie, dans sa banalité heureuse et sans cesse surprenante.
Le réalisateur du « Péril Jeune » nous offre encore une vision assez réaliste de la jeunesse, sous forme de comédie légère, dont la morale n’est pas neuve mais fait toujours du bien à entendre à nouveau. C’est une jolie histoire bien menée, sans conte de fée ni cauchemar.
Deux moi, de Cédric Klapisch, avec François Civil, Ana Girardot, Camille Cottin, François Berléand et Simon Abkarian, 1h50. En salles depuis le 11 septembre.