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Quand l’amour fait souffrir

KRYZYS W NARZECZEŃSTWIE
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Edifa - publié le 20/05/19
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« J’ai cru en l’amour et j’ai été déçu. Je pense que rien au monde ne fait plus souffrir, au point que je me demande s’il faut seulement y songer”. Le père Denis Sonet, grand spécialiste du couple, répond à cette triste et amère déception de l’amour.C’est vrai que la souffrance n’épargne pas toujours ceux qui aiment, même quand il s’agit pourtant d’un amour partagé. Combien de tensions, d’incompréhensions, de disputes au cœur des couples les meilleurs. Combien de dépressions, d’effondrements, et même de suicides après des amours ratées, ou de grandes passions déçues !

Pourquoi l’amour, qui promet tant de bonheur, est-il aussi ce qui fait tant souffrir, sinon parce que justement il promet un peu trop : le paradis sur Terre, le Bonheur avec un grand B ? L’être humain attend tellement de l’amour, il en attend le bonheur parfait, absolu, total. C’est qu’en effet il est fait pour aimer, et que « sans amour, on n’est rien du tout ! ». Fait à l’image de celui qui est l’amour et par celui qui est l’amour, l’être humain est habité par un immense besoin d’aimer et d’être aimé.


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Deux grands désirs dans le cœur de l’être humain

En fait, deux grands désirs l’habitent : celui d’être, de compter, d’être reconnu, d’avoir de la valeur, et celui d’« être-avec », d’avoir des relations, de l’affection, de vivre la communion. Or, l’amour comble en partie ces deux besoins : quand on est aimé, on existe pour quelqu’un et on partage avec quelqu’un. De plus, l’amour promet d’apporter les joies du corps, du cœur et de l’esprit. Quoi de mieux ?

Mais il y a un revers à la médaille : quand l’amour ne donne pas cette plénitude, c’est la souffrance ! Et comment peut-il prétendre donner cette plénitude ? Il promet ce qu’il ne peut tenir. Il promet à l’homme cet infini dont il a la nostalgie.

La souffrance est évidemment très grande pour ceux ou celles qui se sentent abandonné(e) s par l’aimé(e). C’est le cas des chagrins d’amour. Mais c’est aussi le cas de tant de jeunes qui n’ont pas la chance de se sentir désirés, et qui se sentent des « laissés-pour-compte » de l’amour. Cette possibilité de bonheur entrevue leur échappe. Ils se croient incapables de plaire, puisqu’ils ne suscitent ni élan ni même le moindre intérêt. « C’est dur de s’apercevoir dans une soirée dansante qu’on reste sur le banc! » Touché au niveau de l’être, le non-aimé se sent dévalorisé, et doute de lui : « Je suis certainement laid ou terne. Je suis nul, je ne sais pas comment me comporter et plaire ». Mais il est aussi touché au niveau de l’« être-avec », souffrant d’une solitude dont il ne sait comment sortir.


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Que faire dans ce cas, sinon refuser de prendre son parti de cette situation, de mariner dans un complexe malsain d’infériorité ? En prenant soin de son apparence (on a le droit de se faire beau, de se vouloir jolie, en se gardant bien des modes qui ne nous arrangent pas !), en faisant un inventaire objectif de ses qualités, on reprendra confiance en son pouvoir de séduction. Et on apprendra le chemin de la confidence pour se faire des amis.

Souffrance au sein du couple

La souffrance n’épargne pas non plus les couples dont l’amour est partagé. La vie de couple n’est pas « un long fleuve tranquille ». Il faut d’abord « digérer » la différence, le fait que l’autre est autre. Il faut attendre son consentement, son accord, pour chacun de nos désirs. Il faut accepter qu’il soit limité, imparfait, qu’il ne puisse combler toutes nos attentes. Il faut renoncer à l’impossible fusion. Il faut s’attendre à ressentir les souffrances de l’autre (l’amour rend sensible et vulnérable). Il faut dépasser les aléas de la vie (fatigue, maladie, chômage, etc.) qui viennent secouer la barque de l’amour. Autant d’impératifs qui supposent que l’on accepte l’inévitable imperfection de tout amour : rien n’est parfait, à commencer par nous-mêmes. Il n’y a pas de bois sans nœud.


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Ce qui implique de renoncer au vieux rêve d’un amour idyllique, sans tension ni heurts, qu’on accepte de cheminer à deux dans la grisaille du quotidien, sans penser un peu vite qu’ailleurs l’herbe est plus verte, qu’on apprenne aussi à ne pas trop demander à l’autre parce que, par ailleurs, on est capable de vivre seul(e). Ce qui suppose aussi qu’on soit capable d’une bonne communication, où chacun pourra dire sa souffrance et se sentir écouté.

Cela dit, il reste raisonnable de croire au merveilleux de l’amour, qui n’est obtenu que dans la mesure où l’on réalise qu’il n’est pas un « donné » mais un « à faire », dans la mesure où l’on cesse de rêver, et qu’on a l’humilité de reconnaître que le seul qui peut nous combler, c’est le Dieu des Noces éternelles !

Père Denis Sonet

(1926 – 2015)

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