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Sagesse des hommes et folie de Dieu

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Guillaume de Prémare - publié le 20/06/19
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Comment concilier la folie de la croix avec la sagesse de la raison, qui est aussi un don de Dieu ?

Surprise dans ce passage du livre des Proverbes, lu le jour de la fête de la Sainte Trinité : la Sagesse affirme qu’elle trouvait ses « délices au milieu des hommes ». La Sagesse est bien aimable avec le genre humain, dont la disposition à la cerner est pourtant fragile.

Une sagesse antique très humaine

Chez nos grands anciens du monde grec, la sagesse était une double quête : celle de la connaissance des grandes vérités et celle d’une sagesse de vie concrète, admirablement humaine. Chez Salomon, la sagesse était une capacité de jugement et de gouvernement, reçue comme un don de Dieu. Pour le peuple d’Israël, les choses étaient assez simples. Il y avait les prescriptions de la loi ; et il y avait ce Dieu qui punit l’infidélité de son peuple, mais qui finit par le délivrer de la main de l’ennemi.

Dieu fait triompher son peuple par les moyens humains ordinaires — c’est-à-dire la guerre —, comme en témoigne le massacre des Cananéens lors de la conquête de la terre promise. Voici une sagesse divine très humaine… Chez les païens, il s’agit de rendre un culte pour s’attirer les faveurs de la divinité. À partir du moment où les dieux ont un pouvoir discrétionnaire de bénédiction et de malédiction sur les hommes, il est sage de se les rendre favorables.

La folie de la croix

Qu’en est-il pour les chrétiens ? Saint Paul écrit aux Corinthiens : « Par une disposition de la sagesse de Dieu, le monde, avec toute sa sagesse, n’a pas su reconnaître Dieu, il a plu à Dieu de sauver les croyants par cette folie qu’est la proclamation de l’Évangile. » Et il ajoute : « Ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes. » Reconnaissons donc que l’affaire se complique : l’homme cherche la sagesse et trouve la folie. La folie de la Croix, bien sûr ; et toute cette sève incomparable des Évangiles : folie de l’amour des ennemis, folie de tendre l’autre joue, folie des Béatitudes, lesquelles renversent toutes les catégories du monde, presque comme un défi à la raison.

Un équilibre imparfait

Le christianisme est un curieux objet historique dans le panorama des religions, car la révélation de la sagesse divine semble parfois renverser la sagesse humaine. Cependant — et c’est un paradoxe — la folie de la Croix du Christ est, d’une certaine manière, tempérée par la raison humaine, laquelle est un don de Dieu.

Par exemple, quel gouvernement, au nom des Évangiles, tendrait l’autre joue à l’ennemi qui frappe ? Quel chef de guerre dirait à sa soldatesque « Rentre ton épée au fourreau » tandis que l’assaut est imminent ? C’est ainsi un christianisme en quelque sorte tempéré qui s’est déployé dans l’histoire humaine, à la recherche d’un équilibre imparfait entre la raison des hommes et la folie des Évangiles dont parle saint Paul.

À défaut de cet équilibre imparfait, le christianisme deviendrait une sorte de fondamentalisme humanitariste, un idéalisme pacifiste. Dans cet équilibre imparfait, le christianisme approche peut-être la perfection de la sagesse de Dieu, qui porte la mystérieuse union du « très humain » et du « très divin ».

Chronique publiée en partenariat avec Radio Espérance, podcast 21 juin 2019.

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