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Quatre lieux de fragilité où Dieu nous parle

Mains sur la pierre de Lourdes

Pèlerines dans la grotte de Lourdes.

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Alexis Leproux - publié le 03/09/19
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« Lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort » (2 Co 12,10). Le célèbre paradoxe de saint Paul a trouvé à Lourdes cet été, une résonance particulière lors du rassemblement Open Source. Pour « revenir à la Source », Mgr Alexis Leproux propose de redécouvrir quatre lieux de fragilités à visiter et à consacrer à Dieu.

Dans le sanctuaire où l’on vient présenter à la Vierge Marie sa fragilité et sa faiblesse, où les pauvres et les malades sont rois, la jeunesse de l’Église et du monde découvre que sa force ne se trouve pas dans les diplômes et les talents, mais dans la faiblesse visitée et consacrée à Dieu par la foi : « Ma grâce te suffit, car ma puissance se déploie dans ta faiblesse » (2 Co, 12). À Lourdes, nous apprenons à « mettre notre gloire dans nos faiblesses », c’est-à-dire à les connaître et les offrir à Dieu pour que la puissance de l’Esprit saint s’y déploie. L’expérience extrême de cette faiblesse et de cette puissance se manifeste dans quatre « lieux anthropologiques », dont nous avons exploré les multiples aspects : la parole, la liberté, la relation et le corps.

La parole : lieu de blessure et de vérité

Personne n’est fort dans la parole. Soit nous en disons trop et nous blessons les autres ; soit nous n’en disons pas assez et notre parole fait défaut. Comment trouver le mot juste de consolation, de pardon, d’encouragement ? Comment apprendre à parler de soi, parler des autres, parler aux autres ? Il ne s’agit pas de maîtriser un langage comme un enfant qui apprend à parler, mais de dire la vérité des êtres et des choses et de nous extraire de ces subtils mensonges et de ces demi-vérités que nous construisons et qui nous emprisonnent. Égale pauvreté de l’homme bavard et de celui qui se tait. Ici nous expérimentons, comme Moïse, que nous sommes comme « des enfants qui ne savent pas parler » et qui ont « la langue pesante ». Or c’est du trop-plein du cœur que la bouche parle (cf. Mt 12, 34). La force de notre parole sera donc égale à celle de notre vie intérieure.

L’habitation de la Parole de Dieu dans le cœur de celui qui, tous les jours, prie, écoute l’Évangile et se recueille est la promesse d’une parole guérie et renouvelée. En consacrant son cœur à la Parole de Dieu dans l’adoration et la prière, la vérité et la charité infusée en soi débordent à l’extérieur et nous transforment en parole de bénédiction. Le monde a besoin de la spontanéité sanctifiée de ceux qui ont accueilli dans la faiblesse de leur parole, la puissance du Verbe de Dieu.

La liberté : un appel à aimer

Le choix infini offert par la société de consommation a paradoxalement affaibli notre liberté et paralysé notre capacité de décision. L’écran qui met le monde à notre portée nous fascine et nous immobilise. L’on s’étonne alors que notre volonté et notre persévérance soient si faibles. Nous découvrons que nous « ne faisons pas le bien que nous voulons et nous commettons le mal que nous ne voulons pas » (Rm 7, 19). Notre capacité à engager notre liberté est sans doute plus faible que celle des générations moins gâtées car notre énergie est absorbée par les distractions et nous oublions que le temps de notre vie est limité.

Ces expériences invitent à l’humilité : les héros de la liberté exaltés par la culture ambiante n’existent pas. Nous aspirons à la liberté mais nous retournons à nos distractions ou à nos objectifs professionnels comme les Hébreux esclaves du Pharaon retournent à leurs corvées. Que voulons-nous vraiment ? Quel est notre désir profond, celui qui émerge après plusieurs jours de marche et de prière ou qui monte dans le silence d’une retraite ? Le désir de l’âme est un appel de Dieu à vivre sur cette terre non pas pour travailler mais pour aimer, pour nous donner et pour dire en vérité « Je t’aime » à un homme, à une femme, à Dieu. Cette parole de consécration où nous engageons tout ne peut se dire qu’avec la grâce de Dieu : cela est impossible pour l’homme. L’appel de Dieu libère notre liberté pour le don total à un autre dans le mariage, ou à Dieu dans la consécration religieuse.

Le lieu le plus vulnérable, celui de l’amour librement reçu et donné, est aussi le lieu le plus gracieux de l’existence, où l’on fait l’expérience de l’éternité. Reconnaître notre faiblesse est la condition pour se laisser choisir et aimer par Dieu. Le monde pourra alors voir la puissance du choix de Dieu, lorsqu’une liberté fragile risque sa vie et la donne à un autre.

La relation, subsistante et vivante

Beaucoup se considèrent comme une chose dont on peut calculer les mensurations, les performances et les défauts, ou se considèrent traités de la sorte. Mais là n’est pas la vérité de l’homme. Il y a infiniment plus de densité d’être dans la relation que nous sommes, que dans la chose que nous imaginons être. Nous sommes une relation subsistante et vivante, à l’image de Dieu qui se définit lui-même comme Père, Fils et Esprit saint, c’est-à-dire comme relation.

Nous ne pouvons pas nous contenter d’être une monade indépendante ; ou une intériorité autonome et narcissique. Notre âme est faite pour accueillir les visages de tous ceux qui nous sont confiés et à qui nous sommes donnés. Quelle est la qualité de nos relations avec nos parents, nos amis, nos responsables ou nos subordonnés : n’est-ce pas cela qui fait la richesse de notre être ? C’est pourquoi le cœur d’une mère n’est pas à l’étroit quand elle accueille de nombreux enfants, et ni celui d’un prêtre lorsqu’il se donne à beaucoup de fidèles. Il n’y a pas de limite à l’amour, à la dilatation d’un cœur, à la densité de la vie intérieure.

Le corps : fragile, donc glorieux

Le corps est ce que nous avons de plus fragile et de plus sacré. À ceux qui y prêtent attention la maladie, le temps qui passe, la mort font sentir sa fragilité. Ces expériences incontournables de l’existence sont autant de paroles de Dieu qui invitent à l’humilité. À condition de renoncer aux soins extrêmes que nous mettons à embellir notre corps et à masquer sa pauvreté, à éviter cette gênante fragilité où Dieu pourtant veut se révéler. Le pauvre corps est appelé à être le signe de Dieu qui a pris chair dans la pauvreté. Nous portons corporellement une image de Dieu, un constant rappel de l’Incarnation.

Les chrétiens ont la possibilité de renoncer aux images narcissiques de soi projetées sur Facebook et compagnie, qui nous empêchent d’être le sacrement de Dieu dans notre corps. Ainsi, le choix d’une sobriété dans le maquillage et le vêtement, et l’acceptation du défaut corporel qui nous complexe secrètement, nous rendent-ils transparents à la présence de Dieu. Celle qui, par exemple, renonce aujourd’hui à la coquetterie sera glorifiée comme Mère Teresa ou comme une mère de famille qui ont engagé leurs corps dans l’amour. Nous avons aujourd’hui la grâce d’être pour le monde, dans nos corps, un temple de l’Esprit et un sacrement de Dieu.

Tout ceci s’apprend dans le mystère eucharistique où nous présentons notre corps à Dieu — lorsque nous lui remettons en particulier ce qui nous complexe et nous fait souffrir. Enfin, la Vierge Marie nous en donne l’assurance : elle qui a accepté que son pauvre corps devienne le temple de Dieu se trouve éternellement glorifiée au ciel.

Quand les saints nous expliquent l'importance de la prière :
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